Ciné Mont-Blanc
A ne pas rater !!
/!\ Le prochain Coup de Coeur Surprise aura lieu le Lundi 6 Janvier 2025 à 20h 00. A l’issue de la projection, nous vous proposons de nous rejoindre afin d’échanger vos impressions.
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Toute l'équipe Cinécimes vous souhaite une excellente année cinéphile !!
Archives : Archives films
Caprice
De Emmanuel Mouret – France – 2015 – 1h40
Avec Virginie Efira, Anaïs Demoustier, Laurent Stocker, Emmanuel Mouret…
Voilà une fable sur un triangle amoureux auquel s’ajoute l’ami du héros… or à quatre, on n’y va pas du tout ! Dans cette joyeuse comédie romantique, Mouret incite ses personnages à conférer davantage d’importance à l’introspection qu’à l’expression. On ne sait jamais quelle est leur part de candeur, de calcul, de duplicité ou d’innocence. L’inattendu déjoue sans cesse les attentes. Avec son style littéraire et déconnecté du réel, le réalisateur trouve aussi la note amère et juste qui lui manquait. De ce ballet comique où l’on parle comme chez Rohmer, naît une réflexion sur la fragilité des liens amoureux.
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Un pigeon perché sur une branche
De Roy Andersson – Sue-Nor-Fra-All – 1h40 – VOST
Avec Holger Andersson, Nils Westblom, Charlotta Larsson…
Sam et Jonathan, deux marchands ambulants de farces et attrapes, nous entraînent dans une promenade kaléidoscopique à travers la destinée humaine. C’est un voyage qui révèle l’humour et la tragédie cachés en nous, la grandeur de la vie, ainsi que l’extrême fragilité de l’humanité. Le film commence par une série de sketchs parfois comiques sur le thème de la mort, avant qu’un fil rouge ne se dégage grâce aux deux personnages. Derrière l’humour froid et les disputes,ils confient leurs angoisses métaphysiques. Un pigeon perché… trouve son rythme dans les ruptures de ton, les changements de décors et les superpositions d’époques et on reconnaît à Andersson un vrai talent poétique pour harmoniser cette narration fragmentée.
Lion d’or à Venise 2014
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Lost river
De Ryan Gosling – Etats-Unis – 2015 – 1h35 – VOST
Avec Christina Hendricks, Saoirse Ronan, Ben Mendelsohn, Barbara Steele….
Lost River est un conte maléfique et onirique, le premier film sombre et prometteur de Ryan Gosling en tant que réalisateur. Ce sont des ombres qu’il a filmées : paysages sinistrés, humains à qui les puissants ont tout pris et qui errent comme des zombies modernes dans des lieux qu’il faut détruire ou fuir si l’on veut survivre. Bones aimerait bien partir mais c’est impossible. Sa mère s’est laissé berner comme tant d’autres par des spéculateurs. Ryan Gosling a réussi la performance de mettre en scène ces lieux hantés pour figurer le spectre de la crise américaine. Influencé par Nicolas Winding Refn qui l’a fait jouer dans Drive et Only God Forgives, son art de l’étrange évoque aussi un certain cinéma nocturne des années 80, de Lynch à Beineix.
Critique
Un conte. Une de ces histoires effrayantes que les enfants aiment écouter, transis de peur, à l’abri de leurs draps. Un cauchemar moderne où les ogres brûlent les maisons des pauvres qui ne peuvent rembourser leurs dettes. Où les mères, pour nourrir leurs enfants, sont contraintes de travailler dans des palais maléfiques et sanglants où elles risquent leur vie. Où une ville nommée Lost River, victime d’une malédiction, en cache une autre, soeur jumelle engloutie dans les eaux, des années auparavant, au nom du progrès.
