Archives pour mars 2016

Mikhaël Hers

Mikhael-HersNé le 6 février 1975  Paris

France

Réalisateur, scénariste

Memory Lane, Ce Sentiment de l’Eté

 Entretien avec Mikhaël Hers 

Trois villes différentes lors de trois étés successifs… Comment est venu le désir de structure de Ce sentiment de l’été ?

Comme dans mes films précédents, je suis parti des lieux pour écrire. Berlin, Paris et New-York sont trois villes qui me sont chères, avec lesquelles j’entretiens un rapport affectif très fort. J’avais envie de les filmer. Repasser par un endroit, y repenser, suscite souvent l’impulsion première… Et filmer est toujours l’occasion de réinvestir un lieu que j’ai aimé, comme pour y prolonger une époque et ne pas la quitter définitivement. Je pense que l’on peut aussi faire du cinéma ou écrire pour lutter contre le passage du temps, créer un semblant d’éternité, avec tout ce que cela peut avoir d’illusoire. C’est en partie également grâce au tournage, où l’on filme des gens qui sont là, bien vivants, où l’on rattrape quelque chose de la fugacité des choses et des sentiments qui se sont évaporés. (suite…)

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Anomalisa et le « stop motion »

Avare de commentaires sur son oeuvre, préférant laisser les spectateurs se faire une opinion, Charlie Kaufman veut bien reconnaître dans un demi-sourire qu’ANOMALISA, dans son incarnation animée, “dure environ une heure et demie”. Après une campagne kickstarter fructueuse, Charlie Kaufman, Duke Johnson et Rosa Tran mirent sur pied une équipe de spécialistes de la stop motion capable de mettre en images (par images) les tribulations de Michael Stone et Lisa Hesselman, et leur aventure dans les couloirs de l’hôtel Fregoli. Le scénario du film reste globalement inchangé par rapport à celui de la pièce. “Les personnages sont les mêmes, les acteurs sont les mêmes, le script est identique, quasiment à la virgule près”, dit Charlie Kaufman. “Le script m’a toujours semblé être taillé pour l’animation”, rajoute Duke Johnson. “Il se prête naturellement au médium”. (suite…)

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Charlie Kaufman

kaufman__120521232814Né le 19 novembre 1958, New York

USA

Scénariste, réalisateur

Dans la Peau de John Malkovitch, Eternal Sunshine of the Spotless Mind (scénariste)

Synecdoche New York, Anomalisa (réalisateur)

A l’origine, il y a une pièce de théâtre montée en 2005 par le génialement éclaté Charlie Kaufman et, surprise, déjà interprétée sur scène par Jenny et David (feat. Tom Noonan). Par bonheur, les futurs producteurs Keith et Jess Calder étaient dans le public le soir de sa représentation à Los Angeles. Coup de foudre immédiat. Duke Johnson, connu pour avoir travaillé sur les programmes de la chaîne Adult Swim, a alors eu pour dessein de transformer avec Kaufman cette pièce de théâtre en un foudroyant film d’animation (suite…)

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Peur de Rien

Conversation entre Annie Ernaux et Danielle Arbid

Annie Ernaux : Je viens de découvrir Peur De Rien en projection et j’ai été très touchée. Je suis en train d’écrire un nouveau roman sur une période de vie similaire, les 17 ans d’une jeune femme. En ce qui me concerne c’est purement autobiographique et j’imagine qu’il y a beaucoup de vous dans Lina, le personnage principal…

Danielle Arbid : Merci. Peur De Rien est un titre qui résume parfaitement le portrait que je voulais faire de Lina. Mais pour la part d’intime dans ce film, c’est plutôt le fantasme du souvenir qui m’inspire. Peut-être que la réalité de ce que j’ai vécu était plus dure ou plus douce, peu importe. Je préfère laisser œuvrer le temps. L’écriture est un moyen de composer avec le vécu et le cinéma parachève doublement ce processus : avec le scénario, le choix des comédiens puis à travers le regard que vous portez sur eux, le montage… Donc, non, ce n’est pas autobiographique. Ce que je voulais dire à travers ce film c’est « la somme de ce qu’on devient » grâce aux gens rencontrés.

