-
Archives
- novembre 2024
- octobre 2024
- septembre 2024
- juillet 2024
- juin 2024
- mai 2024
- avril 2024
- mars 2024
- février 2024
- janvier 2024
- décembre 2023
- novembre 2023
- octobre 2023
- septembre 2023
- août 2023
- juillet 2023
- juin 2023
- mai 2023
- avril 2023
- mars 2023
- février 2023
- janvier 2023
- décembre 2022
- novembre 2022
- octobre 2022
- septembre 2022
- août 2022
- juillet 2022
- juin 2022
- mai 2022
- avril 2022
- mars 2022
- février 2022
- janvier 2022
- décembre 2021
- novembre 2021
- octobre 2021
- septembre 2021
- août 2021
- mai 2021
- octobre 2020
- septembre 2020
- août 2020
- mars 2020
- février 2020
- janvier 2020
- décembre 2019
- novembre 2019
- octobre 2019
- septembre 2019
- août 2019
- juin 2019
- mai 2019
- avril 2019
- mars 2019
- février 2019
- janvier 2019
- décembre 2018
- novembre 2018
- octobre 2018
- septembre 2018
- juin 2018
- mai 2018
- avril 2018
- mars 2018
- février 2018
- janvier 2018
- décembre 2017
- novembre 2017
- octobre 2017
- septembre 2017
- juin 2017
- mai 2017
- avril 2017
- mars 2017
- février 2017
- janvier 2017
- décembre 2016
- novembre 2016
- octobre 2016
- août 2016
- juin 2016
- mai 2016
- avril 2016
- mars 2016
- février 2016
- janvier 2016
- décembre 2015
- novembre 2015
- octobre 2015
- septembre 2015
- août 2015
- juin 2015
- mai 2015
- avril 2015
- mars 2015
- février 2015
- janvier 2015
- décembre 2014
- novembre 2014
- octobre 2014
- août 2014
- mai 2014
- avril 2014
- mars 2014
- février 2014
- janvier 2014
- décembre 2013
- novembre 2013
-
Meta
Archives pour février 2014
Programme mars et avril 2014
LULU FEMME NUE – UN BEAU DIMANCHE – THE GRAND BUDAPEST HOTEL -IDA – VIVA LA LBERTA – TONNERRE
6 au 11 mars
LULU FEMME NUE
De Sólveig Anspach – France 2014 – 1h27
Avec Karin Viard, Bouli Lanners, Claude Gensac …
À la suite d’un entretien d’embauche qui se passe mal, Lulu décide de ne pas rentrer chez elle et part en laissant son mari et ses trois enfants. Elle n’a rien prémédité, ça se passe très simplement. Elle s’octroie quelques jours de liberté, seule, sur la côte, sans autre projet que d’en profiter pleinement et sans culpabilité. En chemin, elle va croiser des gens qui sont, eux aussi, au bord du monde : un drôle d’oiseau couvé par ses frères, une vieille qui s’ennuie à mourir et une employée harcelée par sa patronne… Trois rencontres décisives qui vont aider Lulu à retrouver une ancienne connaissance qu’elle a perdue de vue : elle-même.
Du 13 au 18 mars
UN BEAU DIMANCHE
De Nicole Garcia – France 2013 – 1h35
Avec Louise Bourgoin, Pierre Rochefort, Dominique Sanda …
Le temps d’un week-end, Baptiste, instituteur solitaire et atypique, recueille un de ses élèves et fait la connaissance de sa mère, Sandra, une jolie serveuse dans un restaurant de plage. D’abord solaire, le climat du film s’assombrit lorsque Baptiste, pour aider Sandra à payer une dette, l’emmène avec son fils dans le luxueux château de sa famille. C’est dans cette vieille demeure que le film explore le rapport à l’argent, la question de l’héritage, comme bienfait et comme fardeau. Nicole Garcia nous offre des moments de grâce dans ce film traversé de douleurs et de rendez-vous manqués, et qui révèle Pierre Rochefort. Un acteur est né.
Du 20 au 25 mars
THE GRAND BUDAPEST HÔTEL
De Wes Anderson – EU, All, GB 2014 – 1h40 – VOST
Avec Ralph Fiennes, Jude Law, Tony Revolori, Tilda Swinton, Edward Norton, Adrien Brody, Léa Seydoux …
C’est l’histoire de Gustave H, le concierge d’un célèbre hôtel européen et de son protégé, le jeune Zéro Mustapha ; entre eux il y a une relation de maître à élève qui s’établit au cours d’un voyage initiatique mouvementé qui va les conduire à la recherche d’un tableau volé tout en prenant part à un conflit familial autour d’un important héritage. Le spectateur navigue sans cesse entre comédie et gravité ce qui fait le charme de ce film au casting impressionnant et il assiste au bouleversement qui transforme l’Europe durant la première moitié du vingtième siècle.
Présenté en ouverture au récent festival de Berlin 2014, il a remporté le grand prix du jury.
Du 27 mars au 1er avril
IDA
De Pawel Pawlikowski – Pologne 2013 – 1h20 – VOST
Avec Agata Kulesza, Agata Trzebuchowska, Dawid Ogrodnik …
Nous sommes en 1962, dans la Pologne communiste à peine sortie du joug stalinien. Dans un couvent glacial et silencieux, la toute jeune Anna, orpheline, s’apprête à prononcer ses vœux. C’est alors que la mère supérieure lui apprend qu’elle s’appelle en fait Ida, qu’elle est d’origine juive et qu’elle a aussi une famille en la personne d’une tante prénommée Wanda. Ensemble les deux femmes, que tout oppose, remontent le fil de l’histoire douloureuse de leur famille. Pawlikowski filme avec une élégance rare la Pologne épurée par le communisme. Le noir et blanc d’une pureté irréelle, un format d’image carré et une bande son décalée contribuent à marier parfaitement le spirituel et le sensuel, l’historique et l’intemporel.
Du 3 au 8 avril
VIVA LA LIBERTÀ
De Roberto Andò – Italie 2014 – 1H34 – VOST
Avec Toni Servillo, Valerio Mastandrea, Valeria Bruni Tedeschi …
A l’aube des élections, Enrico Olivetti, secrétaire général du parti d’opposition, est en chute libre dans les sondages… Il disparait et se réfugie à Paris chez un ancien amour qui travaille dans le cinéma. Son frère jumeau, Giovanni, philosophe excentrique qui sort de l’hôpital psychiatrique, va le remplacer,et… redonner confiance aux italiens. Mais ce n’est pas un clown à la Beppe Grillo, c’est juste un idéaliste lettré (il cite Brecht dans ses discours), plein de cette fougue que son frère a perdue. En mélancolique réservé ou en dingue éclairé, Toni Servillo est grandiose. Ce film est tiré du livre « Le trône vide » écrit par Roberto Andò lui-même, et distille un délicieux parfum d’optimisme.
