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EMPLOYE /PATRON

    

Un film de    Manuel Nieto Zas

UY-AR-FR-1h46- VOST

AvecNahuel Perez Biscayart, Christian Borges, Justina Bustos

Le titre du film ne prépare pas à ce film organique qui a l’ampleur d’un western, qui sent la terre, le foin fauché, la sueur, les effluves animales mêlées au délicat parfum du luxe, l’odeur du bon et du mauvais alcool.

Au tout début de l’histoire, nos deux hommes, le patron (interprété par l’excellent Nahuel Pérez Biscayart qui ne cesse de nous époustoufler) et l’employé ( Christian Borges, impressionnant de force rentrée ), ne se connaissent pas. On connaît juste les affres du premier qui s’inquiète pour la santé de son nourrisson, pour ses terres, pour ses récoltes. Ce sont ces dernières qui vont le pousser à rechercher une nouvelle main d’œuvre. Suite à plusieurs abandons de poste sur son exploitation agricole (au prétexte d’un travail trop dur, trop mal payé ?), le voilà dans l’urgence de recruter un nouveau conducteur de tracteur. Que Carlos, âgé de seulement 18 ans, n’ait pas de permis, pas d’expérience, soit un jeune père qui va être obligé de s’éloigner de sa famille pour aller bosser ? Qui s’y intéresse ? Docilement Carlos obtempère avec une seule doléance : pouvoir disputer la course de chevaux pour laquelle il s’est entraîné, désir adolescent dans un corps d’homme bien bâti. C’est ainsi qu’il part, la main de son patron sur l’épaule, geste d’amitié ou d’appartenance. Relations ambiguës entre deux classes quotidiennement liées mais au sort opposé. L’une ayant les moyens de se sortir des mauvaises passes, l’autre ne pouvant que se contenter d’un « ce sont des choses qui arrivent » sans jamais se rebeller, espérant qu’une bonne étoile accepte de s’en mêler. Mais c’est un événement douloureux, un malheureux accident, qui va devenir le nœud de la trame à partir duquel tout va se densifier. 

  

                

 

                                                                                                                          

   

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MURANI

Un film de Antoneta Alamat Kusijanovic

Croatie 2021 – 1h 36- Drame

Avec Gracija Filipovic, Danica Curcic, Leon Lucev…

L’affiche du film retient l’attention… Une svelte jeune-fille, adolescente sauvage et lumineuse, vêtue d’un blanc immaculé, comme une deuxième peau…Et dès les premières images du film nous sommes plongés dans l’obscurité des profondeurs sous-marines et c’est à peine si l’on perçoit le miroitement de la lumière à la surface… On devine deux plongeurs, nageant de concert, qui chassent la murène (Murina) au harpon. C’est un père, Ante, et sa fille Julija, qui vivent sur une île écrasée de soleil, sans la moindre végétation, quelque part sur la côte Dalmate entre Zadar et Dubrovnik. Mais ce cadre idyllique est aussi une prison pour la jeune Julija…. Son père la rudoie, la tyrannise comme il tyrannise Nela, la mère, ancienne reine de beauté. Ce film, premier long métrage de la réalisatrice croate Antoneta Alamat Kusijanovic a reçu la Caméra d’Or à Cannes. A l’inverse de Les Poings Desserrés de la russe K. Kovalenko qui abordait une thématique identique, Murina ruisselle d’azur et de lumière. Arrive sur l’île Javier, un ami d’enfance de Ante, richissime homme d’affaires… Cette arrivée va faire éclater l’orage familial, ravive les rancœurs, les émotions, la tension se fait de plus en plus palpable… Le malaise contamine la carte postale et fait naître chez Jilija la volonté de se libérer du joug paternel.

Gracija Filipovic qui joue formidablement Julija, donne au film la noblesse d’une tragédie antique, celle de la femme murène. Chez elle tout passe par le regard, elle se faufile discrètement, épie son monde, écoute sans être vue, prête à mordre. La réalisatrice filme décidément bien les éléments et excelle en extérieur (Cf son court métrage remarqué de 2017, Into the Blue). Entre les duels au soleil des hommes taureaux et la révolte de la fille murène, elle sait surtout s’emparer d’un thème très contemporain, voire rebattu, pour le tirer vers la mythologie.