Ce sont des ombres qu’a filmées Ryan Gosling dans son premier film comme réalisateur : paysages sinistrés, humains à qui les puissants ont tout enlevé et qui se traînent, désormais, tels des zombies modernes. Les stars du film, d’ailleurs, ne sont ni les acteurs, ni les personnages, mais cette ville fantomatique et ce lac artificiel. Des lieux qu’il faut détruire ou fuir si l’on veut survivre. Bones (Iain de Caestecker, double ado de Ryan Gosling,) aimerait bien partir, tout quitter, emmener au loin ce qui lui reste de famille. Impossible. Pour garder la maison familiale, sa mère (Christina Hendricks) s’est laissé berner, avec tant d’autres, par des spéculateurs qui, comme dans les fables, ont promis la lune, des fortunes, un renouveau… Aujourd’hui, Lost River est devenu une cité à la dérive : des jeunes gens maléfiques y font la loi et des adultes pernicieux brûlent les maisons délabrées de leurs clients endettés. « Vous aimez foutre le feu aux baraques, en Amérique ! Ça doit vous amuser », remarque le seul étranger de la ville, un étrange chauffeur de taxi, incarné par Reda Kateb…
Beaucoup diront, sans doute, que le tout jeune cinéaste reste encore sous l’influence de ceux qui l’ont fait tourner : Derek Cianfrance (The Place beyond the pines) et, bien sûr, Nicolas Winding Refn (Drive, Only God forgives). Quelques ralentis pas vraiment indispensables, deux ou trois cadrages inutilement sophistiqués pourraient leur donner raison. Mais sous la lutte candide, au romantisme adolescent, entre le bien et le mal que filme Ryan Gosling, perce une inquiétude existentielle que l’on ne voit guère dans le jeune cinéma américain. Un goût pour des éclairages contrastés, aussi, proches de l’expressionnisme des belles années. Et une tentation joyeusement assumée pour le morbide sadomaso : cette « chambre des désirs », notamment, où ce qu’il reste de riches et de puissants dans Lost River vient se défouler sur des femmes, enfermées dans des sarcophages… Peut-être hésite-t-il encore entre divers styles — entre le clip et le roman d’aventures à la R.L. Stevenson, pour faire court —, mais Gosling a déjà — et c’est le plus important — un regard.
Pierre Murat (Critique Télérama du 8/04)
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Every thing will be fine
De Wim Wenders – Allemagne, Canada, Norvège – 2015 – 1h55
Avec James Franco, Charlotte Gainsbourg, Rachel McAdams, Marie-Josée Croze…
Après une dispute avec sa femme, Thomas, un jeune écrivain, conduit sa voiture sans but dans la périphérie de la ville. Dans cette nuit d’hiver, en raison de l’épaisse couche de neige et du manque de visibilité, Thomas percute mortellement un jeune garçon qui traversait la route. Après plusieurs années, ce terrible accident résonne encore dans sa vie. Comment se pardonner quand on a commis l’impardonnable ? Alors que ses relations volent en éclats et que tout semble perdu, Thomas trouve un chemin inattendu vers la rédemption. Sa tragédie se transforme en succès littéraire. Mais au moment où il pensait avoir dépassé ce terrible événement, il apprend à ses dépends que ce n’est pas le cas et que certaines personnes n’en ont pas fini avec lui, soulignant la perfidie humaine de cette tragédie.
La critique de TELERAMA (Jacques Morice)
Les vertus du trauma. Voilà le sujet plutôt original abordé par Wim Wenders dans ce portrait psychologique d’un écrivain en mal d’inspiration, qui provoque accidentellement la mort d’un enfant, se sent coupable puis se bonifie – littérairement parlant – en exploitant ce drame. La 3D, utilisée de manière intimiste pour une fois, accentue, par la profondeur de champ, l’isolement des divers personnages. L’égale empathie que témoigne Wenders pour l’écrivain, la mère et l’enfant, sa manière de faire progressivement connaissance avec chacun est plutôt prenante.