Du 10 au 15 avril
TONNERRE
De Guillaume Brac – France 2014 – 1H40
Avec Vincent Macaigne, Solène Rigot, Bernard Menez …
Noel approche, la neige s’annonce, Maxime, jeune trentenaire parisien, revient habiter chez son père, dans la petite ville de Tonnerre « ville fleurie » et paisible de son enfance : il chante, compose à la guitare, vient de sortir un album avec succès. Il raconte tout cela à une jeune et jolie journaliste en verve : elle s’appelle Mélodie, il en tombe amoureux et comme un signe, la neige arrive, en même temps que leur premier baiser… Tout semble simple, joyeux, tendre et soudain tout bascule : Mélodie disparait… Le film s’accélère, alors : motifs, genres et registres se mêlent et cette diversité de ton en fait sa richesse : on s’attache insensiblement, mais fortement à son retour sur les lieux de l’enfance, finissant en entrée dans l’âge adulte..
Publié dans Archives programmes
Commentaires fermés sur Programme mars et avril 2014
Les autres films à ne pas manquer
Publié dans Ailleurs
Commentaires fermés sur Les autres films à ne pas manquer
The Lunchbox
De Ritesh Batra
Inde 2013 – 1h42 – VOST
Avec Irrfan Khan, Nimrat Kaur, Nawazuddin Siddiqui…Une comédie romantique indienne fine et précise comme de la cuisine moléculaire.
Plus fort qu’Alloresto, il y a les dabbawallahs à Mumbai, ces livreurs distribuant, qu’il vente ou qu’il pleuve, les paniers-repas des employés de bureau, de leur domicile à leur lieu de travail – le fooding, là-bas, c’est encore la bouffe maison.
Lorsque ce système huilé, très Brazil, se grippe, c’est un prétexte pour cette jolie comédie romantique indienne. Ila, jeune épouse au foyer, expédie par erreur à Saajan, veuf ronchon en fin de carrière, les petits plats qu’elle mitonne pour son indifférent de mari. Commence une relation épistolaire et plus si affinités.
Que l’on soit fan de The Shop around the Corner (Ernst Lubitsch) ou de Love Actually (Richard Curtis), la rom-com use des mêmes ingrédients : le hasard, l’attraction des contraires et le bouquet final où les promis se retrouvent…
The Lunchbox n’est pas le buffet bollywoodien attendu, hypersucré, qui resterait sur le ventre. Le film tient aussi de la cuisine moléculaire, puisque Ritesh Batra formule une alchimie entre des personnages (pratiquement) jamais présents ensemble à l’écran. L’amour comme gaz et non comme cristallisation. Le hors-champ est tantôt comique (le running gag de la voisine invisible qui prodigue conseils de cuisine et d’amour à Ila), tantôt tragique (le suicide d’une mère), surtout romantique. De quoi lier ce couple incongru par la parole, qui se répond en voix off par des lettres truffées
de confidences – elle veut s’émanciper, lui croit être passé à côté de sa vie.
The Lunchbox tisse des liens forts sans internet, ni portable, uniquement via le montage et les mines incertaines de ses protagonistes. Sans négliger leur espace. C’est Saajan à son bureau, cadré comme dans une tour d’ivoire parmi ses collègues ; c’est l’arrière-plan documentaire, palpable par touches, des rues grouillantes de Mumbai aux distinctions sociales et religieuses.
La débutante Nimrat Kaur et le vétéran Irrfan Khan sont très craquants, oscillant entre déprime taiseuse et lueurs d’espoir dans le regard. A l’image d’une société indienne à la fois traditionnelle et dynamique, le film mélange vieilles ficelles romanesques et distance pas dupe dans sa façon de jouer avec le happy end inhérent au genre.
Nouveaux départs, transmission, transitions, filiation : tout le monde va mieux, mais pas forcément selon le plan initial. La conclusion est nuancée mais demeure assez feel good sans qu’on se sente floué. Pour en finir avec les inévitables comparaisons culinaires, The Lunchbox pratique un slow food varié en saveurs et textures, aérien mais bien enraciné dans son terroir. Un premier film réussi. On reviendra chez Ritesh Batra.
Les Inrockuptibles
Publié dans Archives films
Commentaires fermés sur The Lunchbox
Ritesh Batra
Ritesh Batra écrit et met en scène en 2011 le court métrage Café regular, Cairo qui est projeté dans plus de quarante festivals à travers le monde et qui remporte douze prix.
Né à Bombay en 1979 (?), son premier long-métrage The Lunchbox avec Irrfan Khan et Nimrat Kaur dans les rôles principaux est tourné en 2012 dans sa ville natale de Bombay. Le film est également sélectionné dans le cadre de la semaine de la critique à Cannes.
Filmographie
The Lunchbox (Dabba) 2013 Réalisateur/Metteur en Scène et Scénariste
Café regular, Cairo 2011, Réalisateur/Metteur en Scène
Entretien : Rencontres avec Ritesh Batra et Nimrat Kaur
Avec délicatesse et un zeste d’humour, The Lunchbox fait vibrer une corde sensible universelle, celle des émotions. Nous guidant dans un dédale de sentiments, le charme de ce film opère via une correspondance épistolaire et gustative. Par le biais de ce subterfuge, les protagonistes, ternes et figés, se révèlent et retrouvent goût à la vie. C’est à Paris, dans l’antre de Happiness Distribution, que nous avions rendez-vous, afin de converser sur ce conte aiguisant papilles et titillant rétines, avec l’interprète féminine, Nimrat Kaur et l’auteur-réalisateur, Ritesh Batra.
Nitraté Kaur
En Inde, l’on doit parler de vous comme une incarnation moderne de Charulata…
C’est en fait un surnom qui m’a été donné en France, à Cannes par le directeur artistique de la Semaine de la Critique. Je l’ai d’ailleurs rencontré il y a deux jours et je lui ai dit que c’était un excellent surnom. Celui-ci est tellement noble…
Comment avez-vous appréhendé ce rôle, d’une femme au foyer très seule ?
Je pense que tout ce dont on a besoin est dans le scénario, tout part de là. J’ai ensuite construit mon personnage sur cette base que l’on m’a donnée. C’est l’origine. La structure de l’ensemble, la forme que l’on veut lui donner, c’est le travail avec le réalisateur en lui-même. Dès le début, le matériel était donc absolument fabuleux, c’était un espace où il suffisait d’être sincère avec le moment, et arriver à un bon résultat ne demandait pas vraiment d’effort, puisqu’on se laissait guider. C’était comme dans la vie, vous savez, où l’on ne sait pas ce qu’il va se passer dans cinq jours. Vous vivez votre vie et vous êtes vous-même. Si quelque chose vous arrive, il vous suffit de réagir aux événements. C’était donc très proche de la vie dans cette optique. Je ne devais donc pas penser à la solitude, mais plutôt me poser des questions comme : qui cette personne était-elle dans le passé ? Comment est-elle devenue cette personne ?