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VORTEX

VORTEX

De Gaspard Noé

France – 2022 – Durée  2H20

Avec : Françoise Lebrun, Dario Argento, Alex Lutz, Kylian Dheret

A Paris, dans le quartier Stalingrad, un homme (Dario Argento) et une femme (Françoise Lebrun) forment un vieux couple (ils n’ont pas de prénoms). Ils vivent dans un appartement sous les toits, bas de plafond et en forme de U – détails importants, annonçant une déambulation labyrinthique. Ils se sourient, chacun d’une fenêtre. Le plan d’après, ils boivent un verre sur leur petite terrasse. « La vie est un rêve », dit-elle. Cet apéro à l’air libre sera l’un des rares moments de sérénité. Car la dame au chignon, brillante intellectuelle, ancienne psychiatre, est en train de perdre la tête – Alzheimer, même si la maladie n’est pas nommée. Et la vie devient un enfer pour son mari, critique de cinéma, qui, de son côté, tente péniblement d’écrire un essai

Ces premiers plans, au format carré, seront aussi les seuls où Dario Argento et Françoise Lebrun apparaissent ensemble à l’écran. Tout le reste du film est tourné selon la technique du split screen – l’écran partagé en deux , deux cadres bordés d’un liseré noir, comme celui des faire-part de décès, et, dedans, un reste de vie qui s’agite encore, filmé dans ses rituels, en temps réel. 

Chacun dans son « couloir », les deux personnages vont dès lors évoluer dans leur propre univers : le spectateur acquiert une « vision double », pénètre dans les préoccupations de l’un et de l’autre, se familiarise avec ses habitudes. L’espace mental se connecte à celui de l’appartement, soulevant des questions essentielles : que signifie vivre ensemble, et qu’est-ce qu’habiter ?

De ce temps, lent, épais, et de l’espace familier où l’on se croise sans plus se parler, le cinéaste fait le sujet de son film, hyperréaliste et hypnotique. Petit à petit, l’appartement devient un dédale mental où la vieille femme perd la raison, alors que son mari tient, de manière un peu pathétique, à rester un homme d’esprit, et à continuer d’exister socialement. Au cœur du film, la visite du fils du couple, ex-drogué qui se soigne, devient un sommet bouleversant .

On jurerait, à ces moments, que cette famille a existé. Que ces deux grandes figures de la cinéphilie, le réalisateur Dario Argento, si crédible en vieil intello narcissique, et Françoise Lebrun (La Maman et la putain), merveilleuse de fragilité, avec ses regards qui appellent à l’aide, ont vraiment enfanté Alex Lutz, jamais aussi touchant et à nu qu’ici. 

Gaspard Noé, cinéaste argentin de 57 ans,  a tourné entre autres « Climax», et «Lux Aeterna».

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A CHIARA

À CHIARA

De Jonas CARPAGNINO – Italie -2h01

avec Swamy Rotolo (Chiara) Grecia Rotolo (Giulia) Claudio Rotolo (Claudio, le père)

Carmela Fumo (Carmela, la mère)

Chiara, 15 ans, est précipitée dans le dur monde adulte plus tôt qu’elle ne l’aurait voulu, quand son père Claudio devient un fugitif recherché suite à ses trafics. Face au mutisme de sa mère Carmela , sa sœur ou encore ses cousins, Chiara devra explorer seule l’histoire familiale.

Les secrets, les non-dits, finissent souvent par déchirer des êtres qui s’étaient toujours aimés et fait confiance. Voici un thème bien connu des drames au cinéma, auquel Jonas Carpagnino arrive pourtant à insuffler une nouvelle force par son approche quasi-documentaire et le récit d’apprentissage qu’il place au cœur. Après avoir dépeint l’hostilité rencontrée par des migrants dans un village italien, puis la jeunesse d’un adolescent Rom dans un microcosme, le réalisateur monte encore les échelons sociaux avec cette fois le portrait d’une famille de la classe moyenne, dont le confort dépend toutefois d’activités illégales. L’avenir de Chiara dépend alors de sa capacité à ouvrir les yeux sur ses origines.