La critique du MONDE (Franck Nouchi )
Bonne nouvelle : Wim Wenders est de retour. Après plusieurs années d’errance cinématographique, le réalisateur de L’Ami américain et Paris, Texas (Palme d’Or 1984), nous revient avec un beau film intitulé Every Thing Will Be Fine. « Every Thing » en deux mots, renvoyant aux mots du philosophe Bela Balazs : « Le cinéma peut garantir l’existence de toute chose. » Ce « toute chose », il faudra deux heures pour en comprendre le sens. Aller au plus près de la question de la créativité fictionnelle ; interroger la culpabilité qui est au cœur de toute œuvre d’un écrivain ou d’un cinéaste qui exploite le « réel » ; découvrir qui est Thomas, le personnage central de ce film interprété par James Franco. C’est un écrivain en mal d’inspiration, ce pourrait être aussi Wim Wenders. Dans un petit village du Grand Nord Canadien, après s’être disputé avec sa compagne, sur une route enneigée, il percute violemment un jeune garçon qui traversait la route…
La critique de PREMIERE (Isabelle Danel)
Tourné en 3D, Every Thing Will Be Fine suit le parcours émotionnel d’un cœur sec. Responsable de la mort d’un enfant, Thomas, écrivain en panne, sombre dans la dépression. Sa culpabilité subsiste alors que l’inspiration revient. Visuellement, Wenders et son directeur de la photo Benoît Debie sont en recherche constante de références à la peinture (Edward Hopper, Andrew Wyeth…), en refus du relief sensationnel (la lumière comme une substance enveloppante). À ce travail de l’espace s’ajoute celui du temps, la narration faisant le choix de la lenteur entre deux accélérations. Inabouti mais fourmillant d’idées, le film déconcerte par l’apparente simplicité d’un récit qui sonde des âmes douloureuses.
« Peut-on utiliser une tragédie à des fins artistiques ? »
Plébiscité grâce notamment à Paris, Texas (Palme d’Or 1984), Les Ailes du Désir (1987) ou Buena Vista Social Club (1999), et quelques mois après la sortie du documentaire Le Sel de la Terre, le Cinéaste Allemand Wim Wenders reprend (déjà) du service. Avec Every Thing Will Be Fine, un drame glacial et fascinant, il transforme James Franco en écrivain dévoré par la douleur. Au menu ? Rédemption, violence psychologique, filiation et processus littéraire. De passage à Paris, le Maestro est revenu sur les choix qui font la réussite de ce 22ème long métrage.
► Choisir le bon angle : « A la lecture du scénario, le thème de la culpabilité m’a attiré. Thomas, le héros du film, se sent coupable de la mort d’un enfant. C’est vrai. Mais il y a aussi une culpabilité indirecte. Elle se matérialise par l’embarras ressenti à l’idée d’avoir utilisé ledit drame pour en faire un best-seller. Ce sentiment très fort, associé à l’acte de création, m’intéresse beaucoup. La question soulevée en filigrane est la suivante : peut-on se servir d’une tragédie et l’exploiter à des fins artistiques ? A mon sens, c’est un sujet qui est passionnant et qui a rarement été abordé au cinéma. »
► Choisir l’interprète adéquat : « C’était important que mon acteur comprenne le conflit qui anime le protagoniste. Il fallait qu’il soit à la fois metteur en scène et écrivain. Raison pour laquelle j’ai jeté mon dévolu sur James Franco qui est, de surcroit, un acteur minimaliste. C’est une qualité primordiale dans la mesure où j’ai filmé en relief. Les caméras 3D fonctionnent comme des rayons X, elles voient tout. James est un comédien incroyable. Il a trouvé sa façon d’investir le rôle. Il a lu 20 livres pendant les 35 jours de tournage. Il s’isolait entre les prises. Bouquiner, c’était pour lui devenir Thomas. »
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Une femme iranienne
De Negar Azarbayjani – Iran, Allemagne – 2015 – 1h42 – VOST
Avec Ghazal Shakeri, Shayesteh Irani, Homayoun Ershad
Bien que Rana soit une femme traditionnelle, elle est forcée de conduire un taxi à l’insu de sa famille pour rembourser la dette qui empêche son mari de sortir de prison. Par chance, elle rencontre la riche et rebelle Adineh, désespérément en attente d’un passeport pour quitter le pays et ainsi échapper à un mariage forcé. Les deux femmes vont s’aider mutuellement. Premier long métrage de la réalisatrice, elle conte l’histoire d’une amitié improbable, en dépit des normes sociales et des croyances religieuses. Récompensé par de nombreux prix Une femme iranienne offre un aperçu de la société contemporaine en Iran.