Je pensais donc à ce personnage qui venait d’un monde diamétralement opposé au mien. J’ai en effet une vie très remplie, qui me force à voyager sans cesse, j’ai énormément d’amis et une vie sociale importante, tout en étant financièrement autonome. Aucune de ces choses ne s’appliquent à la vie d’Ila. Et donc construire ce personnage en l’extrayant de choses enfouies en moi était absolument fascinant. J’ai passé des heures à lire et relire le scénario et à parler avec Ritesh de la manière dont on voulait accompagner les gens à travers ce voyage. Et c’est tout ça qui a contribué à créer ce qu’il y a dans le film.
Est-ce que vous avez longuement préparé le tournage ?
Ce qui est sûr, c’est que j’ai passé beaucoup de temps dans l’appartement du film. Il était disponible environ un mois avant. C’est rare en Inde d’avoir ce luxe avec les lieux de tournages ou même d’avoir autant de temps. Je n’ai pas pris d’autres rôles pendant ce temps. J’avais donc le temps et le luxe de passer du temps dans cet appartement qui allait devenir le mien. Tout particulièrement la cuisine… J’y préparais quelque chose à manger avant de tourner. J’ai même commencé à prendre des cours de cuisine et à beaucoup plus cuisiner pour ce film.
J’ai grandi en observant des femmes cuisiner. Ma mère cuisine avec beaucoup d’amour et de soin. Ma grand-mère a fait la cuisine toute sa vie, depuis ses 11 ans peut-être. Ce sont des femmes qui n’ont pas travaillé par choix.
C’est quelque chose qui m’est venu assez naturellement, d’être dans la cuisine. Et je cuisine également pour moi, ou pour des amis. J’adore cuisiner, être dans la cuisine.
Vous savez, c’est très personnel de faire la cuisine pour nourrir quelqu’un que l’on aime et générer une réaction d’amour en retour. Faire la cuisine est considéré comme un immense talent et une grande vertu pour les femmes en Inde. C’est quelque chose qui a de nombreuses dimensions.
J’ai aussi passé beaucoup de temps avec la petite, afin qu’elle soit à l’aise avec moi. Nous avons essayé de nous rapprocher le plus possible. Nous n’avons pas fait beaucoup de répétitions, nous avons souvent laissé faire la spontanéité du moment pour voir ce qui en sortait. Je peux prévoir de jouer quelque chose d’une certaine façon dans deux mois, mais mon humeur du jour sur le tournage peut aussi être très différente. Et pour moi, il est mieux de laisser le moment décider de cela. Beaucoup de décisions étaient donc plutôt instinctives.
N’était-ce pas frustrant de tourner un film avec Irrfan Khan et Nawazuddin Siddiqui sans partager de scène avec eux?
(rires) Je ne sais pas, c’était comme un avant-goût… J’ai grandi en regardant les films d’Irrfan. C’est un acteur formidable, de ceux qui ont montré l’exemple de ce que l’on peut faire et de ce à quoi on n’est pas obligé de succomber. Car ce n’est pas quelqu’un qui va se cantonner au travail de routine qui est attendu des têtes d’affiche masculine. Il fait des choix très intéressants et j’admire son travail, je voulais donc jouer avec lui à tous les niveaux, sur certaines scènes ou n’importe où ! J’ai proposé à Ritesh d’ajouter des chansons, des fantasmes du personnage : elle rêve qu’ils sont au Bhouthan, et ils chantent et dansent ! (rires) Bien sûr, ce n’est pas arrivé !
J’aurais vraiment adoré jouer avec lui et Nawazuddin Siddiqui, qui est également une institution en Inde, mais c’était déjà une formidable opportunité de voir mon nom au générique entre ces deux acteurs. Rien que cela, c’était absolument magnifique.
Pour un premier film, on pense toujours que ses débuts doivent être mémorables et je pense que mon travail avec eux sur ce film les rend très spéciaux.
Vous avez fait de la publicité, du théâtre, et on vous voit maintenant au cinéma avec Peddlers et ce film. Comptez-vous conserver toutes ces facettes, et qu’est que qui vous fait le plus envi en tant qu’actrice ?
Je veux juste continuer à me surprendre moi-même, à ne pas m’endormir en faisant toujours la même chose de manière confortable. C’est cela qui me fait le plus envie : trouver du neuf à chaque fois que j’en ai marre de quelque chose. En ce moment, je recherche plus que tout quelque chose que j’aurai du mal à surmonter. Faire quelque chose sans être vraiment sûre de la manière dont je vais pouvoir le réaliser. Tout ce qui est un défi m’apporte une forme de satisfaction. Je veux pouvoir travailler sur n’importe quel genre de films, partout dans le monde. Je n’ai encore jamais cédé à la tentation d’accepter un rôle uniquement parce que j’étais libre, ou que j’avais le temps et que je m’ennuyais car je n’avais rien d’autre. Pour moi, tout ce que je fais doit être une histoire d’amour, que ce soit une publicité, une pièce ou un film. J’ai vraiment envie de continuer le cinéma. J’espère donc que des films intéressants vont continuer à me parvenir !
La présence de Karan Johar lors de la distribution de The Lunchbox a permis de donner une visibilité en Inde à votre film. Avez-vous beaucoup de propositions depuis ?
Karan Johar a vraiment été un atout majeur pour le film. Le nombre de spectateurs venus voir le film en salle a considérablement augmenté parce qu’il était attaché à la production. En Inde, il a été l’une des clefs d’un succès du film, si ce n’est la clef du succès. Absolument fantastique. Et personnellement, ce fut un grand privilège d’être associé à quelqu’un comme lui. C’est un réalisateur-producteur formidable, sophistiqué, et une grande source d’inspiration. Etre à ses côté pendant la promotion du film fut très formateur. Il y a eu un changement radical dans mon travail par rapport à mon rapport au métier. Un acteur travaille seul, accepte les rôles de son côté et arrive un moment où on a besoin que quelqu’un guide son travail car il y a de plus en plus de choses à faire. Grâce à lui, certaines des personnalités les plus influentes d’Inde s’intéressent à ma carrière, aux choix que je vais faire… On a ce petit sentiment d’appartenance, d’avoir trouvé un point d’ancrage. On n’est plus une île, isolée, ignorante de ce qui se passe autour de soi. Ça a donc fait une différence : cela m’a parmi d’être présentée aux plus importants cinéastes et artistes du pays en ce moment. J’ai donc pu lire beaucoup de propositions intéressantes, et ce n’est qu’une question de temps. Mais je ne suis pas encore tombée amoureuse d’un projet pour le moment. Et je ne veux pas faire quelque chose immédiatement uniquement parce que soudainement, il y a comme un intérêt sur ce que je vais faire ensuite. C’est super, mais c’est aussi une source de pression, et je ne veux pas diluer ma sensibilité dans un travail sans intérêt. Quelque part, je veux donner raison à l’intérêt dont je bénéficie aujourd’hui et ne pas prendre n’importe quoi parce que je dois faire quelque chose.