Toujours dans la tradition néoréaliste, la distribution est entièrement composée d’interprètes non-professionnels. Ce choix se révèle payant : les liens entre les membres de la famille deviennent d’autant plus touchants par leur crédibilité et la véritable affection transposée à l’image. De plus, l’empathie éprouvée n’est que plus grande pour ces inconnus, qui semblent interpréter leurs propres rôles dans la première partie de l’œuvre.


Enfermée, comme sa famille, dans une prison mentale, Chiara se démarque en ajustant son corps à son esprit, révolté et constamment en mouvement. Chaque décor, des bunkers à la campagne nappée de brouillard, contraste alors avec son besoin d’émancipation. La mise en scène ne délaisse le réalisme dramatique que pour embrasser le fantastique, à l’occasion d’hallucinations auditives ou de rêves douloureux. Swamy Rotolo, intense, envoûtante, fait de Chiara un personnage saisissant, un thriller à elle toute seule.

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FACE A LA MER

FACE À LA MER

De Ely Dagher, Liban-2021-1h56. Avec Manal Issa, Roger Azar, Yara Abou Haidar

Premier long métrage de Ely Dagher, tourné peu avant l’explosion dans le port de Beyrouth du 4 août 2020.

Jana revient soudainement à Beyrouth après une longue absence à Paris et reprend contact avec la vie familière mais étrange qu’elle avait quittée.

On a découvert Manal Issa en 2016 dans Peur de rien de Danielle Arbid où elle campait une jeune Libanaise débarquant à Paris pour tenter d’y trouver une liberté qu’elle n’avait jamais pu trouver dans son pays et de s’y intégrer par sa force de caractère que rien ne semblait pouvoir altérer. Dans Face à la mer, son personnage vit exactement le voyage inverse. Installée en France depuis des années, elle revient vivre dans son pays natal et tente de se reconnecter avec cette ville de Beyrouth qu’elle peine à reconnaître. Bad Trip absolu d’une impasse des personnages et de toute une société. Le film synthétise une inquiétude, un sentiment de perte, une dérive, une menace. Il témoigne d’une épreuve collective et envoie un ultime message de détresse. Pourquoi était-elle partie ? Pourquoi a-t-elle choisi de revenir ? Ces questions- là planent en permanence sur un récit qui ne cherchera pourtant jamais à y porter de réponses. Face à la mer s’affirme comme une expérience esthétique et sensorielle. On le vit dans la tête de cette jeune héroïne, incarnée avec une intériorité majestueuse par Manal Issa qui vit cette ville comme une sorte d’espace fantomatique dont les habitants à commencer par ses parents, dopés aux anxiolytiques, semblent dévorés par une léthargie grandissante pendant que la reconstruction incessante des grands ensembles, privent de plus en plus d’entre eux de vue sur la mer et donc d’horizon.

Ely Dagher fait ressentir cette ville autant ravagée par les guerres à répétition que par la gestion défaillante de ses dirigeants. Un geste envoûtant et hélas prémonitoire. Quelques semaines après le tournage, se produisait l’énorme explosion des entrepôts du port qui allait ajouter du chaos au chaos.

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LIBERTAD

De Clara Roquet
 Espagne 2022
Avec Maria Morera, Nicolle Garcia, Vicky Pena
C’est un été comme les autres. Vacances sur la Costa Brava chez une grand-mère dont les histoires moult fois rabâchées ne fonctionnent plus qu’avec la petite sœur, alors que Nora, du haut de ses 15 ans, se sent envahie par un mortel ennui, une étrange torpeur. Il n’y a plus qu’à prendre son mal en patience dans la prison dorée de cet univers bien protégé, rythmé par le tic tac du coucou trop vieux qui a fini par se détraquer. La vie progressivement semble rétrécir malgré les paysages de rêve, les conditions d’une classe sociale aisée qui a accès à toutes les distractions possibles. Les vacances, c’est l’impossibilité d’échapper à la présence permanente de la famille, l’impossibilité de respirer quelques bouffées de liberté avec les copines, de se raconter de vive voix les premiers baisers avec ou sans la langue, « mais comment tu fais avec ton appareil dentaire ? ». Toutes ces préoccupations qui passionnent plus les adolescentes que les virées en bateau avec ceux dont on aimerait s’émanciper.
À tout cela se superposent les angoisses et la jalousie de la mère de Nora, notamment envers son mari qui ne les rejoint pas mais surtout devant la place prise par Rosana, la bonne colombienne immigrée pour se faire une vie meilleure, qui seule semble avoir le pouvoir de rassurer l’aïeule.

