The Lunchbox

De Ritesh Batra
Inde 2013 – 1h42 – VOST
Avec Irrfan Khan, Nimrat Kaur, Nawazuddin Siddiqui…Une comédie romantique indienne fine et précise comme de la cuisine moléculaire.

Plus fort qu’Alloresto, il y a les dabbawallahs à Mumbai, ces livreurs distribuant, qu’il vente ou qu’il pleuve, les paniers-repas des employés de bureau, de leur domicile à leur lieu de travail – le fooding, là-bas, c’est encore la bouffe maison.

Lorsque ce système huilé, très Brazil, se grippe, c’est un prétexte pour cette jolie comédie romantique indienne. Ila, jeune épouse au foyer, expédie par erreur à Saajan, veuf ronchon en fin de carrière, les petits plats qu’elle mitonne pour son indifférent de mari. Commence une relation épistolaire et plus si affinités.

Que l’on soit fan de The Shop around the Corner (Ernst Lubitsch) ou de Love Actually (Richard Curtis), la rom-com use des mêmes ingrédients : le hasard, l’attraction des contraires et le bouquet final où les promis se retrouvent…

The Lunchbox n’est pas le buffet bollywoodien attendu, hypersucré, qui resterait sur le ventre. Le film tient aussi de la cuisine moléculaire, puisque Ritesh Batra formule une alchimie entre des personnages (pratiquement) jamais présents ensemble à l’écran. L’amour comme gaz et non comme cristallisation. Le hors-champ est tantôt comique (le running gag de la voisine invisible qui prodigue conseils de cuisine et d’amour à Ila), tantôt tragique (le suicide d’une mère), surtout romantique. De quoi lier ce couple incongru par la parole, qui se répond en voix off par des lettres truffées
de confidences – elle veut s’émanciper, lui croit être passé à côté de sa vie.

The Lunchbox tisse des liens forts sans internet, ni portable, uniquement via le montage et les mines incertaines de ses protagonistes. Sans négliger leur espace. C’est Saajan à son bureau, cadré comme dans une tour d’ivoire parmi ses collègues ; c’est l’arrière-plan documentaire, palpable par touches, des rues grouillantes de Mumbai aux distinctions sociales et religieuses.

La débutante Nimrat Kaur et le vétéran Irrfan Khan sont très craquants, oscillant entre déprime taiseuse et lueurs d’espoir dans le regard. A l’image d’une société indienne à la fois traditionnelle et dynamique, le film mélange vieilles ficelles romanesques et distance pas dupe dans sa façon de jouer avec le happy end inhérent au genre.

Nouveaux départs, transmission, transitions, filiation : tout le monde va mieux, mais pas forcément selon le plan initial. La conclusion est nuancée mais demeure assez feel good sans qu’on se sente floué. Pour en finir avec les inévitables comparaisons culinaires, The Lunchbox pratique un slow food varié en saveurs et textures, aérien mais bien enraciné dans son terroir. Un premier film réussi. On reviendra chez Ritesh Batra.

Les Inrockuptibles

A lire un intéressant article sur la Dabbawallah

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