Nous demandons à chaque actrice que nous rencontrons de nous parler d’une scène d’un film qui les a particulièrement touchée, fascinée, marquée et de nous la décrire en nous expliquant pourquoi.
Pouvez-vous nous parler de ce qui serait votre moment de cinéma ?
Il y a ce film qui m’est resté en mémoire : Le Scaphandre et le papillon, avec cet acteur français… Comment s’appelle-t-il ?
Mathieu Amalric !
Il y a donc cette scène…
C’est un film magnifique, superbement filmé.
Pour moi, il y a cette scène où il est à la plage, et il est sur son fauteuil roulant, et il regarde des enfants jouer, et il regarde sa magnifique femme, avec le vent dans sa robe, ses cheveux flottants, et juste à ce moment… mais je ne suis pas un homme donc je ne peux pas vraiment penser comme un homme… mais je me suis sentie comme un homme à ce moment ! J’étais un homme rendu infirme par les circonstances. Comme c’est un film inspiré d’une histoire vraie, je crois qu’il a laissé une impression profonde en moi, sur le fait que c’est quelque chose qui peut arriver à n’importe qui n’importe quand. C’est la réalité de la vie. Je crois qu’il était éditeur ou quelque chose comme ça, un éditeur pour un magazine très important, je ne sais plus trop. Mais il a extrêmement de succès, il a la vie que tout le monde rêve d’avoir et soudain, il a la vie que l’on ne souhaiterait pas avoir à son pire ennemi. Et on voit cet homme en fauteuil roulant, incapable d’exprimer ses désirs ou d’embrasser ses enfants. C’est bouleversant… Il y aurait beaucoup d’autres exemples, c’est le premier qui m’est venu en tête.
Avez-vous un dernier mot pour les lecteurs d’East Asia ?
Je veux juste dire que c’est absolument fascinant d’être de retour en France. Nous étions là à Cannes. Et l’amour que l’on ressent à Paris autour du film, en en faisant la promotion, c’est très chaleureux. Et j’ai très hâte de visiter la France : nous allons faire un tour des villes très bientôt et nous espérons que le film sera aimé partout. J’ai hâte de voir comment les gens vont réagir. Donc allez voir The Lunchbox et dites nous ce que vous en pensez.
Bon appétit !
Ritesh Batra
Après des films comme Rab Ne Bana Di Jodi et Stanley Ka Dabba, The Lunchbox utilise de nouveau cet incroyable accessoire qu’est le « dabba » (panier-repas) pour raconter une histoire. Vous avez travaillé sur un documentaire sur les dabbawallas en 2007, est-ce que l’idée de The Lunchbox vient de cette expérience ?
Oui, bien sûr. En fait, je n’ai pas fait le documentaire, mais j’ai fait des recherches sur le sujet et j’ai suivi un livreur pendant quelques semaines. Nous sommes devenus amis et il a commencé à me raconter des germes d’histoires. Par exemple, telle cliente est une femme au foyer, qui est toujours en retard… J’ai commencé à m’intéresser à ces histoires et c’est là que j’ai arrêté le documentaire et me suis attelé au scénario.
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre méthode d’écriture ?
Pour ce film, je me suis vraiment concentré sur les personnages. J’ai d’abord commencé par le personnage d’Ila. Je voulais faire un film dans lequel une femme voulait changer sa vie, essayer de réorganiser son mariage. Et un jour, je me suis dit : « et si elle changeait la vie de quelqu’un d’autre ? ». C’est là qu’est né le personnage de Saajan, et à travers lui, celui de Shaikh. L’histoire passait ensuite d’un personnage à l’autre.
Vous avez étudié aux Etats-Unis et êtes allé à Sundance. Pouvez-vous nous en dire davantage sur votre parcours ?
J’ai étudié l’économie et travaillé comme consultant pendant 3 ans. Ce que j’ai détesté. J’étais extrêmement mauvais dans ce travail. J’ai toujours rêvé de faire des films et de décrire le monde avec des films. Après 3 ans, j’ai démissionné et j’ai fait une école de cinéma à NYU, l’université de New-York. Lors de ma première année, j’ai eu la chance d’être sélectionné au Sundance Lab. Mais c’était aussi l’année du début de la crise financière, et c’est devenu impossible de rester à l’école. J’ai donc dû arrêter mes études, très peu de temps après avoir commencé. J’ai réalisé des courts-métrages qui sont allés en festival. Mon dernier court, réalisé juste avant The Lunchbox était fait pour ARTE, c’était donc une vraie preuve de confiance, et ils ont aussi financé une partie de mon long-métrage.
Il semblerait que vous utilisez les dabbas comme des métaphores de vos personnages jusqu’à ce qu’ils soient conscients de leur propre existence et ne laisse plus le système les guider. Pouvez-vous nous en dire un peu plus là-dessus ?
Je n’aime pas le terme de métaphore car les films sont vraiment sur les relations humaines, le voyage émotionnel des personnages, la manière dont les gens interagissent, influent sur la vie des autres, ou pas. Métaphore n’est donc pas le mot. Je pense que ce que veut dire le film est là, dehors. C’est ce que les gens expérimentent. Le film est uniquement complet avec un public pour le ressentir. Maintenant que vous l’avez vu et repéré les métaphores, je suis très content, car c’est important que les gens apportent de leur vie dans les films, qu’ils apportent quelque chose d’eux même dans les films. Mais vous avez peut-être raison car j’ai imaginé mes personnages à travers les dabbas, à travers les lunchboxes, c’est de là que tout est parti. Donc peut-être qu’inconsciemment, il y a des métaphores qui relient les personnages et les lunchboxes.
Les personnages sont nimbés de nostalgie. Vouliez-vous associer la nostalgie à la ville de Bombay ?
Je pense avoir amené une forme de nostalgie à Bombay. J’étais loin de l’Inde pendant 12 ou 13 ans et j’étais très nostalgique. Dès que l’on est loin de chez soi, la nostalgie est une maladie qui infecte tout le monde. J’ai apporté cela et la nostalgie a infusé ces personnages. Ils sont nostalgiques d’une époque où ils étaient heureux. Ils sont nostalgiques de l’époque où l’on avait une unique chaîne de télévision et où tout le monde regardait la même émission. Quiconque a grandi comme moi dans les années 80 en Inde soufre d’une forme de nostalgie. Les choses ont changé si rapidement. Et l’on repense à cette époque où il n’y a avait que cette unique chaîne et où tout le monde se retrouvait devant la même émission à 9 heures le soir. Ces temps sont révolus. C’est la même chose partout dans le monde. Il y a un côté romantique à regarder le passé, et mes personnages sont comme ça.
