Archives : Uncategorized

A PEINE J’OUVRE LES YEUX

Du 28 janvier au 2 février
Apeine j'ouvre les yeux 3De Leyla Bouzid – France – Tunisie – 2015 – 1h42
Avec Baya Medhaffar, Ghalia Benali…
L’histoire se passe à Tunis, durant l’été 2010, quelques mois avant la Révolution. Farah, une bachelière de 18 ans, croque la vie à pleine dents, tombe amoureuse, s’enivre et chante sur scène des chansons anti – gouvernementales au sein d’un groupe de rock engagé contre la volonté d’Hayet, sa mère qui, connaissant la Tunisie et ses interdits, vit dans la peur face aux agissements de sa fille. A travers le portrait de cette fille insoumise, c’est la soif de liberté et de révolte de toute une génération qui nous est montrée à quelques mois du printemps arabe. Avec ce premier long métrage attachant, Leyla Bouzid signe une réalisation dynamique et pertinente de sa Tunisie natale.
Ce film a déjà reçu de nombreux prix dans des festivals en particulier le prix du public à la Mostra de Venise.

Critique

La jeune réalisatrice tunisienne Leyla Bouzid situe l’action de son premier film quelques mois à peine avant la révolution de Jasmin, avec la volonté de faire ressentir ce qu’était la vie des Tunisiens – et particulièrement de la jeunesse – sous l’ère Ben Ali : « J’ai voulu revenir sur la sensation d’étouffement, la peur continue qu’on ressentait alors. Il ne faut pas oublier ces émotions. Je parle plus particulièrement de l’atmosphère des derniers mois du régime. Alors que la corruption rongeait tout, les gens étaient agressifs, ils évoluaient dans l’incertitude. C’était un peu une fin de règne. Tout cela explique, au moins en partie, énormément de choses, notamment les raisons de l’explosion qui ont conduit à la révolution ».
Tunis, été 2010. Farah est une jeune fille brillante qui vient de réussir son bac avec succès et que sa famille imagine déjà médecin. Mais Farah est aussi une fille à l’énergie débordante – et au caractère bien trempé – qui veut profiter de la vie et de sa jeunesse. Elle sort dans les bars, s’enivre, découvre l’amour dans les bras d’un musiciens du groupe de rock dans lequel elle chante des textes engagés, qui parlent des problèmes de son pays, de sa frustration et de ses rêves qui sont aussi ceux de ses compatriotes. Libre et impulsive, Farah s’oppose à la volonté de sa mère Hayet, qui connaît les interdits de son pays et tente de la protéger en l’éloignant de son groupe. Car dans la Tunisie de Ben Ali, Farah est considérée comme une rebelle, les membres de son groupe sont d’ailleurs surveillés par la police. Mais le désir de liberté est trop fort pour être contenu. Et c’est peu à peu les rouages de la machine répressive qui vont se refermer sur la jeune fille, symbole d’une jeunesse fière et vivante qui veut rester debout, mais risque d’en payer le prix…
« A peine j’ouvre les yeux » est donc le portrait d’une jeune fille trop libre pour un système autoritaire qui n’a plus d’autres solutions que la répression et la violence pour perpétuer son règne, étendard d’une jeunesse qui fera entendre sa voix quelques mois plus tard. Le film de Leyla Bouzid laisse une grande place à la puissance de la musique – rock inspiré des rythmes du mezoued, musique populaire tunisienne – et aux textes chantés par Farah. Et offre deux magnifiques personnages à deux sublimes actrices autour desquelles le récit se resserre peu à peu : la jeune Baya Medhaffar, dont c’est la première apparition, incarne Farah avec une énergie ébouriffante face à la célèbre chanteuse tunisienne Ghalia Benali, remarquable dans le rôle de sa mère Hayet. (Critique UTOPIA )
Ce film a reçu de nombreux prix dans des festivals en particulier le Prix du Public et le Prix Label Europa Cinémas à la Mostra de Venise.

Film présenté en collaboration avec Amnesty International.
Présence d’Amnesty et discussion après la projection de ce film le lundi 1ier février.