Critique
Ce film, tourné en 2011, aborde avant tout le problème de la condition féminine en Iran, entre tradition , famille, désir de liberté, d’autonomie, de rencontres…. Mais il traite aussi le sujet des transgenres en Iran, et du regard sur eux de la société, qui nous surprend!
Rana est une mère de famille dévouée et pieuse, assez traditionnelle, qui prend le volant du taxi pour rembourser la dette de son mari emprisonné. Elle va transporter Adineh, riche rebelle et transsexuelle, qui fuit sa famille et un mariage forcé.
Ce film écrit au cordeau et magistralement interprété nous renvoie avec habileté l’incroyable vitalité de citoyens sous surveillance , acculés au mensonge, à la fuite … voire aux transmutations les plus inattendues.
Jafar Panahi nous le montre au cinéma depuis quelques semaines : on fait des rencontres étonnantes dans les taxis iraniens. Des secrets s’y révèlent, des disputes y éclatent, le chauffeur n’est pas toujours celui qu’il semble être. Dans Une femme iranienne, ce chauffeur n’est pas, comme dans Taxi Téhéran, un réalisateur en plein tournage, mais c’est tout de même assez surprenant : il s’agit d’une femme, Rana, qui a dû reprendre le métier lorsque son mari s’est retrouvé en prison pour dettes. Une envie de liberté chère au cinéma iranien et à ses héroïnes.
Negar Azerbayjani, réalisatrice quadragénaire, a réussi l’exploit de réaliser une œuvre sur les transgenres au pays des Shahs où l’homosexualité est bannie, réprimée et punie de la peine capitale, avec l’autorisation du ministère de la culture local. La réalisatrice évoque surtout un fait méconnu des Occidentaux. Dans la république islamique d’Iran, les intersexes, nés avec le tiraillement psychologique d’être mentalement d’un sexe autre que celui imposé par leurs corps, sont curieusement reconnus ! Ils peuvent subir une opération pour changer de genre. Probablement parce que tout vaut mieux que l’homosexualité …
Avec un souci de vérité documentaire, la réalisatrice dresse un parallèle entre ces deux destins de femmes iraniennes qui vont apprendre à s’entre-aider dans un monde qui impose le voile sur les chevelures féminines.
Avec des plans forts, notamment quand les corps disparaissent pour céder la place aux voix d’une narration témoin de la société iranienne, le film séduit. Il réaffirme les limites d’une société rigide où la liberté d’être subit le camouflet de la rigueur étatique et islamiste Croisant les regards sans préjugés ni manichéisme, ce premier long-métrage un peu banal sur la forme réussit son portrait ambitieux d’un Iran tiraillé.
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A trois on y va
De Jérôme Bonnell – France – 2015 – 1h26
Avec Anaïs Demoustier, Félix Moati, Sophie Verbeeck…
Un conte sentimental, entre vaudeville et romance, sur un trio amoureux dans l’air du temps, aussi fusionnel et complice que l’est parfois un couple. Des jeunes gens qui détestent se mentir, s’arrangent, comme ils peuvent, avec leur cœur. Le cinéaste compose une alchimie où la comédie, le burlesque, des dialogues piquants et une mise en scène rebondissante se mêlent d’ingrédients plus graves, plus mélancoliques, sans menacer la justesse de son récit sur la libre circulation du désir. La sensualité maladroite des personnages contribue aussi à la beauté de cette histoire d’amour.