En tant que réalisateur comment travaillez-vous ? Suivez-vous scrupuleusement le scénario ou laissez-vous les acteurs improviser ?
En tant que réalisateur, mon travail est de créer un environnement où les acteurs peuvent travailler en liberté. Et spécialement de grands acteurs comme eux ! Et de faire en sorte que la caméra les filme. Le scénario est une base, une base très importante et sur laquelle tout le monde s’est beaucoup investi. Les acteurs ont été choisis des mois avant le tournage. Tout le monde se voyait fréquemment et on travaillait ensemble sur le scénario. Chacun rentrait dans la peau de son personnage. Tout le procédé est alors d’extérioriser cette intériorisation. Il y a eu beaucoup de réécriture pour que les acteurs s’approprient au plus près le texte.
Irrfan m’a par exemple dit une fois que l’histoire lui faisait penser à son oncle, avec qui il vivait la première fois qu’il est venu à Bombay. Tout ce qu’il m’a dit sur son oncle, je l’ai rajouté au scénario. Nawaz m’a raconté des choses que sa mère lui disait toujours, ce qui m’a donné l’idée de la phrase que dit son personnage sur le proverbe que lui raconte sa mère, comme quoi le mauvais train peut arriver à la bonne gare. C’est quelque chose qu’il a vraiment apprécié. C’était très important que le script soit le plus proche possible de ce que sont les acteurs. Ce sont vraiment des acteurs immenses et ils amènent leur vie avec eux. C’était donc important de saisir ce qu’ils donnaient, car c’est un véritable don à l’histoire et au film.
Une fois sur le plateau, nous improvisions. C’est très important pour l’immédiateté de la chose. Nous parlions beaucoup entre les prises. Nous essayons différentes manières de capter la même chose, la même émotion. Je pense donc que le scénario est à la fois important et qu’en même temps, il n’est pas important.
The Lunchbox semble être né sous une bonne étoile. Le film est une production internationale avec un casting de rêve et a été distribué en Inde par des sociétés prestigieuses telles qu’UTV et Dharma. Comment avez-vous réussi à réunir tous ces éléments pour votre premier film ?
J’espère que les bonnes étoiles existent, pour pouvoir les utiliser. Je pense qu’une chose en amène une autre. Il est impossible de concevoir ce que le parcours d’un film va être au début. Tout ce que l’on peut faire, c’est être honnête à chaque étape. Dès l’écriture du film, d’être sûr que ses personnages ont une vraie profondeur émotionnelle. Les grands acteurs ont un instrument qui leur permettent de faire 2 ou 3 choses en une. Si l’on nous met devant une caméra, on ne sera capable que de jouer une seule chose à la fois, car nous n’avons pas cet instrument. Et leur permettre de l’exercer est très important. Il m’est donc primordial d’écrire des personnages riches, pour que les acteurs aient cette opportunité dans chaque scène. Quand Irrfan a lu le script, Nimrat a lu le script et Nawaz a lu le script, ils ont vu cela. Ils ont rejoint le film et l’on rendu meilleur.
Comme c’était une co-production internationale, je me suis dit que si on réussissait à faire notre travail, ce devait être une histoire qui pouvait voyager. Et pour cela, il faut des gens qui peuvent la faire voyager. Et en même temps, je savais qu’il serait impossible de réunir 100% du budget pour cette histoire en Inde. J’avais un excellent producteur indien qui savait très bien cela et qui voulait également que la production soit internationale. Nous voulions tous la même chose. Nous avons eu la chance d’aller à Rotterdam, de trouver des partenaires français et allemands. Ce sont des gens très bien qui nous ont rejoints et ont pu récolter de l’argent en Allemagne et en France.
C’était un privilège de faire le son en Allemagne car le travail sur le son est très détaillé. La bande-son est vraiment la bande-originale du film. C’est Max Richer qui a composé la musique au piano, et c’est très difficile de rendre le piano aussi subtil. Il travaille sur énormément de films, c’est un grand artiste. C’était une excellente collaboration. Il a passé un mois et demi sur le son designer de ce film. En Inde, on utilise beaucoup de musique de fond, le son designer est moins important. Ici, nous avons voulu le rendre organique au film. Ce film est avait besoin.
La couleur a été réalisée en France. Les couleurs ne sont pas très chaudes. Elles sont maîtrisées et subtiles, presque déshydratées dans beaucoup d’endroit. C’est également quelque chose que je ne voulais pas faire en Inde. Nos films sont très saturés. Ils sont opulents, majestueux, avec des emphases sur les émotions. Et pour ce film, nous avions besoin de cette esthétique. Je pense que ce côté international était vraiment dans l’intérêt du film. Tous les films ne doivent pas être envisagés comme cela, mais c’était la chose à faire pour ce film.
J’ai passé beaucoup de temps à New-York, j’ai vécu aux Etats-Unis pendant 12 ans. Mon monteur, John Lyons, est un vieil ami, que j’ai rencontré au Sundance Lab. Nous voulions travailler ensemble depuis des années et ce fut vraiment une belle collaboration. Les films sont vraiment faits sur la table de montage. Les choix qui y sont fait déterminent vraiment ce que va être le film. C’était une formidable collaborateur pour faire ces choix.
Le directeur de la photo est aussi de New-York, Michael Simmonds. C’était la première fois qu’il venait en Inde. Il voyait donc des choses que je ne voyais pas. Il est venu 2 mois avant le tournage et connaissait bien le scénario. Il est donc allé sur tous les lieux de tournage. C’était un vrai collaborateur. Il voyait des choses que je ne voyais pas car je suis de là.
Ce sont donc divers éléments qui forment un tout et des choix à chaque étape. Si l’on est confiant dans ses personnages, en leur voyage émotionnel, et que chaque décision émerge de cela, on place l’humanité et les personnages au centre. Autrement, c’est uniquement une question de technique, de montrer ce que l’on a appris. Je pense que même les décisions de production pour ce film viennent avant tout des personnages. Et c’est pour cela que tout s’est mis en place aussi merveilleusement. Une fois que le film était prêt, c’était aussi extrêmement plaisant de voir qu’il a été accueilli par le système de Bollywood. Karan Johar a été un formidable ambassadeur pour ce film en Inde. Il est connu pour ses histoires d’amour et connait très bien le public indien. Il a amené le film à un public qui ne serait pas allé le voir autrement. Le film a ensuite eu un très bon bouche à oreille. Ce fut donc une voyage béni, pas seulement faire le film, mais aussi la suite. Il y a tellement de film formidable autour de nous, comme Gravity ou Gloria. Et faire le voyage avec ces films importants a été un vrai privilège, de Cannes à Toronto, en passant par Sarajevo. Je ne sais pas si mon film est important ou pas mais je pense que cette année a vu des films très importants. La bonne étoile, c’est d’avoir fait ce film cette année.
