Archives pour octobre 2024

Truong Minh Quy (Viet et Nam)

Hypnotique et délicat, Viet and Nam marque aussi une forme de renouveau pour le cinéma vietnamien, même si ce n’est pas sans provoquer quelques heurts avec les autorités culturelles du Parti communiste au pouvoir. Si le film a pu recevoir l’autorisation d’être présenté à Cannes, le film est officiellement banni des écrans vietnamiens, mais pas pour la raison à laquelle on pourrait penser. Car s’il représente un couple homosexuel dans les rôles titres (l’homosexualité est légale au Vietnam mais les couples homosexuels y souffrent encore de nombreuses discriminations), Viet and Nam est surtout accusé par le pouvoir vietnamien de véhiculer une image négative et trop déprimante du pays, et particulièrement de la communauté des mineurs. Nous avons pu rencontrer à l’occasion du festival de Cannes le réalisateur Truong Minh Quy pour évoquer avec lui son film, mais aussi les difficultés rencontrées pour le faire accepter. (suite…)

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Schuchi Talati (Girls Will Be Girls)

Un échange passionnant, avec une réalisatrice qui a beaucoup réfléchi aux enjeux du cinéma, à l’écran comme hors champ et a pris à cœur d’exprimer sa vision de la réalisation.

Votre film est-il parti d’une expérience personnelle, au moins dans un lycée ?

Shuchi Talati : Oui, je n’ai pas été dans un internat mais j’étais dans une école avec le même règlement strict, où garçons et filles devaient faire très attention à rester séparés. Et du moment que vous deveniez adolescente, beaucoup de règles très contraignantes s’appliquaient. La jupe trop courte, le haut trop près du corps, parler trop aux garçons… Il y avait beaucoup de honte autour de la sexualité.

Comment expliquez-vous le titre du film, Girls will be girls ? (suite…)

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Programmation Octobre/ Novembre 2024

Du 10 au 15 Octobre

Du 10 au 15 Octobre

ALL WE IMAGINE AS LIGHT

De Payal Kapadia – Inde, France – 1h54 – VOST

Grand Prix Cannes 2024

Premier long métrage de de la jeune réalisatrice indienne. Sansnouvelles de son mari depuis des années, Prabha, infirmière à Mumbai, s’interdit toute vie sentimentale. De son côté Anu, sa jeune colocataire,également infirmière, fréquente en cachette un jeune homme qu’elle n’a pas le droit d’aimer, car musulman. Cette situation condamne ces deux femmes à une sorte de clandestinité.Autour d’elles, il y a le coeur de la ville qui bat trop vite et empêche de respirer. Car si, comme il est dit ici “la ville sert à oublier les peines de coeur”, elle peut aussi noyer les sentiments et assécher les êtres. Cette trame constitue la première partie du récit et privilégie l’équilibre entre les dialogues explicatifs et les non-dit. Le film prend ensuite une autre tournure, aux confins du fantastique, lorsque les deux jeunes femmes décident d’entreprendre un voyage au cours duquel elles vont tenter de s’affirmer dans leurs choix et revendications.

Payal Kapadia choisit la voie de la douceur et de la revelation; elle dispose d’un réel talent et sort des sentiers balisés, tant de la narration traditionnelle que du film à thèse verrouillé.

 