Publié dans Archives films, Uncategorized | Commentaires fermés sur A PEINE J’OUVRE LES YEUX

LES PREMIERS, LES DERNIERS

Du 11 au 16 février
Les premiers les derniers 1De Bouli Lanners – France Belgique – 2016 – 1H38
Avec Albert Dupontel , Bouli Lanners, Suzanne Clément…
Gilou et Colchise, deux types patibulaires et fatigués, vraisemblablement chasseurs de primes, amis inséparables, enquêtent sans entrain sur un vol de téléphone portable au contenu compromettant. Des personnages hyperincarnés et dépouvus d’âme, dans un décor sombre, plat, battu par le vent, qui semblent jouer aux cowboys et aux indiens… Film puissant sur l’ultramoderne solitude, et sur la violence qu’un monde sans codes sociaux de base pourrait faire naitre. Les acteurs, qui ont pris un plaisir évident à jouer ces héros grisâtres, sont impériaux.

Critiques

Utopia
Les deux héros sont deux hommes de main chargé par un mystérieux commanditaire de retrouver un téléphone volé contenant des informations compromettantes. Mais Gilou et Cochise ne sont pas des chasseurs de prime de toute première fraîcheur, aucune chance qu’on les confonde avec Steve Mc Queen, notamment Gilou (Bouli Lanners), affublé d’un petit chien ridicule et parfaitement incapable de courir plus de cent mètres sans risquer la crise cardiaque. Les voilà perdus dans la plaine de Beauce. Leur chemin va croiser un jeune couple de handicapés en fuite et une bande d’autochtones fort peu accueillants.
Au-delà de l’intrigue étonnante parce que jamais prévisible, la force du film tient au formidable duo Albert Dupontel / Bouli Lanners, parfaits en losers magnifiques unis à la vie à la mort par l’amitié et les galères. Et on n’oubliera surtout pas les rôles secondaires : Suzanne Clément, la comédienne fétiche de Xavier Dolan, Serge Riaboukine impayable en beauf brutal et borné, et les vieux sages Michael Lonsdale et Max Von Sydow dans des apparitions lumineuses. Visuellement le film est splendide : Bouli Lanners donne une dimension étique au paysage uniforme et monotone de la plaine beauceronne et en fait ressortir les étrangetés .

Le Monde
La fin des temps ressemble à un tableau de l’aurore du monde. Les derniers hommes ont la barbe longue et le peu de souci de l’esthétique vestimentaire qu’on imagine chez les premiers. Il n’y a plus de ville, mais des bâtiments vides qui tombent en décrépitude au milieu de la presque rase campagne noyée dans la brume. Des voies de chemins de fer qui n’ont pas vu de trains depuis des lustres, des animaux qui passent et que l’on chasse .Il y a Jésus. On a du mal à croire que c’est le vrai, mais il a, sur une main, l’un des fameux stigmates – et lorsqu’avec la fin des temps revient l’envie de croire, un stigmate, ce n’est pas rien. Au milieu de tout cela, des personnages, qui s’égarent plus souvent qu’ils n’avancent, questionnent plus qu’ils n’affirment, quand ils ne sont pas définitivement lassés des questions.
Héros errants. Noémie Luciani .

Première
De ces stéréotypes de Western, Bouli Lanners tire un film puissant sur l’ultramoderne solitude et sur la violence qu’un monde débarrassé des codes sociaux de base pourrait faire naitre…. Les acteurs ont semble-t-il pris un plaisir évident à jouer ce type de héros grisâtres, peu courants sous nos latitudes. Ils sont tous très brillants.

Publié dans Archives films, Uncategorized | Commentaires fermés sur LES PREMIERS, LES DERNIERS

AU-DELÀ DES MONTAGNES

Du 18 au 23 février
RGB tiff image by MetisIPDe Jia Zhang-ke – Chine – 2015 – 2h11 – VOST
Avec Zhao Tao, Zhang Yi, Liang Jing-dong…
L’histoire de trois jeunes gens, une femme et deux hommes, de 1999 à 2014 puis 2025, illustre l’évolution de la société chinoise, entre rêve d’ouverture à la vie dans le monde capitaliste et attachement aux traditions. Mais passer de la condition de sujet chinois à la condition d’individu du monde globalisé n’est pas sans poser des questions, et en particulier pour la génération suivante. Où pourrait mener ce déracinement ? Une fresque somptueuse qui interroge sur la Chine d’aujourd’hui et de demain.