Nous demandons à chaque réalisateur que nous rencontrons de nous parler d’une scène d’un film qui l’a particulièrement touché, fasciné, marqué et de nous la décrire en nous expliquant pourquoi. Pouvez-vous nous parler de ce qui serait votre moment de cinéma ?
Il y en a beaucoup. Je me souviens d’une scène du Goût de la cerise, quand le personnage principal change d’avis et décide de ne plus se suicider.
Cette scène m’a beaucoup touché. Le film entier m’a beaucoup touché.
Il y a aussi une scène des Fraises sauvages, quand le personnage principal, qui est un vieil homme, alors qu’il va recevoir un prix pour sa carrière, est en train de revivre ses regrets. Et sur le chemin, il rencontre ce groupe de jeunes, dont la vie commence à peine, et quand il leur dit adieu et les voit partir, cette scène m’a vraiment bouleversé.
Mais il y a tellement de choses dans la fabrication de l’histoire qu’ils racontent que je pense qu’il est important de ne pas séparer ces scènes du reste de l’œuvre. Je préférerai parler de films plutôt que de scène.
Avez nous un dernier mot pour les lecteurs d’East Asia ?
Un film n’est complet qu’avec un public. Il n’est complet que quand le film les a émus. Donc j’espère que vous allez venir compléter mon film pour moi. J’espère qu’ils vont le voir et vivre un peu avec lui.
Retranscriptions et traductions réalisées par Victor Lopez.
Propos recueillis par Marjolaine Gout le 19/11/2013 à Paris
pour East Asia.
Publié dans Archives réalisateurs
Commentaires fermés sur Ritesh Batra
20 feet from stardom
Du 30 janvier au 4 février 2014
Documentaire réalisé en 2013 par Morgan Neville – USA – 1h29 – VOST
Morgan Neville, réalisateur de « Twenty feet from Stardom » : « Ce film a libéré la parole des choristes »
Elles s’appellent Merry Clayton, Darlene Love, Lisa Fisher, Judith Hill… Des noms qui ne vous disent peut-être rien, mais leurs voix sublimes vous ont forcément touchés. Vous les avez écoutées en boucle, de Sympathy for the devil à Proud Mary ou Thriller. Un jour ou l’autre, elles vous fait danser, tanguer, rêver. Twenty Feet from stardom (ou « à vingt pieds de la célébrité » en VF) est un hommage vibrant à toutes les divas de l’ombre, ces choristes sans lesquelles tant de chansons mythiques auraient aussi peu de relief qu’une vieille pochette de 33 tours. Des Rolling Stones à Joe Cocker, en passant par Stevie Wonder ou Michael Jackson, ces discrètes enchanteresses hantent toute l’histoire de la pop.
Le documentariste américain Morgan Neville les a retrouvées une à une, suivies dans leur travail et dans leur quotidien. Les souvenirs et les vocalises de plusieurs générations de femmes se fondent et se répondent, « choeur » inspiré, passionné, fervent, que rien ne peut étouffer : ni l’étrange et paradoxal statut qui les a presque toutes maintenues à l’orée de la gloire, ni les embûches multiples d’un show-biz souvent exploiteur, cruel et oublieux. Et pour une fois, dans ce film, ce sont les stars, de Sting à Stevie Wonder, Bruce Springsteen ou Mick Jagger, qui, par leurs réflexions et leur témoignage, jouent les « choristes ».
Comme dit Lou Reed dans Walk on the wild side, la chanson qui ouvre le film : « And the coloured girls go (et les filles de couleur font) : Doo, do-doo, do-doo… » Car cette tranche d’histoire de la musique raconte une révolution : l’irruption des chanteuses noires américaines, de leur son et de leurs sources d’inspiration (gospel, negro spiritual) dans les années 1960. Naissance de la soul, bouillonnement artistique des années 1960 et 1970, âge d’or du vinyle… En recueillant toutes ces paroles et toutes ces notes, en collectant de précieuses archives (Ike et Tina Turner accompagnés de leurs « Ikettes », Ray Charles interprétant What ‘d I say), le film devient une grande fresque qui dépasse le champ artistique, où l’on perçoit, en filigrane, les convulsions de l’Amérique de l’époque : la lutte pour les droits civiques, l’évolution de la condition féminine.
Devant la caméra et au micro se succèdent des femmes exceptionnelles, des tempéraments volcaniques ou malicieux, aussi fortes et fascinantes que leurs voix. On se régale, par exemple, des retrouvailles pétillantes d’une Darlene Love avec son groupe « de filles » des sixties, les Blossoms. Peu importent l’âge, les épreuves : elles brûlent toujours du même feu sacré, connaissent toujours cette alchimie merveilleuse qui permet au choeur d’être un peu plus que la somme de toutes les voix. Comme ce film qui, grâce à elles, est un peu plus qu’un simple documentaire musical. — Cécile Mury
Cécile Mury – Télérama
Publié dans Archives films
Commentaires fermés sur 20 feet from stardom
Morgan Neville
Né le 10 octobre 1967 à Los Angeles, California, USA.
Morgan Neville est un producteur, scénariste et réalisateur de documentaire américain né le 10 octobre 1967 à Los Angeles. Après avoir réalisé et produit de nombreux documentaires pour le cinéma et la télévision, il se fait connaître du grand public en 2014 grâce à son film Twenty feet from stardom, un documentaire qui se penche sur le rôle méconnu des choristes des plus grand hits de la musique populaire. Un documentaire nommé aux Oscars 2014 qui se donne donc pour mission de donner un visage à certaines voix les plus célèbres de la planète.
Filmographie
– 2013 : Twenty Feet from Stardom
– 2006 : Shotgun Freeway
Publié dans Archives réalisateurs
Commentaires fermés sur Morgan Neville
Philomena
Réalisé par Stephen Frears
Grande-Bretagne 2013 – 1h38 – VOST
Avec Judi Dench, Steve Coogan, Mare Winningham, Sophie Kennedy-Clark…
Avec Martin Sixsmith, politicien déchu converti au journalisme, Philomena Lee part sur les traces d’un passé traumatique pour retrouver son fils naturel, vendu dans les années 1950 à de riches Américains par des religieuses. Steve Coogan produit, co-écrit et interprète le rôle principal de ce mélodrame d’investigation, mis en scène par Stephen Frears. Inspiré par l’enquête du vrai Martin Sixsmith (The Lost Child of Philomena Lee), le film joue la carte du road movie sinueux et flirte avec une émotion doucereuse, mais évite la simple dénonciation offusquée.