Annie Ernaux : C’est en cela que l’écriture autobiographique est très différente de la vôtre… (suite…)

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CE SENTIMENT DE L’ÉTÉ

Ce sentiment de l'été 1De Mikaël HERS – France – 2016 – 1H46
Avec Anders Danielsen Lie, Judith Chemla, Marie Rivière…
Un jour d’été à Berlin, Sasha s’est levée du lit, qu’elle partage avec Lawrence, s’est habillée, a traversé le parc qui la sépare de son atelier, a travaillé quelques heures ; est ressortie, il faisait encore jour et, dans le parc s’est effondrée. C’en était fini pour elle. Ce « sentiment de l’été » c’est en premier lieu celui de l’absence, l’absence creusée par la mort subite de cette jeune femme, le film va suivre ensuite l’onde de choc de cette disparition sur son entourage, en particulier son compagnon Lawrence, et sa sœur Zoé, au cours de trois étés successifs et dans trois villes différentes : Berlin, Paris et New York. : belle déambulation autour du deuil, prise comme métaphore de la vie…

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NAHID

Peur de rien 2De Ida Panahandeh – 2015 – Iran – 1h45 – VOST
Avec Sareh Bayat , Pejman Bazeghi , Navid Mohammadzadeh…
En Iran, le couple et la loi : un canevas complexe qu’explore un film inventif. Nahid, jeune divorcée désargentée, vit seule avec son fils de 10 ans dans une petite ville au bord de la mer Caspienne. Selon la tradition iranienne, la garde de l’enfant revient au père mais ce dernier, immature, toxicomane et instable, a accepté de la céder à son ex-femme à condition qu’elle ne se remarie pas… Mais que faire quand elle tombe amoureuse d’un type bien qui veut vivre avec elle ? Le film révèle une surprise, contenue dans le code de la loi, qui va se révéler aussi pratique que tragique pour le nouveau couple. A pas feutrés, la cinéaste, dont c’est le premier film, monte un piège incroyable avec une mise en scène qui joue avec les points de vue. C’est subtil et intense.

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ANOMALISA

anomalisa 3De Charlie Kaufman et Duke Johnson – Etats-Unis – 2016 – 1h30 – VOST
Avec les voix de David Themlis, Jennifer Jason Leigh, Tom Noonan…
Comment rendre compte du rêve américain des chefs des grandes entreprises privées et publiques : celui de façonner un homme standard, interchangeable, uniforme, solitaire et disponible pour appliquer les procédures dans la guerre économique ? Les réalisateurs ont choisi l’animation pour décrire cet homme avec humour sardonique, crudités et idées noires. Voici le col blanc désillusionné, tourmenté par le sexe, cerné par le dégoût du monde et de lui-même. Et derrière les attitudes de pure convention, l’onirisme cauchemardesque révèle les abîmes qui guettent les personnages.

Critique

Pour décrire l’homme-pantin aux normes managériales des grandes entreprises de la société néo-libérale, le choix de la technique de l’animation image par image s’avère éloquent.
Voici un homme qui paraît subir sa vie comme si elle lui était entièrement dictée. Pris dans des schémas rigides de réussite sociale et familiale, il ne se porte pas bien du tout. Il vit dans un monde uniformisé réglé par des procédures toutes faites. En déplacement professionnel, le voici dans un avion, puis dans un hôtel chic mais standard et sans âme. Il doit prêcher la bonne parole capitaliste à des commerciaux dans un congrès. Mais le cœur n’y est pas.
À la veille de la conférence, il se sent très seul dans sa chambre. Après un coup de file sans plaisir à la famille, il retrouve, au bar de l’hôtel une femme probablement séduite et abandonnée cinq ans plus tôt. C’est la cata.
Puis il rencontre deux modestes télé-vendeuses venues de loin pour assister à son intervention. Mû par une banale attirance sexuelle, il conduit l’une d’elles dans sa chambre. Alors, la capacité inattendue de cette femme à vivre et partager l’instant présent, vient infléchir le nihilisme ambiant. Le voilà embarqué dans une aventure entre coup de foudre et cauchemar.

C’est un univers où se croiseraient Michel Houellebecq et David Lynch. Le col blanc désillusionné, tourmenté par le sexe, est cerné par le dégoût du monde et de lui-même. Et puis des décrochages oniriques, absurdes, révèlent les abîmes qui guettent les personnages, derrière les attitudes et les mots de pure convention.