Critique

Le réalisateur raconte l’histoire de trois jeunes chinois dans le monde d’aujourd’hui, sur un quart de siècle de 1999 à 2025, et nous montre une Chine qui s’ouvre à la société globale avec pour symboles l’entreprise individuelle, l’argent, l’international, la liberté hors sol, la sécurité. Et en fin de compte, il nous questionne sur ce qui ne concerne pas que la Chine : dans ce monde-là, comment va se construire l’identité des nouvelles générations ?
——————-

Propos de Jia Zhang-ke, récemment à Paris : «A chaque nouveauté technologique ou économique, je me demande comment tout cela a une influence sur nous. Avant, quand l’être aimé était à 50 km, on se lamentait. Aujourd’hui, il y a Facetime. Le discours amoureux évolue. Il y a des choses évidentes et d’autres, non. C’est ce que je veux montrer.»

«Mon père est mort en 2006 et ma mère s’est retrouvée seule. Régulièrement,  j’allais la voir et mon premier réflexe était de lui donner de l’argent. J’ai vu que ça la rendait presque malheureuse. C’était un signal pour moi : je reproduisais une violence, et il fallait que je la filme. Cette violence est moins évidente que celle de Touch of Sin, mais elle est aussi forte.»

«On rêve toujours de stabilité, d’amour, mais quand on réfléchit a posteriori, de quoi sont faites nos vies ? De bouleversements, de ruptures, de conflits, de changements… J’ai voulu filmer la façon dont les changements provoquent une déperdition. Quelques jours après la sortie, il y a eu deux faits divers. Un homme voulait assassiner son ami de la même façon que dans mon film. Et un haut fonctionnaire a été arrêté pour corruption. Dans les journaux, on a lu que son fils se nommait Cash. »

Toute la force émotionnelle d’Au-delà des montagnes réside aussi dans notre rapport étrange à la Chine. Ce pays immense, violent et fascinant, on ne le connaît que par le récit de ses catastrophes, ses drames humains, sa censure, le délire du développement économique. La grande réussite de Jia Zhangke est de parvenir, avec son humanisme, à faire de nous des habitants de cette zone, pour dépasser tout orientalisme ou exotisme, et à nous permettre de vivre entièrement cette fiction comme des témoins. (Extraits de Libération)

Publié dans Archives films, Uncategorized | Commentaires fermés sur AU-DELÀ DES MONTAGNES

45 ANS

Du 25 février au 1er mars
45 ans 2De Andrew Haigh – Britannique – 2015 – 1h35 – VOST
Avec Charlotte Rampling, Tom Courtenay, Geraldine James…
Kate et Geoff Mercer sont sur le point d’organiser une grande fête pour leur 45e anniversaire de mariage. Pendant ces préparatifs, Geoff reçoit une nouvelle : le corps de Katya, son premier grand amour, disparu 50 ans auparavant dans les glaces des Alpes, vient d’être retrouvé. Cette nouvelle va alors bouleverser le couple et modifier doucement le regard que Kate porte sur son mari…

Critique

Tout se joue sur un oui ou sur un non… Allongée, la nuit, dans le lit conjugal, Kate pose une question à son mari. Cette femme, disparue il y a un demi-siècle dans les glaces des Alpes et dont on vient de retrouver le corps, cette Katya dont il ne lui a jamais parlé, mais qui semble avoir eu une si grande place dans sa vie, l’aurait-il épousée, jadis, si elle n’était pas morte ?…
Sans la moindre hésitation, comme une évidence, Geoff lui répond « oui ». Et rien ne compte plus, soudain, pour Kate que ce oui. Tout s’écroule. Ce n’est pas vraiment de la jalousie, mais une brisure. Un brusque anéantissement. Comme si un virus, entré par effraction dans son organisme, détruisait à une vitesse folle toute sa mémoire et les souvenirs qu’elle y avait soigneusement sauvegardés.
Elle tente de réagir. Dans quelques jours aura lieu cette fête – pour leurs 45 ans de mariage, quelle ironie! – et il lui faut lancer les invitations, acheter des cadeaux. Elle essaie de se persuader que sa réaction était folle. Irraisonnée. D’ailleurs, la vie semble reprendre son cours…Mais le fantôme de cette rivale au prénom si semblable au sien ne la quitte plus. Elle s’interroge. Que d’hypocrisies, que d’impostures : elle se croyait l’élue, elle n’était que la doublure. Elle n’a servi à Geoff que de pansement, de remède contre ses doutes et ses angoisses. Elle hurle en silence.
C’est un film discret et terrible où le réalisateur a l’intelligence de faire du troisième âge non pas une génération molle et assoupie, mais ardente et tourmentée. La sagesse ? Un attrape-nigaud, un leurre que le moindre déchirement efface.

