L’Innocence

L’INNOCENCE

Japon  2023  2H06  VOST

De Hirokazu Kore-eda

Avec Soya Kurokawa, Hinata Hiiragi, Sakura Ando, Eita Nagayama

Musique de Ryuichi Sakamoto (son ultime composition pour le cinéma)

PRIX DU SCENARIO  Festival de Cannes 2023

QUEER PALM du Festival de Cannes 2023

Ce nouveau film de Hirokazu Kore-eda (Palme d’Or en 2018 avec Une affaire de famille ) est une oeuvre en 3 temps.

C’est d’abord, dans une première partie, un récit quasi policier fondé sur une supposée histoire de harcèlement scolaire. Le jeune Minato, âgé d’une dizaine d’années,  adopte un comportement de plus en plus étrange, ce qui inquiète sa mère (veuve et qui l’élève seule) qui le croit victime de harcèlement de la part d’un professeur et se rend dans son école. On y découvre un personnel étrange, et l’on est persuadé d’assister à un film qui dénonce l’indifférence de l’institution et la souffrance des écoliers.

La deuxième partie de l’intrigue donne le point de vue de l’enseignant accusé qui, lui, soupçonne Minato d’être le bourreau du frêle Eri.

La troisième partie , à hauteur d’enfant donc,  contient le coeur du film, reprend les mêmes scènes mais vues par Minato lui-même, et nous donne peu à peu les pièces manquantes du puzzle jusqu’à une vérité déstabilisante pour le spectateur….

Les chemins de traverse qu’emprunte le cinéaste pour révéler la clé du « mystère » semblent dans un premier temps exagérément tortueux, les ruses du script un peu trop alambiquées, au point de donner l’impression d’empêcher l’ensemble de respirer. Mais une fois que les pièces s’assemblent, dans le troisième acte, L’Innocence finit par foudroyer. 

Kore-eda bouleverse en dépeignant la fugue des deux enfants dans la forêt qui jouxte la ville, leurs journées à la Huckleberry Finn passées dans un bus scolaire abandonné aux airs de cabane magique. Loin du monde, des autres, de ce « monstre » qu’est la société et qui condamne aux jugements hâtifs et aux demi-vérités. Comme toujours chez le cinéaste, la délicatesse du trait n’interdit pas, loin de là, une âpreté et une amertume dans le constat sociétal. 

A la fin, après une ode déchirante au pouvoir de la musique dans une salle de classe, et au son du piano de Ryuichi Sakamoto (la dernière œuvre pour le ciné du génial musicien, mort en mars dernier), la pluie cesse, le sens de la fable se révèle, le film lui-même semble se libérer du corset scénaristique dans lequel on le croyait engoncé, et le cinéma de Kore-eda triomphe, encore une fois

D’après Première, les Inrocks, et Culturellement votre.

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