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L’art de la fugue
De Brice Cauvin – France – 2015 – 1h40mn
Avec Laurent Laffite, Agnès Jaoui, Benjamin Biolet, Nicolas Bedos…
Antoine vit avec Adar, mais il rêve d’Alexis… Louis est amoureux de Mathilde alors il va épouser Julie… Gérard, qui n’aime qu’Hélène, tombera t-il dans les bras d’Ariel ? Trois frères en pleine confusion… Comment, dès lors, retrouver un droit chemin ou… échapper à ses responsabilités ? C’est là tout l’Art de la Fugue… ( Adaptation du roman de Stephen McCauley).
Critique
A partir d’un roman très américain de Stephen McCauley, adapté avec l’aide d’Agnès Jaoui, Brice Cauvin tire un film choral très français où les personnages subissent ce qui leur arrive par paresse existentielle plus que par lâcheté. Un portrait de l’évitement érigé en art de vivre qui pourrait énerver mais qui finit par toucher. Dans le rôle du frère aîné qu’on se refile comme une patate chaude, Benjamin Biolay est le plus attachant des fugueurs.
C’est une chronique douce amère et néanmoins joyeuse. Un chassé-croisé de personnages – trois frères, leurs parents, leurs amis – aux liens encombrants et indéfectibles. Tous ont tout pour être heureux, ils le sont, mais ils ont si peur de s’engluer dans le bonheur qu’ils s’obstinent à le jouer à pile ou face, au risque de le perdre.
Le réalisateur procède par petites touches, par petites scènes, toutes délicieuses et rapides. On va d’un personnage à l’autre, complice, à chaque instant, des grandes hésitations de l’un, des mini-espoirs de l’autre et de l’extravagance de chacun.
Tous les personnages du film, même les plus petits, ressemblent à des notes de musique sur une partition : dérisoires mais indispensables. Par moments, ont se croirait chez Woody Allen… l’art de ciseler des répliques sans jamais se prendre au sérieux, où l’on effleure la gravité…
Enfin, on aime ce film, d’autant que Brice Cauvin semble maîtriser un don qui manque à bien de ses confrères en comédie : le charme.
Pierre Murat, Télérama
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Citizenfour
De Laura POITRAS – USA – 2015 – 1h54
Avec Glenn Greenwald, Kevin Bankston, Edward Snowden…
En janvier 2013, la documentariste américaine qui travaille sur la surveillance des communications de la NSA, reçoit un mail signé « Citizen Four ». « Citoyen » et « Four » allusion au 4ème amendement de la Constitution américaine censé protéger les citoyens contre les intrusions arbitraires dans leur vie privée. Ce mystérieux correspondant se dit en en possession de documents qui prouvent l’étendue de la collecte des données personnelles pratiquées dans le plus grand secret. Oscar 2015 du meilleur documentaire, Citizenfour réussit à capter un morceau d’histoire en train de s’écrire, celle des ressorts d’une machine à espionner devenue folle, et celle de l’homme de 30 ans à peine qui nous alerte.
Note de lecture à propos de Citizenfour sur L’art de la révolte
Laura Poitras, USA, 1h54, oscar du meilleur documentaire.
En janvier 2013, Edward Snowden n’est encore qu’un salarié de Booz Allen Hamilton, un sous-traitant de la NSA. Depuis Hawaï, où il travaille, il contacte la journaliste à Berlin, Laura Poitras, pour la première fois, de manière confidentielle et anonyme, en signant Citizen Four. Celle-ci, qui couvre les questions de surveillance de très longue date, avait déjà été interceptée près de 80 fois dans les aéroports par les autorités américaines qui lui ont saisi régulièrement son matériel informatique. À ce moment-là, dit-elle, « je viens de passer du temps avec Julian Assange et je suis sur le qui-vive. (…) « Je me sens plus en danger que sur une zone de guerre, où le risque est extérieur ; le monde du renseignement est plus pernicieux, il pénètre votre esprit, il touche à votre intimité la plus profonde. » « Juste après nos premiers échanges, j’achète un ordinateur payé en espèces et je change d’endroit à chaque fois que je communique avec Ed. » La confiance s’installe entre eux. En avril, Snowden lui dit qu’il va sortir de l’anonymat, mais refuse d’abord de la rencontrer en répétant qu’il ne veut pas être le centre du sujet, puis, le 1er juin 2013, il lui donne rendez-vous à Hongkong par mail : « Nous nous retrouverons lundi à 10 heures, à l’extérieur du restaurant de l’hôtel Mira. Je jouerai avec un Rubik’s Cube, vous me reconnaîtrez ». (suite…)
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Les châteaux de sables
De Olivier Jahan- France 2015 – 1h42min
Avec Emma de Caunes, Yannick Renier, Jeanne Rosa
Éléonore, la trentaine, vient de perdre son père. Il lui a légué sa maison en Bretagne, dans les Côtes d’Armor. Elle est photographe, a connu un certain succès mais les affaires ne marchent plus comme avant. Il faut absolument qu’elle vende cette maison.