Cela se dit dans l’intimité d’un craquage, mais pas officiellement et surtout pas devant les amis envers lesquels on affiche la haute bienveillance obligée de la classe supérieure. Ce malaise larvé se camoufle donc lorsqu’il s’agit de prendre la décision magnanime d’accepter que Rosana puisse accueillir sa fille du même âge que Nora et qui n’a plus nulle part où aller. Elle porte un des plus jolis prénoms du monde : Libertad. « Liberté », celle dont rêve justement Nora.

Libertad n’est d’abord qu’une ombre fugace et boudeuse que l’on aperçoit dans l’embrasure d’une porte. La jeune fille deviendra vite pour Nora un sujet d’attention et d’attraction, qui découvrira ainsi les conflits qu’elle a avec sa propre mère dont l’état servile la révolte sans doute, sans qu’elle sache l’exprimer clairement. En chiennes de faïence, les deux s’observent selon l’adage « chacune à sa place et les moutons seront bien gardés ». Le premier pas, c’est la petite bourgeoise qui le fera. D’abord un peu timidement face à cette fille du même âge mais qui a l’air tellement plus grande, tellement moins timorée et plus mature d’avoir déjà vécu. Progressivement Libertad la poussera à ne plus écouter ses peurs, à oser être. Regarder les garçons, les aborder, laisser parler une sensualité en train de devenir trop grande pour la contraindre dans un sage maillot une pièce de petite fille. Avec le goût de la révolte grandira une indéfectible amitié qui nourrira l’envie de briser l’ordre hiérarchique du monde, le plafond de verre invisible séparant les classes sociales.

La réalisatrice s’est inspirée de son propre passage à l’âge adulte dans un milieu privilégié. Elle en restitue l’ambiance avec une précision tranchante, jamais acerbe. Une fiction empreinte d’une analyse sociologique fine où se mêlent aux images d’Épinal celle d’une réalité plus populeuse et anguleuse. Les deux jeunes actrices incarnent les rôles principaux avec une fraîcheur sublime. Deux étoiles naissantes, à n’en pas douter.

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Women Do Cry

WOMEN DO CRY
• De Mina Mileva et Vesela Kazakova
• Bulgarie 2021/ 1H47
• Avec : Maria Bakalova, Ralitsa Stoyanova, Katia Kazakova
Le ton est donné dès le générique, écrit en grosses lettres comme sur une
banderole pour aller à la manif. Il y a de la colère dans l’air, une énergie
aussi, et la force de la solidarité : un programme radical pour ce film bulgare
aussi libre que passionné. À Sofia, on rencontre Ana, Veronica, Yoana, Lora
et Sonja, mères et soeurs formant une grande famille un peu toquée. Un seul
homme y a encore sa place, le père et grand-père. Les partenaires ou petits
amis ont fui, lâchement. Filles et petites-filles sont livrées à la solitude –
sauf Yoana, parce qu’elle est en couple avec une autre femme. La guerre des
sexes bat son plein.
Dans la pagaille sympathique de cette tribu, c’est la souffrance qui fait lien. Celle
de Sonja, qui se découvre séropositive, contaminée par celui qu’elle aimait. Celle
de Veronica, dépressive et agressive à force de s’occuper seule de son bébé. Celle
d’Ana, qui n’a jamais osé s’affronter au père quand il battait leur mère. La
violence est partout. Même dans les rues de la ville, où les Bulgares manifestent
pour dire leur peur que l’identité masculine disparaisse, l’estimant menacée par
la nouvelle notion de genre. L’espoir d’un réconfort revient le temps d’une virée à
la campagne, où l’on honore une sainte, protectrice de la femme. Mais, là aussi, la
tradition favorise le sexe fort.
Ce film féministe et au bord de la crise de nerfs, fantasque et très attachant, fait
du cinéma un langage très expressif. Les deux réalisatrices réussissent des scènes
marquantes, comme celle de la tentative de suicide de Veronica et toutes celles,
nombreuses, où l’on voit des animaux – cigognes symboles de maternité, chattes
représentant, expliquent les autrices, l’indépendance. Ces présences animales
parlent aussi de tendresse, de fragilité. Sous la franchise abrasive de ce regard sur
la condition féminine bulgare, une nostalgie de la tendresse fait vibrer ces
portraits de femmes à fleur de peau (Frédéric Strauss, Télérama
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PETITE NATURE