Choc des mondes
L’âge, le milieu social, le niveau d’études, les traditions culturelles, la religion sont autant de points qui séparent Philomena (Judi Dench) et Martin (Steve Coogan). L’Irlandaise pieuse et compatissante bouscule malgré tout le Londonien opportuniste et cynique. Martin n’hésite pas à comparer les sœurs du couvent où Philomena a accouché aux Magdalene Sisters (Peter Mullan, 2001) et s’irrite de la gentillesse et de la crédulité sans bornes de la vieille femme. Au-delà des dialogues piquants, la dynamique du film repose pourtant sur les réactions imprévisibles de Philomena. Si elle s’offusque de la rudesse de Martin avec le petit personnel dans les hôtels et restaurants, elle n’est en rien déstabilisée en découvrant l’homosexualité de son fils. Judi Dench excelle dans l’interprétation d’un être ambivalent, dont la candeur et la fragilité apparentes cachent une force tranquille. Face à elle, Steve Coogan évite le cabotinage pour endosser le rôle ingrat de simple contrepoint. L’équilibre de ce duo parvient à tempérer l’intensité d’un mélodrame où l’émotion évite de justesse de dégouliner.
Aventure intérieure
De facture classique, Philomena fait la part belle aux bons sentiments dans de beaux paysages. On y retrouve la flamboyance des décors ruraux de Tamara Drewe sous le regard de Stephen Frears. Son travail de commande prend l’aspect d’une copie sage au service du scénario de Coogan, où la recherche d’un fils perdu devient vite le prétexte d’un voyage introspectif pour deux âmes perdues. Martin et Philomena sont tous deux les produits d’un conditionnement social et culturel que leur épopée commune tend à briser. Au contact de Martin, Philomena explore certes le vaste monde, mais parvient surtout à se libérer du secret, à dépasser sa culpabilité tenace de mère-fille et à faire le deuil d’un passé tronqué, même si la conclusion de son histoire n’est pas celle qu’elle espérait. De son côté, Martin découvre non seulement la cruauté passée des couvents irlandais et les affres de la condition féminine, mais apprend aussi à considérer ses interlocuteurs au-delà de l’intérêt qu’ils peuvent constituer pour sa carrière vacillante. Et, au fil des séquences, la naïveté change de camp et l’empathie contamine…
Toujours sur la corde raide du sentimentalisme, Philomena parvient pourtant à ne jamais vaciller. Ainsi l’épopée mémorielle s’affirme comme un voyage inéluctable vers l’apaisement. La capacité au pardon de Philomena Lee sauve le film de la mièvrerie, en montrant la résistance insoupçonnée d’un être dont la noblesse de cœur devient une arme. De retour en Irlande, quand Martin s’énerve et s’agite vainement, Philomena, silencieuse, accuse d’un regard triste. La vengeance n’a plus de sens, la messe est dite.
Carole Milleliri – Critikat
Publié dans Archives films
Commentaires fermés sur Philomena
Tel père, tel fils
De Hirokazu Koreed
Japon 2013 – 2h – VOST
Avec Masaharu Fukuyama, Machiko Ono, Lily Franky…
Prix du jury et mention spéciale du jury du prix œcuménique lors du dernier Festival de Cannes, ce film sensible s’interroge avec intelligence sur la force du lien filial.
Une interrogation sur la nature et la force du lien filial.
Voilà un bien beau film qui, lors du dernier Festival de Cannes, offrit un moment de pause au milieu des fureurs de la compétition. Après Nobody Knows, Still Walking, Air Doll, I Wish – Nos vœux secrets, le délicat Hirokazu Kore-Eda revient sur les thèmes du lien filial et de l’enfance, chers à son cœur et si présents dans son œuvre.
Né en 1962, devenu père d’une petite fille il y a quelques années, le réalisateur met en scène un architecte d’une quarantaine d’années, Ryoata, très investi dans son travail et comptant sur son épouse, mère au foyer, pour veiller à la bonne éducation de leur fils unique.
Âgé de 6 ans, leur garçon est inscrit dans une bonne école et participe à des activités d’éveil en compagnie d’autres enfants triés sur le volet. Tout se passe, pourtant, comme s’il ne saisissait pas vraiment la chance qui lui est offerte – ce que le père, battant, met sur le compte du tempérament de sa femme.
La famille bouleversée
Un appel téléphonique de la maternité où l’enfant a vu le jour vient soudain bouleverser les fondements mêmes de la famille. Après des explications très embarrassées, les responsables de l’établissement expliquent aux parents du garçon, en présence d’un autre couple venu de la campagne, qu’un malencontreux échange de bébés à la naissance a conduit chaque famille à élever le fils de l’autre.
Incrédulité. Stupeur. Révolte. Passé le choc de cette annonce, les deux familles, si différentes soient-elles (l’autre père est un petit électricien fantasque et débonnaire), entreprennent tant bien que mal de se rapprocher, dans le but de procéder, après un long temps d’acclimatation, à un nouvel échange.
Une réflexion subtile sur la transmission
À travers cette trame de fait divers, dont il n’abuse pas du point de vue de l’intrigue, Hirokazu Kore-Eda s’interroge sur la nature et la force du lien filial – plus précisément, de paternité. Avec, en guise de pierre d’achoppement, cette vertigineuse question : qu’est-ce qui transforme un homme en père ? Qu’est-ce qui prime, du lien du sang ou du temps passé à nouer une relation affective ? Que transmet-on réellement ? Comment ?
Le cinéaste dit s’être inspiré de faits divers remontant au grand boom des naissances, dans les années 1960, pour bâtir son film, néanmoins ancré dans le Japon d’aujourd’hui. Au-delà du cadre choisi pour le récit, ce qu’il y met de substance est à la fois très personnel et parfaitement universel.
Les images à l’élégance soignée, l’interprétation tout en retenue, les situations abordées en affleurements successifs, la musique de Bach (à travers les Variations Goldberg interprétées par Glenn Gould) forment une œuvre subtile, intelligemment bouleversante, qui multiplie les possibles en se gardant bien d’asséner des réponses.
ARNAUD SCHWARTZ – La Croix
Publié dans Archives films
Commentaires fermés sur Tel père, tel fils
2 automnes, 3 hivers
Comédie réalisé en 2013 par Sébastien Betbeder
Avec Vincent Macaigne , Maud Wyler , Bastien Bouillon …
Date de sortie : 25 décembre 2013
UTOPIA
Il y a quelque chose de sacrément revigorant dans le ton de ce film au charme fou, un petit vent frais de liberté y souffle, décoiffant, stimulant, on en sort les neurones en éveil, le cœur tout en émoi, et un sourire complice aux lèvres. Il y a quelque chose qui se passe dans le cinéma français, dans les marges de l’industrie lourde productrice à la chaîne de films formatés. Il y a des films qui se créent hors système, sur la seule force d’un désir, un cinéma assez amoureux du public pour oser l’entraîner vers l’aventure émoustillante de chemins non balisés, avec l’a-priori vivifiant que le spectateur est ouvert à toutes les découvertes. 2 automnes, 3 hivers n’a pas été fait avec de gros moyens financiers, pourtant c’est une gourmandise et on n’en revient pas de pouvoir encore être étonné, on n’en revient pas que le cinéma, après tant d’années d’existence, puisse encore se renouveler, sans rien renier de ce qui a fait son histoire, à laquelle le film n’hésite pas à faire des petits clins d’œil judicieux, rappelant que les films, comme les musiques, ponctuent nos vies, marquent nos façons d’être et de faire.
