Ciné Mont-Blanc
A ne pas rater !!
/!\ Le prochain Coup de Coeur Surprise aura lieu le Lundi 2 Juin 2025 à 20h00. A l’issue de la projection, nous vous proposons de partager nos impressions autour d’un verre.
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Chili 1976
CHILI 1976 de Manuela Martelli – Chili – 1h35 – VOST Avec Aline Kuppenheim, Nicolas Sepulveda, Hugo Medina, Alejandro Goic…
1976, soit trois ans après le coup d’État qui, avec l’appui des États-Unis, a renversé le gouvernement du Président Salvador Allende et porté Augusto Pinochet à la tête du CHILI, la junte militaire tient le pays en coupe réglée. Interdiction des syndicats et des partis politiques, couvre-feu, abolition de la liberté de la presse, censure, traque des opposants… La limitation drastique des libertés individuelles, l’instauration d’une dictature féroce sont le terreau sur lequel peut fleurir le fameux « miracle » chilien, qui fait le bonheur et l’admiration des chantres de la libéralisation à marche forcée de l’économie. La bonne bourgeoisie chilienne, qui en est la principale bénéficiaire, s’accommode fort bien d’un régime musclé qui, au nom de la lutte contre le communisme, intensifie la répression contre ses opposants, arrêtés, exilés, torturés ou exécutés.
Carmen (remarquable Aline Küppenheim), fait partie de ces privilégiés qui vivent plutôt bien sous Pinochet. Mère et grand-mère comblée, fière épouse d’un chirurgien renommé, catholique sincère, elle regarde sans vraiment la voir la violence d’État qui s’exerce à tous les coins de rue. Comme elle côtoie sans vraiment la comprendre l’opposition qui tente de s’exprimer, aussitôt muselée, réprimée. Pour l’heure, sa principale occupation consiste à superviser les travaux d’aménagement de sa résidence secondaire en bord de mer. Là, à l’écart du bruit et de la fureur de la capitale, vont et viennent ses enfants et petits–enfants, pour d’insouciantes retrouvailles familiales, tandis qu’elle consacre son temps libre à ses bonnes œuvres aux côtés du brave curé de la paroisse. Lequel brave curé lui demande un beau jour de prendre soin avec lui d’un jeune homme, grièvement blessé, qu’il héberge en grand secret. Toute dévouée à sa morale chrétienne et en cachette de sa famille, Carmen prend en charge le garçon, dont le prénom n’est vraisemblablement pas le prénom,dont l’histoire n’est sans doute pas exactement celle que lui a contée le prêtre. Et à son contact, elle commence à entrevoir l’envers du décor du « miracle » chilien.
Écrit et réalisé comme un polar intimiste (d’après le récit autobiographique d’une grand-mèrechilienne), le film de Manuela Martelli brosse, avec délicatesse et une belle palette de nuances, le portrait de Carmen – et à travers elle celui du CHILI de ces années-là. Par petites touches, la réalisatrice raconte les ambiguïtés, les antagonismes d’une bonne société pour qui la peur-panique du communisme a justifié l’instauration d’un État d’urgence et permet toutes les exactions – mais se marie difficilement avec les préceptes de l’Église. Laquelle est violemment partagée entre une hiérarchie réactionnaire proche du pouvoir militaire et une base, prêtres, curés, largement gagnée au courant de pensée de la théologie de la libération – dont, sans que ce soit formellement dit, le curé de village qui « embrigade » Carmen serait une représentation. Tout en subtilité, le film évite adroitement l’écueil du drame psychologique et moralisateur en utilisant les codes du thriller, musique entêtante, suspense, rares et efficaces effets de surprise. Il oscille ainsi entre moments de tension intense et description sociale minutieuse, pour raconter l’histoire d’une femme qui s’éveille sur le tard aux réalités qui l’entourent, alors que son pays tout entier va durablement étouffer sous une chape de plomb. Un portrait de femme, profond et délicat, qui va acquérir, dans la douleur, une conscience politique.
Les années 1970-1980 ont beaucoup inspiré le cinéma chilien (Tony Manero, No…) mais passeulement (on se souvient de Colonia réalisé par Florian Gallenberger).
– Critique d’UTOPIA –
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Stephen Frears
Né à Leicester le 20 juin 1941
Grande-Bretagne
Réalisateur , producteur
Les Liaisons Dangereuses, Hight Fidelity, The Queen, Tamara Drewe, Philomena, Confident Royal, The Lost King.