Charlie Kaufman écrivit d’abord cette histoire pour le théâtre. Il est célèbre pour ses scénarios dont celui d’Eternal Sunshine of the spotless mind de Michel Gondry. Avec Duke Johnson, responsable de l’animation, il trouve la forme idéale pour sa crudité, ses idées noires et son humour sardonique. Cette superbe anomalie, drôle et féroce, a reçu de nombreux éloges de la critique et a aussi obtenu l’Oscar du meilleur film d’animation.
Texte librement inspiré de la critique de Louis Guichard, Télérama.

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PEUR DE RIEN

Peur de rien 1De Danielle Arbid – France – 2h00
Avec Mana Issa, Vincent Lacoste, Paul Hami, Dominique Blanc…
Lina, jeune Libanaise de 17 ans, belle à ravir mais qui semble l’ignorer, vient étudier en France au début des années 1990. Elle vit chez sa tante et son oncle, lequel tente un soir d’abuser d’elle. Elle quitte leur maison de banlieue, quasiment sans argent. Elle trouve refuge chez une amie de l’université, décroche un emploi et en discothèque, rencontre Jean-Marc, riche homme d’affaires dont elle devient la maîtresse. Ainsi commence l’éducation sentimentale de la jeune fille, qui doit se battre pour avoir un toit au dessus de la tête et obtenir sa carte de séjour… Le film bénéficie d’une distribution enthousiasmante et sonne comme l’hommage d’une immigrée à la France . Beau geste, surtout en ces temps troublés.

 

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Steve Jobs

Steve Jobs 1De Danny Boyle – 2015 – USA – 2h – VOST
Avec Michael Fassbender, Kate Winslet, Seth Rogen, Jeff Daniels…
Boyle-Sorkin-Fassbender : trio magique pour un biopic hors normes. Le génial scénariste Aaron Sorkin fait de Steve Jobs (le fondateur d’Apple décédé en 2011) un de ces monstres fascinants et terribles comme le cinéma les aime. Sorkin surprend Steve Jobs à trois moments clés de sa carrière, dans trois lieux symboliques de San Francisco : en 1984, au Flint Center, il y lance son Macintosh. En 1988, il y présente son NeXT, qui ne connaîtra pas un grand succès. En 1998, au Davies Symphony Hall, il devient une légende en créant l’iMac. Sorkin trouve ici une idée, à la fois géniale et gonflée, pour raconter cet homme nombreux qu’était Jobs et dépeindre le boss visionnaire comme l’homme tyrannique. Un tourbillon de mots, de gestes et de sentiments qui tiennent en haleine de la première à l’ultime image. Le rythme et la tension sont aussi donnés par la mise en scène sobre de Danny Boyle. Enfin, Michael Fassbender livre une prestation renversante dans le rôle de Jobs et en restitue l’essentiel : l’aura, l’intelligence, la violence, l’incapacité à nouer des rapports humains simples. Un film virtuose.

En 1984, dans les coulisses du lancement de l’ordinateur Macintosh. Steve Jobs (Michael Fassbender) se prépare avant de présenter sa nouvelle création au public. La tension est palpable d’autant qu’une ancienne relation (Chrisann Brennan) vient le voir, accompagnée de sa fille Lisa. Elle lui réclame de l’argent pour élever convenablement leur enfant. Jobs refuse cette paternité. De son côté, Steve Wozniak (Seth Rogen), un ingénieur informatique, réclame un peu plus de considération pour les personnes qui ont participé au succès de l’entreprise APPLE. Jobs se dérobe à nouveau. On le retrouve quelques années plus tard pour le lancement de NeXT Computeur et surtout de l’iMac qui fera de lui le grand manitou de la compagnie – des moments « révolutionnaires » qui ont ponctué nos trente dernières années.