Du 17 au 22 Octobre

Du 17 au 22 Octobre

GIRLS WILL BE GIRLS

De Schuchi Talati – France, Inde – 2024 – VOST – 1h59

Avec Preeti Panigrahi, Kani Kusruti, kesav Binoy

Premier long réussi à mêler récit d’apprentissage, chronique d’une relation mère-fille riche de troubles et de non-dits et portrait implacable d’une société où la menace de la violence masculine continue de faire des ravages. Mira 16ans, élève brillante donc jalousée d’une école formant des élites du pays, s’emballe pour un de ses camarades venu de Hong kong. Tout son petit monde va s’en trouver bouleversé, à commencer par sa mère, ex-élève de la même école, qui la pousse à réussir les meilleures études pour ne pas vivre la même vie qu’elle, être trop dépendante de l’argent et des caprices de son mari. Le trouble qu’elle ressent elle-même face à ce garçon va créer jalousie et tension entre les deux femmes. Ce film se révèle aussi pertinent dans l’exploration des débuts de l’éveil sexuel de Mira que dans la montée en tension de ses rapports avec les autres garçons de l’école qui, par dépit amoureux ou incapacité d’accepter qu’elle ait été élue déléguée face à eux, vont pousser loin leur stratégie de harcèlement. Deux heures intenses, riches de sentiments contradictoires où Schuchi Talati épate par la fluidité de son écriture et la pertinence de son regard.

https://cinecimes.fr/schuchi-talati-girls-will-be-girls/

Du 24 au 29 Octobre

Du 24 au 29 Octobre

DAHOMEY

De Mati Diop – France – Bénin – Sénégal – 2024 – 1h 08 – VOST

Ce documentaire reparti avec l’OURS D’OR à la Berlinale a été aussi sélectionné aux festivals de Hong Kong, de Shanghaï, Toronto et Londres.

Annoncée par le président Macron en 2018, ce n’est qu’en 2021 qu’a eu lieu la restitution de 26 trésors royaux. Ils avaient été arrachés à ce pays, qui s’appelait alors le royaume de Danxomé, avant de devenir le Dahomey, par les troupes coloniales françaises en 1892. Partis du musée du quai Branly leur arrivée à Cotonou a été suivie par une foule impressionnante. Grâce à la profondeur de son récit, Mati Diop met en lumière la réappropriation d’un passé culturel, par la réflexion animée des étudiants d’une université de Cotonou. Film brillant et envoûtant qui donne l’impression de traverser des siècles, des océans et des civilisations.

Du 31 Octobre au 5 Novembre

Du 31 Octobre au 5 Novembre

VIET AND NAM

de Truong Minh Quy – Viet Nam – 2024 – 2h00 – VOST

Dans les profondeurs des mines de charbon, où le danger guette et l’obscurité règne, Nam et Viêt, deux jeunes mineurs, chérissent des moments fugaces avant le départ de Nam pour une nouvelle vie de l’autre côté de la mer. Mais quelque part, enfouie sous terre dans les profondeurs de la forêt, se trouve la dépouille du père de Nam, un soldat, qu’ils doivent absolument retrouver avant son départ. Ensemble, suivant les mystères des souvenirs et des rêves, ils retracent le chemin du passé . Le réalisateur explore les traumatismes de la guerre, dans defabuleux cadres en clair-obscur ou le sexe côtoie la mort.

https://cinecimes.fr/truong-minh-quy-viet-et-nam/

Du 7 au 12 Novembre

Du 7 au 12 Novembre

VIVRE,MOURIR, RENAÎTRE

De Gael Morel – France – 2024 – durée 1h49

Avec : Victor Belmondo, Lou Lampros, Théo Christine

Dans les années 90, un jeune couple avec enfant emménage dans un nouvel appartement, et fait connaissance de leur voisin photographe, qui va devenir ami puis amant… Ce triangle amoureux va être dévasté par le Sida… Le cinéaste filme ces émotions comme si on les vivait pour la première fois, et réussit un mélodrame entièrement tourné vers l’espoir et la consolation. Traçant le destin des personnages sur 10 ans, le film prend en compte l’arrivée de la trithérapie, qui va permettre aux survivants d’envisager enfin un avenir. Lou Lampros, exceptionnelle, Théo Christine et Victor Belmondo offrent à ces êtres passionnés une incarnation brûlante qui les transforme en inoubliables compagnons de vie.