Stephen Frears : « J’ai eu un bon parcours. Mais tout ça, ça se termine »
Le réalisateur britannique de « The Queen » et, aujourd’hui, de « The Lost King » se réclame de Billy Wilder et revendique le droit à la moquerie. Entretien. (suite…)
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Clément Cogitore ( Goutte d’Or )
France
Artiste, réalisateur
Ni le Ciel ni la Terre, Braguino, Goutte d’Or
Révélation de la Semaine de la Critique cannoise 2015 avec son premier long Ni le ciel ni la terre [+], Clément Cogitore a opéré un retour spectaculaire en séance spéciale de la même section parallèle au 75e Festival de Cannes avec son second opus, Goutte d’Or.
Cineuropa : D’où est venue l’idée d’une histoire centrée sur médium ?
Clément Cogitore : J’ai longtemps vécu dans le quartier de la Goutte d’Or, à Paris, cela me fascinait et cela m’a évidemment inspiré le film. À partir de ce geste très simple, presque un cliché du quartier, de ces gars qui distribuent des tracts pour des médiums au pied du métro à Barbès, l’idée m’est venue de faire commencer l’histoire là. Mais je voulais surtout travailler sur un personnage qui est dans la manipulation des informations, qui joue sur les systèmes de croyances. (suite…)
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Dalva
DALVA
Film de Emmanuelle Nicot – France, Belgique -1h20
Avec Zelda Samson, Alexis Manentti, Fanta Guirassy…
Emmanuelle Nicot réalise avec Dalva son premier long. Au delà de ses premiers pas dans la mise en scène autour de deux courts-métrages, elle est connue comme directrice de casting. Le choix d’une actrice pour soutenir tout un film est évidemment fondamental, d’autant plus quand il est question d’une pré-adolescente au passé lourd. Zelda Samson est Dalva, personnage qui donne son nom au film et le contient tout entier. On la rencontre au moment de la séparation forcée avec son père abusif, dans les cris et la violence. C’est autour du thème très délicat de l’inceste que tourne ce film, mais plus précisément des différentes étapes qui suivent le placement d’une jeune fille qui n’a aucun repère de sociabilité.
Dalva a vécu recluse avec son père, en fuite permanente pour ne pas avoir à affronter le regard de la société, jusqu’à perdre la trace d’une mère qu’elle considère de fait démissionnaire. La première réussite de la réalisatrice est de ne jamais juger ses personnages.Quand Dalva défend son père, le recherche à corps perdu, la caméra la regarde, tente de comprendre les mécanismes qui amène une enfant à se construire autour d’un tel interdit. Les discussions engagées avec elle tentent de décortiquer la rhétorique de l’enfermement dans la seule réalité jamais proposée. Comment comprendre le monde quand on ne le connais pas ? Pourquoi ce que l’on vit serait une transgression quand on n’a jamais été confronté au bien et au mal et à la vie en communauté ? Ces deux questions jalonnent les premières séquences de l’arrivée de Dalva dans ce foyer qui devient son seul refuge.
La progression de l’histoire, tout comme l’écriture du film, est très graduelle. Il y a à la fois de la douceur et de la pédagogie dans la démarche d’Emmanuelle Nicot. Elle transmet plusieurs idées fortes et nécessaires, avec tout d’abord celle qu’il faut du temps à un enfant pour sortir des logiques qui ont nourri toute son éducation. La transformation de Dalva se diffuse sur tout le film, d’abord pour donner le change à ses éducateurs, qu’elle considère comme ses geôliers, puis comme une possibilité réelle quand elle se fait sa première amie au sein du foyer. La solidarité et l’acceptation qui y règnent sont particulièrement touchantes et bien représentées. Il ya une vie dans ce lieu où tous et toutes ont en commun d’être différents, salis pour reprendre les mots de Samia, l’amie et confidente, et une autre avec le monde extérieur, représenté notamment par l’école.
Mais le film pose également en creux une critique du système de « réinsertion » de ces enfants en proue à des difficultés extraordinaires. Le personnage de Jayden, joué par le très convaincant Alexis Manentti, est le point de rencontre de ces contradictions. Dur et froid avec ses protégé.e.s, il sait aussi se montrer critique face à une principale de collège aux propos discriminatoires, montrant du doigt l’hostilité vis à vis de ces enfants qui sortent de la norme et menacent l’équilibre des « normaux ». Son visage couturé de cicatrices et sa rudesse laissent à penser que le propre passé de cet homme le rapproche de ceux à qui il donne son temps, des parloirs en prison jusqu’aux nuits à veiller au sein du foyer. L’absence de solutions pour les enfants comme Samia, consciente des impasses qu’on lui présente, est également un noeud d’émotions particulièrement fort et bouleversant.