Elle s’y rend avec Samuel, son ancien compagnon dont elle s’est séparée il y a quelque temps, parce qu’elle ne se sent pas d’aller seule dans cette maison où elle n’est pas retournée depuis la mort de son père. Mais elle joue avec le feu – car elle sait bien que leur relation ne s’est pas franchement apaisée, même si elle a eu depuis quelques aventures et que Samuel vit à présent avec Laure. Claire Andrieux, l’agent immobilier, s’est occupée d’organiser des visites durant les deux jours où Éléonore et Samuel vont rester dans la maison.
C’est un drôle de week-end que ces trois-là s’apprêtent à passer. Un week-end surprenant, riche en surprises et en émotions, en tensions, souvenirs et engueulades, en moments mélancoliques et absurdes, dont Éléonore et Samuel sortiront forcément changés.
Critique
Du sable, des gréves, des marées hautes et basses, des ciels mouvants, une jolie maison en granit….. une certaine poésie à la fois âpre et douce, sauvage et tendre : voilà le décor du dernier film d’Olivier Jahan.
Eléonore a 30 ans, elle est photographe, elle se remet difficilement d’une séparation douloureuse et son père vient de mourir : elle décide de vendre la maison que celui-ci lui a légué en Bretagne. Elle convainc son ancien compagnon Samuel de l’accompagner. Un troisième personnage, Claire, trentenaire et célibataire, l’agent immobilier chargée de la vente de la maison va s’ajouter dans l’histoire.
Ni comédie, ni drame, l’histoire, plutôt ordinaire, est assez belle, calme ; elle n’est pas joyeuse ; elle parle de deuil, de souvenir, de mémoire, de non-dits. Elle parle aussi de désir, de complicité, entre Eléonore et son père, photographe lui aussi ; entre Eléonore et Samuel, toujours perceptible ; et entre Claire, ce drôle de personnage, et le couple (elle les pense toujours ensemble).
Pour faire vivre cette complicité et comprendre ce qui se joue, dans la tête de Samuel et Eléonore, fac à leur ancienne relation, les acteurs font face à la caméra, plantant leurs yeux dans ceux des spectateurs, racontant, expliquant, développant. Des flashbacks, bien placés font redécouvrir le passé des personnages. Une voix féminine, aussi, (dont on ne comprend que tard à qui elle appartient) hante le film, sait beaucoup, raconte ce qui n’a pas été dit. Enfin, des photographies, en noir et blanc, apparaissent en plein écran, comme des diaporamas, pour prolonger le dialogue entre les images et les acteurs : il y a un moment très joli, quand pour dire au revoir à la maison, Eléonore se photographie, dans toutes les pièces et notamment se prend au flash dans le miroir.
Sensible et avec un certain degré de légèreté, cette comédie douce-amère, interroge sur la perte, la transmission et le besoin de reconstruction.
