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Fin de siècle

2019 Argentine 

Réalisé par Lucio Castro 

1h24 

avec Juan Barberini, Ramon Pujol, Mía Maestro

Jacques Morice de Telerama :

Un bel Argentin de New York arrive seul à Barcelone, pour quelques jours de vacances. Il flâne, observe le monde alentour et fait la rencontre d’un Espagnol qui vit à Berlin. Chacun a un compagnon par ailleurs. Ils passent une nuit torride ­ensemble. L’alchimie est parfaite, mais ils se quittent le lendemain. Ellipse : on les retrouve une vingtaine d’années auparavant. Ils sont les mêmes et un peu différents. Ils font connaissance. Est-ce un rêve, un souvenir ?

Lucio Castro réalise là un premier film lumineux, faussement simple, qui joue de manière audacieuse avec trois temporalités. Cru dans les scènes de sexe et délicat dans ses dialogues, le film est une captivante divagation. Où les personnages se confient des choses intimes souvent profondes sur le désir, la peur du sida, l’érosion ou la consolidation du couple, la paternité. On dirait parfois du Hong Sang-soo gay.

Jeremy Piette de Libération :

On a craint une millième romance tarte à la crème avec son lot d’abdos au sommet. On n’avait pas tout à fait tort, ni tout à fait raison. Fin de siècle, du cinéaste Lucio Castro, prix du jury du festival Chéries-Chéris l’an dernier, raconte l’histoire du bel Ocho, un Argentin vivant à New York qui s’offre quelques jours de vacances à Barcelone. Là, il croise le chemin de Javi, Berlinois d’origine barcelonaise de passage dans sa famille. Tous deux se font la cour, parlent, puis font l’amour, puis parlent encore, de leur rapport au couple (Ocho vient de mettre sur pause une relation de vingt ans afin de lutter contre le train-train quotidien), comme de l’homoparentalité (Javi est père).

Regards

On se demande combien de temps ça va se sourire comme ça, se toucher, montrer de la fesse, car Fin de siècle possède un peu les atours aseptisés des films queer aux implacables modèles irradiants sertis de regards ténébreux, qui vont laisser affleurer à la surface de leurs paroles ce qu’il faut de joie, de tolérance et d’ouverture d’esprit vapeurs green tea. Si, pour la diversité des corps, on repassera (ou on ira chez Alain Guiraudie, au choix), on reste en tout cas pour le basculement, de la narration et des attentes, car Ocho se souvient d’avoir déjà rencontré Javi. On passe alors dans un autre temps, il y a vingt ans exactement, où les deux personnages ne semblaient d’ailleurs pas vraiment plus jeunes et batifolaient déjà. Puis un autre temps encore où ce sont eux, finalement, le couple avec enfant. C’est assez déboussolant, comme des espèces de voyages spatio-temporels délicats, où les deux hommes unis par un fil invisible en viennent à se voir, et s’appréhender, sous plusieurs angles.

Lieu pivot

Souvent ça part d’un étourdissement d’Ocho sur son balcon, qui ne sait plus dans quelle vie il se trouve, tandis qu’il bascule déjà vers la suivante, et de ce lieu pivot le film joue de recommencements perpétuels où les cartes comme les terminologies de l’amour sont continuellement rebattues. C’est là, la force de Fin de siècle, sa capacité à nous emmener avec un seul et magnifique couple à travers diverses histoires, où la sexualité et le rapport à l’autre sont constamment menacés par le temps qui passe, ou exacerbés via l’éphémérité. Si bien que jamais Ocho et Javi ne se quittent vraiment, ils touchent à un peu d’éternité, et c’est assez grisant.

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Never, Rarely, Sometimes, Always

NEVER  RARELY  SOMETIMES  ALWAYS                              

Un film d’Eliza HITTMAN

Etats-Unis, Grande-Bretagne – 1h35

Avec Sidney Flanigan, Talia Ryder, Théodore Pellerin…

L’américaine Eliza Hittman a déjà réussi à réaliser des films à première vue très archétypaux,mais par la finesse de son écriture et la sensibilité de sa mise en scène,elle donne le sentiments de regarder ces sujets-là pour la première fois.

C’est à nouveau le cas ici avec Never Rarely Sometimes Always.