Petite Nature

Johnny, 10 ans, est un enfant frêle aux longs cheveux blonds. À la maison, il s’occupe de sa petite soeur. Sa mère picole pas mal. Elle est du genre à cogner facilement, y compris sur lui. Elle l’incite à être plus viril. Son père est parti. Il y a juste des amants de passage. Alors Johnny fait face. Il se débrouille, il a du répondant, il est futé. Il s’affirme avec ingénuité et lucidité. Et son instituteur lui apporte un cadre et du savoir. Johnny se prend de passion pour lui. La fascination devient attirance, désir sexuel. Ce n’est pas rien. Samuel Theis connaît le poids du tabou sur ce sujet- la libido chez l’enfant, au seuil de l’adolescence. Il l’affronte de manière sensible et responsable avec d’autant plus de sagacité qu’il associe clairement cette libido à un désir d’émancipation sociale. Johnny étouffe et ne supporte plus la trivialité de son milieu défavorisé. Marre de cette cité de Forbach, marre de la malbouffe. Assoiffé de savoir et de culture, il aimerait plus tard avoir un métier estimable, pas indigne comme celui de sa mère, dit-il. Aliocha Reinert impressionne en couvrant une large gamme de jeu, de la gêne au numéro de séduction, de l’émerveillement à la colère hargneuse. (D’après Jacques Morice,Télérama)

Samuel Theis traite cette histoire potentiellement « incorrecte » sans le moindre esprit sensationnaliste ou polémique, avec beaucoup de tact, de finesse, de justesse, un sens du tempo patient d’une narration et d’une cristallisation amoureuse, un rapport fort aux lieux et aux acteurs filmés : aux côtés de l’excellent Antoine Reinartz, Johnny et sa mère sont joués par des inconnus absolument remarquables. (Serge Kaganski, Transfuge)

C’est une histoire sur l’enfance, comment on la quitte, comment on grandit. Sur l’éveil à soi, aux autres, au désir. L’alchimie sensible entre Aliocha Reinert et Antoine Reinartz attrape le coeur. Comme il en est des chansons, voici une histoire douce, magnifiquement écrite, tournée et jouée. (Nathalie Chifflet, Dernières nouvelles d’Alsace 

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SOUS LE CIEL DE KOUTAISSI

SOUS LE CIEL DE KOUTAISSI

De Alexandre Koberidze

Georgie 2021:2H30/VOST

Avec Giorgi Bochorishvili, Ani Karseladze, Oliko Barbakadze, Giorgi Ambroladze

Lisa et Giorgi se rentrent dedans en pleine rue. Une première fois, puis une deuxième… C’est un début de comédie romantique comme on en a vu beaucoup au cinéma. Mais filmé ainsi, jamais : le coup de foudre est en effet cadré sur les chevilles des deux amoureux… Ce genre de trouvailles insolites — et séduisantes —, Sous le ciel de Koutaïssi en regorge. C’est une fable où des objets inanimés (une vieille plante, une gouttière…) sont pourvoyeurs de légendes et alertent les protagonistes de la malédiction qui plane sur eux. Une drôle d’expérience cinématographique où le réalisateur demande soudain à ses spectateurs de fermer les yeux, puis de les rouvrir après un signal sonore…

En dépit de, ou plutôt grâce à cette étrangeté récurrente, on s’attache très vite à Lisa, l’étudiante en médecine, et à Giorgi, le footballeur, frappés par le mauvais œil : le narrateur, dans un texte poétique, prévient que les deux amoureux vont se réveiller avec un physique différent, que leurs talents auront disparu, et qu’ils ne pourront jamais se retrouver. Lisa va donc devenir serveuse, Giorgi sera désormais incapable de taper dans un ballon… et les personnages vont changer d’interprètes.