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Voyage en chine
De Zolyan Mayer – France – 2015 – 1h45
Avec Yolande Moreau, Qu Jung Jung, Ling Dong Fu…
Lorsqu’elle apprend que son fils Christophe est mort dans un accident en Chine où il avait construit une vie loin de ses parents, sa mère Liliane n’hésite pas une seconde. Face à la bureaucratie incapable de l’aider, elle décide d’aller elle-même récupérer le corps de son fils. Elle débarque ainsi dans un pays inconnu, dont elle ne maîtrise ni la langue ni les codes, pour y découvrir l’appartement de son fils, ses amis, sa vie. Emmitouflée dans un gros manteau rouge, avec une crinière grisâtre et une mine défraichie, Yolande Moreau occupe tout l’écran, modeste et digne, merveilleuse de fragilité. Elle porte sur ses épaules ce beau film sensible de Zoltan Mayer, qui réalise son premier film avec une maîtrise et une finesse remarquable.
Critique
Jing Liliane, la cinquantaine, apprend la mort accidentelle de son fils en Chine. Accablée par des imbroglios administratifs quasi kafkaïens pour faire revenir le corps de Christophe, Liliane décide brusquement de partir en Chine pour affronter la situation. Elle refuse que son mari l’accompagne : « Je dois y aller seule, tu n’as jamais rien fait pour ton fils, il n’y a pas de raison de changer ». Plongée dans cette culture si lointaine, ce voyage marqué par le deuil devient un véritable voyage initiatique.
Remarqué pour ses travaux de photographe et ayant participé à des courts métrages et documentaires, le franco-hongrois Zaltan Mayer vient de réaliser son premier long métrage, « Voyage en Chine ». Attiré depuis longtemps par les cultures orientales, il décide lors d’un voyage en Chine d’entreprendre un film dont l’action se situerait dans ce pays – et plus précisément dans le Sichuan, situé dans le Sud-Ouest. Le cinéaste et scénariste reconnait que d’emblée il a pensé à Yolande Moreau pour incarner l’héroïne : « Sa présence m’a accompagné tout au long de l’écriture, avant même d’avoir eu son accord. » Et d’ajouter : « Et le film ne se serait pas fait si elle avait dit non ».
Un long périple commence. Le cinéaste nous invite à y prendre part à travers le pas décidé, mais aussi le regard hagard et parfois inquiet d’une Liliane à la crinière blonde et grise, emmitouflée dans un grand manteau rouge. À tout moment notre héroïne doit faire face aux difficultés d’une voyageuse peu expérimentée, obligée de baragouiner un anglais rudimentaire et d’écarquiller ses beaux yeux bleus pour appeler à l’aide. Pas évident en effet de se repérer dans un Shanghaï démesuré et de trouver la destination de Langzong, grande vieille ville traditionnelle du Sichuan où a vécu son fils.
Zaltan Mayer nous offre avec Voyage en Chine un film sans prétention, sensible, souvent grave mais également drôle. Il nous fait également partager avec tact et élégance une certaine quête spirituelle. Le cinéaste pose un regard juste sur le vrai sens du voyage et l’apport de la rencontre de l’autre. « Voyage en Chine » ne dérape jamais dans le pittoresque ni dans l’exotisme de pacotille. Zaltan Mayer a ainsi fait le choix d’une réalisation minimaliste qui privilégie les cadrages soignés et un superbe travail sur le flou. Un minimalisme renforcé par la musique de Steve Shehan qui fait écho à la sensibilité du film. Zaltan Mayer nous propose aussi de beaux portraits de personnages féminins. Certes le film repose avant tout sur les épaules de Yolande Moreau. La comédienne déploie ici toutes les nuances de sa sensibilité frémissante et de sa drôlerie bien personnelle comme elle le fit notamment dans « Séraphine » (2008) et « Quand la mer monte » (2004). Mais Yolande Moreau forme aussi un magnifique duo avec la belle et lumineuse actrice chinoise Qu Jing Jing qui joue Danje, l’amie de son fils. Beau duo également que celui qu’elle crée avec la comédienne Ling Dong Fu, qui campe sa facétieuse logeuse, une sorte de double chinois. On sort de ce « Voyage en Chine » le cœur léger et l’esprit zen. En somme, un film tout simple, qui n’est que douceur et tendresse.
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