Elle décrit le poids terrible que l’on fait peser sur les épaules non seulement des femmes mais des jeunes filles. Son sujet central est fort,et la réalisatrice confie que les embuches à l’avortement outre-atlantique sont devenues encore plus grandes entre les prémices du projet et son exécution. Lorsque la cinéaste s’attarde sur le voyage qu’effectue Autumn et sa cousine Skylar, c’est parce qu’il est réellement question d’un périple, d’une mini-odyssée pour que cette jeune femme puisse, aux Etats-Unis, avorter dans de bonnes conditions.

On traverse un décor rural jusqu’à la mégapole,et aussi un décor émotionnel.La caméra d’Hittman, via son excellente directrice de la photographie Hélène Louvart, est une caméra de proximité.

Celle-ci colle au plus près de ses personnages et de leurs émotions ;chez Hittman, les sentiments sont autant traduits par l’écriture et l’interprétation que par la caméra .New York n’est qu’ un magma lumineux tandis que la caméra reste proche de ses héroïnes . Cette fuite se fait en secret et dans le silence qui va avec. De même, la complicité entre Autumn et Skylar se passe de dialogues explicatifs – cette intimité, cette sonorité là n’ont pas besoin d’être articulées.

La caméra a le sens inouï du détail,comme lorsque lors d’une échographie on promet à Autumn d’entendre le son le plus magique,celui de son futur bébé,et que la jeune femme détourne le regard.

L’avortement est une dure vérité comme l’indique le titre d’une vidéo sensationnaliste anti-IVG qu’on lui diffuse.Mais la dure vérité qu’Hittman film est tout autre.Lors d’une scène centrale qui fait basculer le long métrage,Autumn se rend dans un centre où elle doit répondre à un QCM dont les réponses donnent son titre au film (jamais,rarement,souvent,toujours).La séquence est d’abord froide et procédurale,mais quelque chose se fissure : ce moment de cinéma est aussi tétanisant qu’émouvant.Voilà une remarquable richesse émotionnelle chez une cinéaste qui parvient à nous faire partager l’expérience de la solitude en même temps que l’expérience de la chaleur humaine : un mélange rare et extrêmement précieux.

Un film aussi poignant qu’utile à quelque mois de la présidentielle, qui résonne comme la nécessité pour tout un pays riche de se poser les questions de la place qu’il veut faire aux femmes, aux enfants et à ses classes moyennes.

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Josep

JOSEP
Film « dessiné »de Aurel, avec les voix de Sergi López, Gérard Hernandez, Bruno Solo.
Le récit de l’amitié entre un gendarme français et l’artiste Josep Bartoli, qui a fui l’Espagne franquiste. Et l’expressivité bouleversante du dessin d’Aurel. 

Un adolescent plutôt doué en dessin râle et soupire à l’idée de garder, tout un après-midi, son grand-père malade et alité dans un vieil appartement plein de souvenirs. Mais, entre deux somnolences, « grand-père Serge » se met à raconter à son petit-fils une histoire folle, pleine de rebondissements. Celle de sa rencontre, à la fois douloureuse et lumineuse, avec un dessinateur, dans un contexte qui, quatre-vingts ans plus tard, continue à lui faire honte. Février 1939 : Barcelone est tombée, Franco a gagné, et cinq cent mille réfugiés fuient la dictature dans le dénuement le plus complet pour trouver refuge dans une France qui les juge indésirables. Bon nombre de ces républicains espagnols, anarchistes ou communistes, sont parqués par le gouvernement français dans des camps de concentration, en proie à la faim, la maladie, la xénophobie et la violence galonnée. Dans un de ces camps, Serge, jeune gendarme, se lie d’amitié, au-delà des barbelés, avec Josep Bartoli (1910-1995), combattant antifranquiste et dessinateur.