Tiré d’une nouvelle de l’auteur britannique David Constantine, le nouveau film d’Andrew Haigh (à qui l’on doit notamment Week-end, en 2011) a trouvé sa place au palmarès du dernier festival de Berlin, en février 2015. Ses deux acteurs principaux, Charlotte Rampling et Tom Courtenay y furent récompensés d’un double prix d’interprétation mérité.
Avant même sa sortie en salle, 45 ans, jouissait d’un intérêt qui devrait se confirmer, tant l’exploration fine du couple, à laquelle se livre le cinéaste, s’avère convaincante. Cette œuvre à la mise en scène sobre éclaire, dans le quotidien rural et cossu d’une campagne anglaise, l’insidieuse progression du doute entre un homme et une femme vieillissants, sur le point de fêter plus de quatre décennies de mariage…

Publié dans Archives films, Uncategorized | Commentaires fermés sur 45 ANS

Ixcanul

Du 3 au 8 mars
Ixcanul 2De Jayro Bustamante – 2015 – Franco-Guatémaltèque – 1h31
Avec Manuel Manuel Antún, Jayro Bustamante, María Mercedes Coroy…
Maria, 17 ans, vit avec ses parents, des paysans qui semblent communiquer avec les forces secrètes de la nature : ils font des offrandes à un volcan, comme à un dieu. Aux croyances et à la magie se mêle un sens terre à terre des intérêts et de la survie : marier leur fille à Ignacio, un responsable de la plantation de café où ils travaillent. La jeune Maria semble se soumettre à leur volonté mais son idée fixe est de partir loin, là-bas, de l’autre côté du volcan qui surplombe le village. Elle voudrait accompagner son ami Pepe qui veut tenter sa chance aux Etats-Unis. Elle tombe enceinte de Pepe, mais le jeune coupeur de café partira sans elle. En voulant éradiquer les serpents qui pullulent dans la plantation, elle se fait mordre et est transportée par Ignacio à l’hôpital de la ville… Avec ce très beau film, le jeune cinéaste bouscule son pays, le Guatemala, en mettant en scène une héroïne inédite : une jeune femme maya d’aujourd’hui dont la situation est celle d’un volcan qui s’éveille. Pour dénoncer son oppression.
Ours d’argent au Festival de Berlin.

Publié dans Archives films, Uncategorized | Commentaires fermés sur Ixcanul

Grimur Hakonarson

Grimur_Hakonarson_pic-400x250 Né en 1977  en  Islande  Réalisateur, scénariste

 Béliers

 Prix « Un Certain Regard »  Festival    de Cannes 2015

Entretien avec Grímur Hákonarson

Comment vous est venue l’envie d’écrire et de filmer l’histoire de ces frères brouillés et de leurs béliers ?

Mon film est basé en grande partie sur ma propre expérience du monde rural et sur la culture rurale islandaise. Mes deux parents ont été élevés à la campagne et j’y ai passé la majorité de mes vacances d’été, pour y vivre et y travailler, jusqu’à mes dix-sept ans. De ce fait, j’ai développé un goût pour les récits, les personnages et les paysages ruraux d’Islande. J’ai toujours été attiré par les histoires se déroulant à la campagne et «  Béliers » n’est pas le premier film que je tourne dans cet environnement.

Mon père a travaillé pendant un temps pour le Ministère de l’Agriculture. Ce fut également une source d’inspiration sur le fonctionnement de l’administration dans le domaine de l’agriculture et sur l’évolution du monde agricole au fil du temps. Une des décisions les plus difficiles que mon père ait eu à prendre concernait celle de supprimer ou non un cheptel, dans le cas de l’apparition d’une épidémie… (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs, Uncategorized | Commentaires fermés sur Grimur Hakonarson

Michel Leclerc

Né à Bures-sur – Yvette, Franceleclerc                                                                                     Scénariste, réalisateur                                                                                                    Le Nom des gens, La Vie très Privée de Mr Sim

 

Entretien avec Michel Leclerc

Comment avez-vous découvert le livre de Jonathan Coe dont s’inspire le film ?