Leur histoire d’amour maudit pourrait être tragique. Elle émerveille, autant par ses rebondissements tranquilles que par ses digressions buissonnières. Aleksandre Koberidze met régulièrement son récit sur « pause » — quitte à prendre parfois un peu trop son temps —, pour évoquer, entre regard documentaire et rêverie, le passé glorieux de la ville de Koutaïssi. Dans l’ancienne capitale de la Géorgie envahie d’une douce torpeur, il filme, magnifiquement, les enfants, les chiens, et la passion pour le football à l’heure de la Coupe du monde. Il rend, aussi, un bel hommage au cinéma à travers un « film dans le film » qui permet de voir la réalité autrement. Et, peut-être, de réenchanter le monde par la magie… Telerama Samuel Douhaire

: Il y a les films qui vont droit au but et ceux qui s’oublient sciemment en chemin, car c’est la divagation qui leur importe, la flânerie conçue comme principe poétique. De poésie, le second long-métrage d’Alexandre Koberidze, jeune cinéaste géorgien, né en 1984 à Tbilissi, en regorge. Non pas cette poésie autoproclamée qui tord la réalité sous l’effet d’un caprice d’auteur, mais celle qui se recueille directement à la surface des choses, si tant est que l’on veuille bien leur prêter attention.

Sous le ciel de Koutaïssi, révélé lors de la Berlinale 2021, le fut sous son titre international What Do We See When We Look at the Sky ? : « que voyons-nous quand nous regardons le ciel ? » Devinette en guise de frontispice qui traduit assez bien de quoi il retourne : du regard qui, comme le vent, se pose où il veut et transfigure tout ce qu’il touche, transformant le plomb en or et les grenouilles en princes. Le monde Mathieu Macheret

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Entre les vagues

ENTRE LES VAGUES.

de Anaïs Volpé- film francais – 1H39

 avec Souheila Yacoub, Déborah Lukumuena, Matthieu Longatte, Sveva Alviti, …

 Deux âmes sœurs inséparables, Alma et Margot, croquent la vie à pleines dents : elles n’en finissent pas de ne pas vouloir grandir et depuis toujours, elles veulent devenir comédiennes ; comédiennes, elles le sont déjà, elles le sont dans tous les petits jobs d’appoint qu’elles acceptent pour vivre : le tablier de serveuse, la blouse d’esthéticienne, ce sont, pour elles déjà des costumes ! L’occasion de jouer à être et à ne pas être.

Devenir actrice coûte que coûte, en faire un métier : entre deux services, les 2 amies courent les castings, espérant qu’un un jour, le vent tournera et un jour il semble qu’il tourne : Alma décroche un rôle dans une pièce de théâtre : elle y jouera le premier rôle, celui d’une jeune femme enceinte partant sur les traces de sa grand-mère italienne, immigrée à New York : clin d’œil aux déracinés, voyage dans le temps, voyage dans l’espace…le temps d’une pièce et… Margot sera sa doublure.

Et puis il y a les imprévisibles tempêtes de la vie, il en survient une et la chronique juvénile joyeusement débridée   devient mélodrame et seuls le jeu et la fiction vont sauver : ils vont permettre de se laisser ballotter par les flots, suivant le perpétuel mouvement des marées, sans toucher le fond.

Dans ce deuxième film, la réalisatrice filme Paris , ses quartiers cosmopolites, plein de vie, ses ambiances sonores, à l’image de ses deux comédiennes, dont l’énergie communicative , emporte tout sur son passage telle une tempête d humanité.

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