Ciné Mont-Blanc
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/!\ Le prochain Coup de Coeur Surprise aura lieu le Lundi 7 Avril 2025 à 20h 00. A l’issue de la projection, nous vous proposons de nous rejoindre afin d’échanger vos impressions.
Archives : 3ème film du programme
A REAL PAIN
A Real Pain : critique d’un road-trip doux-amer
Un film de Jesse Eisenberg
En quelques minutes, la caméra de Jesse Eisenberg croque avec finesse ses deux protagonistes. Il incarne lui-même David, jeune père de famille angoissé qui enchaîne au cours d’un montage savoureux les messages téléphoniques en direction de l’aéroport. Leur destinataire n’est autre que son cousin Benji (Kieran Culkin), que l’on a vu quelques secondes plus tôt en tant que silhouette au milieu de la foule, après le trajet sinueux d’un travelling. Ensemble, ces deux êtres si opposés se rendent en Pologne pour un voyage mémoriel sur les traces de leur judéité, et sur celles de leur grand-mère récemment disparue, rescapée de la Shoah.
En apparence, A Real Pain prend la forme d’un buddy movie attendu sur deux âmes en quête de reconnexion (entre eux et avec leurs racines), malgré leurs caractères antinomiques. Eisenberg teste très vite cette limite, en faisant de Benji ce mec à la fois insupportable mais touchant, égoïste mais honnête, indélicat mais à l’écoute de ses propres émotions. Dans le contexte de ce voyage organisé, où le silence poli et le respect maniéré de la mémoire sonnent comme une évidence, le personnage fait voler en éclats ces prérequis sociaux. L’air de rien, c’est par cette bascule que Benji trouve sa place au sein du groupe, et permet à chaque membre de cette visite guidée polonaise de se confier, d’exister. On grince des dents plus d’une fois face à ses maladresses, mais on aperçoit aussi en contrechamp un David effacé derrière sa politesse, et incapable de créer ce lien si salvateur que suppose leur périple.
Plus qu’un simple terrain de jeu pour un double-portrait joliment écrit, A Real Pain traverse ces villes chargées d’histoire en faisant ressentir ce pesant sentiment d’absence. La comédie rebondit toujours sur sa dimension douce-amère, jusqu’à cette visite bouleversante de sobriété dans le camp de concentration de Majdanek ; Jesse Eisenberg se contente de la simplicité de plans fixes lourds de sens, où la déambulation des visiteurs suffit à réveiller cette souffrance du titre. Cette souffrance, c‘est d’ailleurs l’autre élément pesant du long-métrage, invisible mais bien présent. Peut-on parler de traumatisme transgénérationnel quand on n’a pas connu soi-même l’horreur du génocide ? Que représentent l’anxiété ou la dépression de ses protagonistes face à la douleur de l’Holocauste ?
Publié dans 3ème film du programme, Archives films
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