Baya Kasmi, ma compagne et co-scénariste, l’a lu en premier et m’a dit que cela me correspondait et qu’elle y retrouvait beaucoup d’éléments de mon univers et de mes obsessions. Elle m’a encouragé à le lire à mon tour, mais j’ai mis du temps à accéder à sa demande : je traversais moi-même une période très difficile, de deuil, d’intense remise en question et de départ vers d’autres horizons. J’ai fini par lire le livre dans l’avion qui nous emmenait à Florence où nous avions décidé d’aller vivre (où le scénario a d’ailleurs été écrit). Ce livre avait donc un écho très particulier avec ma propre vie, et découvrir cet homme qui avait tout perdu et qui était en plein questionnement, m’a bouleversé : je me suis totalement identifié à lui à ce moment. Puis, j’ai eu la chance de pouvoir rencontrer directement Jonathan Coe et de le convaincre d’accepter cette adaptation… (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs, Uncategorized | Commentaires fermés sur Michel Leclerc

Thomas Bidegain

bidegain

1970

France

Scénariste, réalisateur

Les Cowboys

 

Le talentueux scénariste français Thomas Bidegain, qui a notamment travaillé avec Jacques Audiard sur Un Prophète (César du meilleur scénario original), De rouille et d’os (César du meilleur scénario adapté), Dheepan,  Joachim Lafosse (A perdre la raison) ou Bertrand Bonello (Saint Laurent), passe à la réalisation. Le scénariste multi-récompensé a répondu au HuffPost quelques jours après les événements qui ont déchiré la capitale.

Le HuffPost: Qu’est-ce qui a inspiré Les Cowboys?

Thomas Bidegain: Le film est en partie né d’un intérêt que j’ai eu pour cette vague de radicalisation qui a eu lieu au début des années 1990. Je me suis intéressé par exemple au gang de Roubaix qui a sévi en France à cette époque. Le gang était composé de gars convertis, partis faire la guerre en Bosnie, revenus avec plein d’armes et qui avaient semé la terreur dans le nord de la France pendant une dizaine de jours. C’est la première fois que j’entends parler du jihad et de ce que ça pouvait être. (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs, Uncategorized | Commentaires fermés sur Thomas Bidegain

BACK HOME

Back home 2De Joachim Trier – Norvège-France-Danemark – 2015 – 1h49 – VOST
Avec Isabelle Huppert, Gabriel Byrne, Jesse Eisenberg…
C’est un film beau et grave dont le titre était “Plus fort que les bombes”, transformé par le distributeur après les attentats. Trois ans après la mort inattendue d’une photographe de guerre, une exposition sur son travail réunit son mari et ses deux fils qui ne se sont pas vus depuis longtemps. Le passé, avec sa rafale de révélations, est explosif et force les trois hommes à se découvrir sous un nouveau jour. La mort est une bombe à retardement. Revenue chez les siens par flash-back, Isabelle Huppert est impressionnante, et les deux garçons passent sous nos yeux de l’enfance prolongée à l’âge adulte, celui des peines inguérissables. Tout cela est raconté sans psychologisme, seulement l’exploration d’un traumatisme. Ce qui est caché frappe plus que ce qui est montré.
Sélection officielle Cannes 2015

Critique

C’est l’un de ces films qu’on n’attend plus, et qu’on est heureux de voir : élégant, sensible, pastel. Tout se passe en courants d’amour invisibles, entre un homme esseulé, un fils adulte qui vient d’avoir un bébé, un autre fils adolescent que l’avenir et le passé tourmentent. Au centre, une femme invisible : Isabelle Reed (Isabelle Huppert), photographe de guerre morte dans un accident de voiture. Un galeriste organise une expo, et les souvenirs remontent, flottent comme des brumes, s’entrecoupent de rêves abrupts, de confidences amères, de silences chargés de munitions. Peu à peu, différentes vérités s’empilent : Isabelle Reed s’est suicidée, Isabelle Reed avait un amant, Isabelle Reed portait la guerre en elle… Joachim Trier capte des choses invisibles, des fils d’araignée qui se tissent entre un père et ses deux fils : jalousie, rage, amour, illusion…

Il y a, chez Trier, un écho du cinéma d’Antonioni, en plus doux, en plus attentif. Back Home est une œuvre soyeuse qu’on laisse s’installer, comme une petite sonate entêtante : et puis, peu à peu, la poésie des regards, les couleurs de la vie, la mélodie de la mémoire triomphent.