Josep n’est pas un film d’animation, mais un grand film dessiné. Pour son premier long métrage, Aurel, lui-même dessinateur pour Le Monde et Le Canard enchaîné, célèbre la force, incoercible, du dessin politique — et dédie d’ailleursJosep à Tignous, assassiné lors de l’attentat de Charlie Hebdo. Aidé de son scénariste Jean-Louis Milesi (compagnon de route de Robert Guédiguian), Aurel fait revivre une période occultée de l’Histoire (la Retirada) et rend hommage à Bartoli, grand peintre travaillant sur la mémoire. Le résultat ne cesse d’étonner et de bouleverser, grâce à sa narration puissante et à son esthétique composite. Le récit du gendarme Serge et de ses efforts pour aider son ami et ne plus collaborer à cet enfer fusionne ainsi avec les traits sombres, rageurs et virtuoses, de Josep, témoignant, jour et nuit, sur papier, du quotidien du camp. Le talent de caricaturiste d’Aurel s’impose, dans la trogne de porc d’un ignoble gardien ou la douceur d’un tirailleur sénégalais philosophe qui obéit aux ordres en attendant l’heure de la vengeance. Soudain, au noir tragique des corps décharnés des prisonniers succèdent le pastel, l’orange flamboyant et le bleu maya d’un ciel où Frida Kahlo, future maîtresse de Bartoli, fait figure d’apparition pleine de vitalité.

Car le film vibre aussi du feu, quasi sensuel, de la résistance, comme lors de ces séquences de réunions clandestines, où les hommes et les femmes du camp chantent, dansent, et inventent un jeu de loterie pour trouver un partenaire d’un soir. Josep, lui, se contente de caresser le portrait qu’il a fait de son aimée, perdue pendant l’exode. Et voilà la belle de papier qui ferme les yeux sous sa caresse… « Et alors ? », demande sans cesse le petit-fils de Serge, happé par cette histoire où un homme apprend le courage pour en sauver un autre. Alors, l’humanisme est une aventure inoubliable, qui mène, par exemple, jusqu’au Mexique. De ce Josep recommandé à tous les publics, beaucoup d’images resteront gravées, mais on en retient une en particulier : deux amis à la vie à la mort repeignant, en compagnie de Frida Kahlo, la façade d’une hacienda avec des couleurs éclatantes. Insolentes comme l’espoir. (Critique de Guillemette Odicino, Télérama).

Le film fait partie de la Sélection Officielle Cannes 2020.

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Christian Petzold (Ondine)

Photo Christian PetzoldAprès avoir fait son service civil dans un ciné-club de Rhénanie, il finit ses études (lettres et théâtre) à Berlin. Diplômé de l’Académie de cinéma et de télévision de Berlin, il devient ensuite assistant à la réalisation.De 1987 à 1993, il réalise courts métrages, téléfilms et documentaires pour la ZDF et Arte. Il réalise son premier long-métrage en 2000: Contrôle D’Identité (Die Innere Sicherheit) dont il signe également le scénario. Ce film fait de Christian Petzold l’un des chefs de file de la « nouvelle nouvelle vague » du cinéma allemand (et notamment de ce qu’on a appelé l' »école de Berlin ») et lui permet d’être, par la suite, fréquemment, sélectionné en compétition au Festival de Berlin.

Fantômes (Gespenter), Yella, Barbara, Phoenix, Transit, Ondine

Entretien croisé entre le réalisateur d’« Ondine » et son interprète, Paula Beer, à propos de cette figure de l’absolu amoureux.

Pour son neuvième long-métrage, Christian Petzold remonte à la source des mythes et contes germaniques pour raconter, dans le Berlin d’aujourd’hui, un amour étrange et comme hors du temps. Ondine s’identifie tellement au visage mystérieux et au regard océan de sa jeune interprète, Paula Beer, nouvelle venue dans le cinéma de Petzold, qu’il semblait plus judicieux de rencontrer ensemble comédienne et réalisateur.

Qu’est-ce qui vous a amené à redécouvrir le mythe d’Ondine et à en faire un film ? (suite…)

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Quanan Wang (La Femmes des Steppes, le Flic et l’Oeuf )

Né le 26 octobre 1965 à Ya’nan

Chine

Réalisateur, scénariste, producteur, monteur

Le Mariage de Tuya, La Femme des Steppes le Flic et l’Oeuf.