Du 14 au 19 Novembre

Du 14 au 19 Novembre

MISERICORDE

D Alain GUIRAUDIE – France – 102 mn

avec Félix Kysyl, Jean-Baptiste Durant, Catherine Frot, David

Ayala, Jacques Develay.

Un homme, Jérémie, revient sur le lieu de son adolescence, de sa prime jeunesse, s’immisce dans la vie de ses habitants et s’y retrouve peu à peu emprisonné. Le titre du film s’est imposé en cours d’écriture à Alain Guiraudie. Pour lui, la miséricorde, «c’est l’idée de l’empathie, de la compréhension de l’autre au-delà même de toute morale. C’est l’élan vers l’autre.» À travers ce film, le cinéaste atteint des sommets, notamment en confrontant ses personnages à leur propre culpabilité et leurs petits – voire monstrueux – arrangements avec le contrat social. Partout le désir et la frustration se cognent violemment. Partout aussi, la jalousie s’immisce, comme le poison d’un champignon vénéneux. Avec ce polar rural, virtuose et gourmand, Guiraudie cuisine une recette savoureuse comme une omelette aux girolles. Avec, en guise de persillade, un humour tordant

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Girls will be Girls

 

GIRLS WILL BE GIRLS

un film de Schuchi Talati

France-Inde-Norvège-Etats Unis – 1h59 – VOST

avec Preeti Panigrahi, Kani Kusruti, Kesav Binoy Kiron..

En Inde, une ado et sa mère, attirées par le même garçon, s’opposent et défient la tradition. Audacieux. Comme un écho au sacre du film All We Imagine As Light de la réalisatrice indienne Payal Kapadia, lauréate du Grand-Prix au Festival de Cannes 2024, voici une autre réussite au féminin venue du même pays, traversée aussi par des thèmes contemporains et un élan réformateur .

L’action se déploie, non sans raison, depuis un milieu traditionaliste : un pensionnat d’élite dans le nord de l’Inde, mais filmé à l’anglo-saxonne. Mira, à priori une lycéenne modèle, vient d’être promue « préfète », autant dire relais de l’administration autoritaire. Peu après, deux évènements modifient son quotidien. D’un côté, elle se rapproche d’un nouvel élève, Sri, irrésistible fils de diplomate tout juste débarqué de Hongkong. De l’autre, Alina, sa mère, revient s’installer dans la région pour la soutenir jusqu’aux examens.

Avec ce triangle, la réalisatrice de 39 ans réussit d’abord à créer une situation subtilement instable, et donc imprévisible, entre le pensionnat et la maison maternelle. Mira, qui fait la leçon à ses camarades au moindre écart, décide d’assumer, en privé, son désir pour Sri et se prépare aux premiers rapports sexuels comme s’il s’agissait d’une nouvelle matière scolaire. La mère, au diapason de la direction de l’établissement, voit d’un mauvais oeil une « amitié » dont elle veut ignorer la dimension charnelle. Mais, parallèlement, cette femme au foyer séduisante semble, elle-même, s’éprendre du beau garçon, et rechercher des moments d’intimité avec lui, sous les yeux de Mira…

Le film surprend encore davantage par la mise en perspective, sinon la déconstruction, d’un tel suspense psychologique .

De nombreux aspects de la mise en scène montrent comment les deux générations de femmes indiennes ici incarnées cherchent, coûte que coûte, à s’échapper de la place qui leur est assignée, à l’école comme en famille. Cela vaut pour l’approche de la sexualité, frontale et rationnelle, par l’adolescente comme pour l’envie de la mère de rester vivante, pas seulement dévouée aux siens. Peu à peu, il apparaît aussi que le personnage masculin, en dépit de sa jeunesse et de ses politesses, tire tranquillement profit d’un ordre ancien : le scénario de la rivalité féminine, serait-ce entre fille et mère, sera toujours celui d’un triomphe masculin… Ce beau premier long métrage propose opportunément autre chose, relevant autant de la compréhension que de l’émotion .

Critique de Louis Guichard . Telerama

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