De Marie Amachoukeli, Claire Burger, Samuel Theis – France 2014 – 1h35
Avec Angélique Litzenburger, Joseph Bour, Mario Theis…
Une « party girl » c’est une entraineuse dans un cabaret. Angélique aime la fête… elle a passé sa vie à faire boire les hommes. A 60 ans, elle n’est plus vraiment désirée par eux, sauf par Michel… qui la demande en mariage. Après beaucoup d’hésitation, elle accepte, pensant aussi renouer les liens avec ses enfants. Mais comment tenir à long terme le rôle d’une femme « rangée » quand on ne l’a jamais été ? Quand on est à la fois généreuse et égoïste, libre et irresponsable, fleur bleue et romantique ? Samuel Theis a fait un film tendre et touchant, dans lequel sa mère joue son propre rôle, et ses frères et soeurs aussi.
Ce film a obtenu la Caméra d’Or du meilleur premier film au Festival de Cannes.
Elle a 60 ans, une voix de gamine, des cheveux en pagaille, du maquillage pour quatre et elle entend toujours plaire et faire la fête till the end of the night. Depuis quarante ans, elle gagne sa vie en buvant du champagne avec des hommes dans un cabaret à la frontière allemande mais aujourd’hui, les clients ne se bousculent plus au portillon. Michel, son plus fidèle habitué, amoureux depuis belle lurette, lui propose de l’épouser. Et si elle essayait de se ranger ? Et si elle essayait d’être une mère « normale » pour ses quatre grands enfants, voire une grand mère ?
Samuel Théis, l’un des trois co-réalisateurs et coscénaristes, raconte ici l’histoire de ce phénomène qu’est sa mère, jouée par « la vraie » Angélique, sans jamais la juger, sans mépris ni condescendance ni fausse tendresse amusée. Elle est généreuse et égoïste, libre et irresponsable, romantique et légère, elle a 60 ans et 15 ans tout à la fois. Il aurait pu en faire un documentaire (d’ailleurs, les enfants sont joués par les vrais enfants et le reste du cast est non professionnel – tous formidables) mais la puissance de feu romanesque d’Angélique est telle qu’il en a fait une fiction entre comédie romantique pas tout à fait rose et drame social jamais gris : le sublime portrait d’une vieille petite fille qui a décidé de ne pas être raisonnable. Première
Ce film ne laisse pas les critiques indifférents :
A Télérama Guillemette Odicino est « Pour » : ce Party Girl qui a remué le festival de Cannes et raflé la Caméra d’or est aussi un superbe mélodrame. Un peu comme si les frères Dardenne avaient mis en scène un scénario de Douglas Sirk… Changer de vie, croire à l’amour, même tardif, ou se persuader que les sentiments de l’autre sont suffisamment forts pour que le charme opère : des thèmes sans âge que Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Théis revisitent dans un style brut, vibrant. Et une empathie absolue pour tous leurs personnages, petites gens fâchés avec la syntaxe, anciens mineurs qui occupent leur retraite au stand de tir, ou « filles » plus ou moins jeunes qui dansent en string et se tiennent chaud entre elles.Et Louis Guichard est « Contre » : A ce degré de véracité brandie, garantie, le naturalisme rejoint le reportage, le magazine de société, la télé-réalité. Avec le même immense embarras quand arrivent les effusions : par exemple, les déclarations d’amour publiques d’Angélique, le soir de son mariage, à ses enfants (les vrais dans la vraie vie), et vice versa. Sur la spectaculaire Angélique, à la fois sombre et haute en couleur, on aurait aimé voir un documentaire, un portrait, mais pas cette reconstitution brute de décoffrage. Le naturalisme de Party Girl est si naïf, si épais, qu’il nous ramènerait à la formule prêtée à Rimbaud : « Rien n’est beau que le faux. »
A voir à lire : Dans un élan de liberté ultime, la « party girl », aussi rock’n’roll que pathétique, étonne jusqu’au bout. Insondable, elle ne laisse pas insensible et devient l’un des personnages de cinéma les plus intrigants vus cette année à l’écran.
Le Monde : Le scénario et la mise en scène font d’elle l’enjeu d’une lutte vieille comme comme la vie en société, entre le compromis et la liberté, la responsabilité et le désir. (…) une de ces vies qu’on ne voit jamais à l’écran.