ENTRETIEN AVEC WANG QUAN’AN

par Pascal Mérigeau pour le Gncr

Le titre original de LA FEMME DES STEPPES, LE FLIC ET L’OEUF est « ÖNDÖG ». Que veut dire ce titre ?
Le sens du film est contenu dans le titre, Öndög, qui en langue mongole signifie « l’œuf ». Pas seulement les œufs de dinosaure dont il est question dans cette histoire, tous les œufs, donc la conception, la vie. Il y a beaucoup d’œufs de dinosaure en Mongolie, qui se vendent très bien à l’étranger et sont donc très convoités. Mais dans le film ce n’est pas un vrai œuf de dinosaure !

(suite…)

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Wang Xiaoshuai ( Ghongqing Blues )

Né le 22 mai 1966 à Shanghaï

Chine

Réalisateur

So Close to Paradise, Beijing Bicycle, Shanghaï, Une Famille Chinoise (Ours d’argent 2008), So Long my Son, Chongqing Blues (2010).

Entretien avec Wang Xiaoshuai : Une carrière chinoise

Nous évoquons avec lui sa carrière et son regard sur le monde qui au rythme des bouleversement de la société chinoise. Des milieux étudiants en Art des années 80 à l’aliénation des villes en passant par la révolution culturelle, le cinéaste a radiographié les différentes Chine. (suite…)

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Frédéric Farrucci ( La Nuit Venue )

Né à Ajaccio il y a 49 ans

France

Réalisateur, scénariste

La Nuit Venue

Frédéric Farrucci: «Les gens qui vivent la nuit m’attirent beaucoup»

Le réalisateur corse Frédéric Farrucci plonge dans les ténèbres de la ville Lumière. Dans son premier long-métrage, La Nuit venue, il met en scène une romance entre un chauffeur de VTC clandestin (Guang Huo) et une stripteaseuse paumée (Camélia Jordana) au cœur d’un Paris noctambule. Sur fond de film noir, néons scintillants et musique électronique, il observe les insomniaques de la capitale avec tendresse et mélancolie.

LE FIGARO.- Comment est née cette romance entre un immigré clandestin chauffeur de VTC et une strip-teaseuse? (suite…)

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Eva Riley ( L’Envolée )

Scénariste et réalisatrice écossaise, Eva Riley est née en 1986 et vit à Brighton. Son court-métrage de fin d’étude « Patriot » est sélectionné en compétition au Festival de Cannes. En 2016, elle écrit et réalise le court métrage « Diagnosis » qui lui vaut d’être repérée par Screen International.En 2019, elle réalise son premier long métrage L’Envolée. Eva travaille actuellement sur son second long métrage, « The Circle ».

Entretien avec la réalisatrice Eva Riley
Pourquoi L’ENVOLÉE comme premier long-métrage ?
Je voulais faire un film qui puise dans l’énergie de la jeunesse. Les nouvelles expériences, les incertitudes et la ténacité de l’adolescence sont les idées et les émotions qui ont guidé mon envie de premier long-métrage. (suite…)

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Pablo Larrain ( Ema )

larrainNé le 19 Août 1976 à Santiago du Chili

Chili

Réalisateur, scénariste, producteur

Santiago 73 (Post Mortem), No, El Club, Neruda, Jackie, Ema

Entretien avec Pablo Larrain, réalisateur

Quelle était l’origine du film ? Connaissiez-vous une “Ema” ? 

La véritable origine est liée à l’adoption. Je pense que l’adoption est une des choses les plus généreuses qu’une personne peut faire, mais, étrangement, elle est souvent idéalisée. Les parents traversent beaucoup de situations problématiques, et l’enfant porte parfois avec lui un traumatisme parce qu’il a été maltraité. Dans quelques cas, des parents « rendent » l’enfant qu’ils ont adopté. (suite…)

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Yaron Shani ( Chained – Beloved )

Né le 28 août 1978

Israël

Réalisateur, scénariste, chef monteur

Ajami, Chained/Beloved

Naissance du projet

Yaron Shani a toujours cherché à sonder le vivant et ce même avant de devenir cinéaste. La naissance de ses filles a profondément changé sa vie et son lien émotionnel et intellectuel avec l’existence est devenu plus profond. Une évolution qui est à l’origine de Chained et Beloved. Le réalisateur se rappelle :

« J’ai commencé à ressentir un besoin de travailler avec ces émotions et ces idées. Je me suis rendu compte que je devais faire un film qui serait un acte d’amour (suite…)

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