CRITIQUE DE TELERAMA LORS DE LA SORTIE EN SALLE DU 03/02/2016

Ce n’est pas une biographie hollywoodienne de plus, ce qui évite au film de verser dans l’hagiographie et l’académisme. Le génial scénariste Aaron Sorkin (il avait écrit The Social Network pour ­David Fincher) fait de Steve Jobs (le fondateur d’Apple, pour faire court, décédé le 5 octobre 2011) un de ces monstres fascinants et terribles comme le cinéma les aime, du Kane d’Orson Welles au There will be blood de Paul Thomas Anderson. Aaron Sorkin (un des plus grands scénaristes et dialoguistes américains) véritable concepteur du film (Danny Boyle , le réalisateur, n’est qu’un exécutant discret et doué – pour mémoire le réalisateur du film Slumdog Millionaire récompensé par 8 Oscars), surprend Steve Jobs à trois moments clés de sa carrière, dans trois lieux symboliques de San Francisco : en 1984 au Flint Center, il y lance son Macintosh. En 1988 il y présente son NeXT qui ne connaîtra pas un grand succès. En 1998 enfin, dans une salle de concert futuriste, le Davies Symphony Hall, il devient une légende en créant l’iMac.
On dirait presque une pièce en trois actes. Mais du théâtre jamais théâtral. Tout bouge tout le temps : de la scène où Steve Jobs, épouvantable pinailleur, enquiquine tous ses collaborateurs, on file vers les coulisses où, protégé par une assistante fidèle, Joanna Hoffman, excédée et indestructible (Kate Winslet, magnifique), il affronte — ou plutôt il efface — tous les êtres qui pourraient lui inspirer un quelconque sentiment, une impardonnable faiblesse à ses yeux. En 1984, il rejette une femme, flanquée d’une gamine prénommée Lisa dont il refuse d’être le père. En 1998, un ex-collaborateur, Steve Wozniak, lui demande de rendre hommage aux ­techniciens de son ancienne boîte. Un superbe duel verbal oppose alors Jobs, muré dans son orgueil, et Wozniak, dans son altruisme. « Tu sais qu’on peut être génial et généreux », lance-t-il à son ex-pote, qui connaît parfaitement le sens du premier adjectif, mais sûrement pas du second. Exaspéré, Wozniak finit par lâcher : « Tes projets valent mieux que toi, frérot ! », ce qui lui vaut cette réplique révélatrice : « Mais c’est le but, frérot ! ».
Même si Danny Boyle et Aaron Sorkin ne résistent pas, au dernier moment, à humaniser le personnage (Lisa, la fille rejetée, finit par regarder son bril­lant papa avec les yeux de l’amour), Steve Jobs reste jusqu’au bout un maléfique. Un égotiste. Un autolâtre effréné. Traumatisé à vie d’avoir été abandonné à sa naissance, sans doute, ce que le film évoque en passant, sans sombrer dans une psychanalyse de bazar. La grande idée, c’est d’avoir choisi Michael Fassbender pour incarner Steve Jobs. Impérial, magnétique et envoûtant, il est habité par un rôle qui est sans conteste son plus grand. Ses grands sourires francs, son charisme, son côté sexy-sympa contribuent à faire ressortir la dualité du personnage, provoquant à la fois chez ceux qu’il ne cesse d’abaisser et de blesser une haine tenace et un dévouement indéfectible. Peut-on être simultanément un mec odieux et talentueux ? Oui. Et le trio Sorkin-Boyle-Fassbender nous le prouve. Pierre Murat

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Ida Panahandeh

ida

Née en 1980 à Téhéran

Iran

Réalisatrice

Nahid

 

 

 

 Les questions sociales

Nahid est une femme amoureuse pour la première fois, qui goûte à la joie que lui procure cet amour réciproque. Mais, confrontée à sa réalité et aux lois qui régissent la société, cette joie se transforme en souffrance. Dans les sociétés traditionnelles, une femme est valorisée en tant que mère, sa vie de femme en tant que telle est secondaire. En Iran, si une femme divorcée ayant la garde de son enfant se remarie, elle perd son droit de garde au profit du père de l’enfant. Donc, si elle souhaite avoir une relation légale sans courir ce risque, elle peut avoir recours au mariage temporaire, le « sighe ». Bien que le « sighe » soit inscrit dans la loi de l’islam chiite, les Iraniens portent presque unanimement un regard très négatif sur les femmes qui y recourent. C’est une pratique taboue, considérée comme un instrument d’exploitation des femmes. Cette loi permet en effet à un homme de contracter sans limites des mariages temporaires d’une durée d’une heure à plusieurs années. (suite…)

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