De David ANDRE – France – 2014 – 1h 22
Avec les lycéens Gaëlle Bridoux, Nicolas Dourdin, Rachel Motte, Caroline Brimeux, Alex Margollé, Alice Dutertre et leurs parents…
Marier la comédie musicale au documentaire relève d’un coup de force esthétique ; de ces deux modes de représentation, David André a tiré l’originalité de Chante ton bac d’abord, qui se concentre sur un groupe d’élèves de terminale d’un lycée de Boulogne-sur-Mer. Trois filles et deux garçons, qui nous séduisent d’autant plus que, à la finesse d’observation dont le documentaire témoigne, s’ajoute une dimension particulière induite par les chansons. Onze titres, écrits par David André à partir de leurs propres mots et qu’ils chantent d’une voix plus ou moins assurée, livrant leurs états d’âme avec une justesse jamais prise en défaut. Ce procédé se révèle un puissant mode d’expression de l’intime, propice à la pleine expression de leurs sentiments. Au point qu’à la fin du film, on se surprend à avoir de la peine à les quitter.
Critique
En ce mois de septembre 2012, David André, réalisateur couronné du prix Albert Londres pour « Une Peine Infinie » entame le tournage de « Chante ton Bac D’Abord ». L’histoire de cinq copains du lycée Mariette de Boulogne-sur-Mer, de leur année de terminale L.
Cent jours durant, ils vont être escortés par le documentariste, un preneur de son, le caméraman. Du petit matin frisquet, où l’on attend son bus, aux fêtes du week-end, en passant par les vagabondages des cours séchés, la caméra tourne. Mais le réalisateur ne s’est pas contenté d’en faire un film documentaire classique. Tel le facteur cheval, à force de glaner les petites perles qui sortaient de la bouche de ces jeunes, il a fini par harmoniser une partition à plusieurs mains et plusieurs voix en y intégrant la réflexion et l’inventivité de ses sujets. Son rêve de cinéaste devenant réalité partagée, construction collective. C’est un film qui ne ressemble à rien de ce que l’on a vu avant, délicieusement inclassable. Le choix d’insérer des parties chantées dans le récit pouvait sembler casse-gueule mais ça fonctionne parfaitement, comme une évidence. Et on est happé dès les premières images par ce formidable docu-comédie-musicale dans lequel chaque jeune dit, chante, enchante, interprète l’histoire de sa vie. On est passionné par la parole libre et sincère des jeunes, touché par la pudeur et le tact de la caméra, attentive à ne pas trop caricaturer, à ne pas pénétrer trop loin dans le jardin secret de chacun…C’est de part et d’autre une grande leçon d’humanité, de respect, loin des inévitables conflits intergénérationnels.
On les voit évoluer, tous solidaires, attachants et drôles, au fil des quatre saisons qui se succèdent avec l’évidence d’un concerto, avec en toile de fond la grisaille d’une ville du nord (Boulogne-sur-Mer) qui souffre du chômage dû à la désindustrialisation. Une chronique en temps réel, poétique, politique dans le sens noble, humain du terme. C’est beau, diantrement émouvant, porteur d’espoir tant il est vrai que les lycéens portent en eux une vraie force de vie qui refuse de se plier aux fourches caudines d’une civilisation qui semble partir en ruine.
Peut-être la vie appartient-elle à ceux qui la rêvent ?