Une bonne dose d’humain, un zeste de poésie, un poil de nostalgie, une constante drôlerie, l’actualité qui affleure… En musique on rangerait le film dans la catégorie « fantaisie », ce genre où la subjectivité du compositeur s’exprime en s’affranchissant des contraintes dans un langage néanmoins parfaitement organisé et séduisant, à la fois grave et léger.
Dite à plusieurs voix et souvent face à la caméra – procédé souvent artificiel mais qui ici fonctionne parfaitement –, cette histoire de trentenaires amoureux raconte notre époque, la fragilité des corps, l’incertitude des esprits, la précarité de la vie, la nécessité de rencontrer l’âme sœur… Arman a trente-trois ans et il décide de changer de vie. Pour commencer il court. C’est un bon début. Amélie poursuit la sienne (de vie) et court, elle aussi. La première rencontre est un choc qui les jette l’un contre l’autre, un matin dans un parc…
Durant trois hivers et deux automnes, dans les vies d’Amélie, Arman et Benjamin se succèdent les rencontres, les accidents et beaucoup d’histoires (d’amour mais pas que)…
Télérama
Cinq saisons d’un amour, à Paris, aujourd’hui. Le troisième film de Sébastien Betbeder (après Nuage et Les Nuits avec Théodore) décrit avec minutie les complications de la constitution d’un couple : Arman, 33 ans, et Amélie, six ans de moins, Parisiens plus bohèmes que bourgeois. La minutie de la description, on la doit aux personnages, qui expliquent régulièrement face caméra ce qui leur arrive et ce qu’ils en pensent.
Cette façon de discourir donne à cette petite oeuvre subtile, soyeuse, extraordinairement attachante, sa singularité — presque un film raconté. Mais sans que la parole soit trop littéraire, sans qu’elle altère la puissance émotionnelle de ces amours naissantes. C’est l’auto-exégèse ultra contemporaine, celle que l’on pratique au café ou sur les réseaux sociaux. A ce compte-là, 2 automnes 3 hivers est bien un film d’aujourd’hui, incluant les objets culturels du moment : un film de Judd Apatow, le souvenir de La Salamandre, une expo Munch. Ces héros-là sont nos frères.
Cheveux longs en bataille — mais calvitie naissante —, rasage irrégulier, Arman possède en plus un physique moderne, puisque c’est celui de Vincent Macaigne, l’acteur à la mode du jeune cinéma français : on aime son timbre légèrement voilé, sa capacité d’émerveillement, sa faculté à rendre cocasse le quotidien. Face à lui, la rousse Maud Wyler possède la grâce requise pour être l’héroïne désirée d’une comédie romantique nouveau genre. Elle a le talent d’être changeante, illuminant le monde d’un sourire, s’assombrissant avec lui quand point le doute. Leur naturel, à tous les deux, est époustouflant.
Arman risque sa vie pour secourir Amélie, et la conquérir. Ce qui les entoure a de quoi inquiéter : un ami à l’hosto, un cousin suisse prompt à mourir d’amour, une jeune fille aux mains d’une secte… Le couple est une bouée de sauvetage au milieu d’un maelström de peurs et de solitudes. Sur le destin de ces « hipsters » de la rue Orfila, Paris 20e, animaux des villes qu’un séjour à la montagne, au coeur du film, trouble pour de bon, plane une menace : la fugacité du sentiment amoureux, la fragilité de la vie en général. Comme l’amour qui, rendant hypersensible, provoque tour à tour euphorie et mélancolie, ce film maîtrisé, révélant un auteur à suivre, inscrit l’inquiétude dans la joie, s’avère successivement drôle et poignant. Donc irrésistible.
Aurélien Ferenczi
Publié dans Archives films
Commentaires fermés sur 2 automnes, 3 hivers
A touch of sin
Du 27 février ua 4 mars 2014
De Jia Zhang-Ze – Chine 2013 – 2h09 – VOST
Avec Jiang Wu, Zhao Tao…
Jia Zhang Ke signe un film majuscule sur l’état d’un pays en instance d’implosion.
A première vue, « A touch of Sin » est une œuvre de Jia Zhang Ke comme une autre, le cinéaste ayant radiographié dès ses débuts (« Platform », notamment), les mutations de son pays jusque dans ses territoires les plus reculés. C’est justement là que le film démarre, sur les reliefs accidentés d’une route de montagne. Le cinéaste y lance toutefois deux récits-roquettes : un par motard qui arpente la route, l’un tueur professionnel sillonnant le pays à la recherche de cash (pour nourrir sa famille comme un bon paysan), tandis que l’autre, mineur scandalisé, mute en justicier vengeur après la corruption de trop.
On comprend alors très vite que le temps de la chronique élégiaque cher au cinéaste de « Platform » est bel et bien révolu. « A touch of Sin » est une photographie implacable du marasme social chinois, un film de sabre revu et corrigé à l’aune du capitalisme sauvage, un « Short Cuts » oriental parfumé à la dynamite.
« A touch of sin » frappe d’abord par sa frontalité absolue, reprenant à son compte et sans métaphores alambiquées, les exaspérations et révoltes populaires qui fleurissent un peu partout en Chine. Le film est une pure photographie de l’instant, saisissant la première giclée d’exaspération comme la décadence instituée qui semble la précéder – d’autres personnages emblématiques prennent ensuite le relais des motards sans le moindre effet de raccordement scénaristique de plombier frimeur (Lelouch ou Bacri-Jaoui devraient en prendre de la graine). Ce n’est pas tant une guerre civile traditionnelle clivant une société en deux antipodes structurées que montre ici Jia Zhang Ke, mais une désintégration tout azimut, bien au delà de l’idée de crise, qui aspire au hasard et dans un désordre qui confine à la catastrophe naturelle, tortionnaires et victimes, profiteurs et spoliés, marginaux et fonctionnaires moyens.
A ce propos déjà gonflé, JZK associe la manière : un film-monde d’une ampleur phénoménale qui prend en charge chaque ondulation violente avec une fluidité sidérante et un envoutement poétique éthéré, brassant sans jamais les compacter une flopée de genres cinématographiques. Le film peut se voir comme un vigilente movie de haut vol où chaque crime ou échauffourée est chorégraphié avec un délice d’esthète moraliste (la première partie évoque « A history of violence » de Cronenberg). Qui n’empêche en rien une chronique sensuelle de fleurir en fin de parcours, entre un impayable lupanar de banlieue et une ville-usine. Chef d’œuvre peut être pas, mais grand film, indubitablement. Allez si, chef d’oeuvre.
Guillaume Loison – CinéObs
Publié dans Archives films
Commentaires fermés sur A touch of sin