Publié dans Archives films, Uncategorized | Commentaires fermés sur BACK HOME

BÉLIERS (Hrútar)

Béliers 3De Grimur Hakonarson – Islande – 1h30 – VOST
Avec Sigurður Sigurjónsson, Theodór Júlíusson, Charlotte Boving…
Béliers se situe dans une vallée isolée du centre de l’Islande dans des paysages à couper le souffle. Dans ces contrées, l’élevage des moutons est comme une religion. Ces béliers font l’objet de concours fort réputés. Parmi ces éleveurs, deux bergers sont au centre du film : Gummi et Kiddi, tous deux sexagénaires et célibataires. Ils vivent dans des fermes voisines et ne s’adressent plus la parole depuis fort longtemps. Cette situation qui flirte avec l’absurde va prendre un tour plus dramatique quand la maladie de la tremblante va être repérée chez les bêtes de Kiddi. Ce formidable Béliers commence comme une comédie à l’humour très scandinave, autrement dit décalé, introverti, désarçonnant et qui nous rend immédiatement attachants ces étranges personnages qui vivent franchement hors du monde… et puis le film prend une autre dimension, plus lyrique, plus grave et s’ouvre à une ample réflexion sur le rapport de l’homme à la nature, de l’humain à l’animal, sur le lien fraternel qui peut renaître dans l’adversité. La mise en scène exalte à merveille la beauté dantesque de ces paysages incroyables, qui rendent plus impressionnant encore le combat des hommes, particulièrement dans une scène finale stupéfiante d’émotion et de force.
Prix Un certain regard au Festival de Cannes 2015

Critique

L’histoire se déroule en Islande, dans un petit village isolé. Gummi et Kiddi, deux frères éleveurs de moutons, vivent comme des voisins mais ne se parlent plus depuis une quarantaine d’années. Une vieille brouille sépare en effet ces frères qui remportent tous les prix de la région grâce un élevage familial qu’ils se partagent depuis toujours. Chacun vit tout seul dans sa ferme à côté de celle de l’autre. Mais tout est bouleversé quand une maladie frappe le troupeau de Kiddi et attire les autorités sanitaires. Tous les troupeaux sont menacés d’abattage. Le lignage ancestral de la race des béliers s’éteindrait alors et Gummi et Kiddi n’y survivraient pas. Pour eux, il est peut-être temps de briser la glace.

Comme ses personnages, ce film a « de la gueule ». Tout en jouant la chronique villageoise et les querelles de clocher à l’ancienne, le jeune réalisateur, Islandais de souche, déploie une mise en scène actuelle et stylée. Les vastes paysages de son pays semblent lui avoir donné un sens inné de l’espace. Sa parfaite connaissance des hommes du terroir porte ses fruits : le tempérament rugueux des deux frères ennemis est presque palpable. Comme leur tendresse, qu’ils n’expriment qu’en bichonnant leurs bêtes…

Le pari réussi de Grímur Hákonarson consiste à montrer une réalité difficile sous un jour plaisant. Ce qu’illustre cette scène où Gummi transporte Kiddi, retrouvé complètement saoul et à moitié gelé au fond d’un fossé, dans une pelleteuse. Il le dépose devant l’hôpital local comme on déverserait un tas de fumier. La vacherie de la vie d’un côté et, de l’autre, un sentiment d’humanité qui persiste, voilà l’attelage idéal pour une comédie qui souffle habilement le chaud et le froid. Et prend parfois des airs de conte de Noël. — Frédéric Strauss

Tourné dans les sublimes paysages de l’île de feu et de glace, le réalisateur nous offre une chronique familiale rude et froide, à l’image de ces grandes étendues enneigées qui entourent les bergeries. Mais au-delà du drame fraternel, le film esquisse le quotidien de ces villages reculés, où la solitude est omniprésente dans ces chaumières, où l’on vit et l’on meurt au même endroit sans jamais avoir cherché à le quitter. Sauf que le cinéaste porte un regard bienveillant sur ce microcosme rural, sur ces êtres qui sacrifient tout pour leur bétail et qui donnent tant d’amour à leurs animaux.

Prix « Un certain regard » au festival de Cannes 2015

Publié dans Archives films, Uncategorized | Commentaires fermés sur BÉLIERS (Hrútar)