Cette amie au caractère tempétueux qui fait réaliser à Dalva qu’elle possède une porte de sortie pour se reconstruire : une mère aimante prête à la recueillir et lui donne cette nouvelle chance dont telle a tant besoin. Emmanuelle Nicot dresse, en une heure trente, un portrait saisissant qui ne tombe jamais dans le misérabilisme ou l’apitoiement, préférant décrire avec subtilité le processus long et douloureux d’une renaissance et d’un espoir pour les grands blessés peuplant les foyers pour l’enfance.
Critique Le Bleu du Miroir.
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De Grandes Espérances
DE GRANDES ESPERANCES
DE SYLVAIN DESCLOUS
Avec Rebecca Marder, Benjamin Lavernhe, Emmanuelle Bercot…
De Grandes Espérances raconte l’histoire de Madeleine et Antoine, un jeune couple plein d’espoir et d’ambition, qui préparent ensemble leurs imminents oraux de l’ENA. Alors en visite chez le père d’Antoine dans sa maison en Corse, les deux politiciens en devenir montrent fièrement leurs idées progressistes et leurs projets pour le futur à une classe politique plutôt réfractaire. Mais ces espoirs volent en éclat lorsqu’une altercation éclate sur une route, vire au drame et que Madeleine et Antoine décident de dissimuler les preuves de leur culpabilité. De retour à Paris, la jeune femme est recrutée par Gabrielle Dervaz, députée socialiste ex-ministre qui voit en elle sa conseillère personnelle. Mais le drame qu’ils ont tenté de laisser en Corse va finir par les rattraper…
Le long-métrage est construit comme un thriller politique sous tension, où les traumatismes et les fantômes planent au-dessus de ses deux personnages principaux. Madeleine est d’ailleurs le point de vue polarisateur du film, faisant tourner toutes ses thématiques autour de son interprète Rebecca Marder qui excelle de bout en bout (elle confirme cette année après sa performance savoureuse dans le Mon Crime de François Ozon son talent puissant et intelligemment protéiforme). La comédienne trouve ici un rôle sombre, celui d’une jeune étudiante en politique aux ambitions d’excellence qui verra ses espoirs basculer lorsqu’un drame et ses conséquences terribles s’abattront de plein fouet sur elle, sur sa famille et sur sa carrière. Desclous et Pierre Erwan Guillaume (qui signent le scénario) composent alors une fresque politique en pleine décrépitude, faisant glisser le ton du film entre le polar nerveux lorsque les mensonges menacent, le récit dramatique amené par les relations entre les personnages et le thriller à tendance horrifique qui fait planer les fantômes de certains traumatismes. C’est à ces égards que De Grandes Espérances plantent autant de graines riches en thématiques fortes, en évoquant notamment l’émergence d’une nouvelle génération politique qui cherche à coup d’idéaux et de valeurs assumées à faire sauter les bâtiments idéologiques préétablis. Leurs alignements à gauche du spectre politique installés dès la discussion d’ouverture, le film peut alors se permettre de scruter l’âme humaine en utilisant particulièrement le personnage d’Antoine. Ce dernier, traitant son traumatisme par la fuite, agit en miroir par rapport à Madeleine, qui bâtissent ensemble une dualité idéologique creusant le cœur du long-métrage.
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Goutte d’Or
Du 13 au 18 avril 2023
GOUTTE D’OR
de Clément COGITORE,FRANCE (1h38)
Il s’appelle Ramsès et la Goutte d’Or est son royaume. Au pied du métro Barbès, ses rabatteurs appâtent le client, distribuant par milliers des petits papiers imprimant une promesse: «Médium». Ramsès reçoit, dans une pénombre travaillée à la bougie, des endeuillés prêts à payer en liquide pour des nouvelles de leurs chers disparus. Sa petite entreprise ne connaît pas la crise, d’ailleurs ses concurrents du quartier, voyants et autres «professeurs» d’origines diverses, lui reprochent de rafler leurs parts de marché. Ramsès s’en fiche, business is business.
Sa prospérité s’explique: il est bon, bluffant même. On jurerait que les morts lui parlent pour de vrai, d’une mamie retrouvée dans l’au-delà, d’une maison aux volets bleus, de souvenirs précieux, d’amour et de pardon. Le soir, dans un gymnase, Ramsès se produit en public, micro en main, mystifiant des familles éplorées de ses murmures consolateurs. «Je fais des petits spectacles. Quand les gens sont contents, ils reviennent», résume en coulisses le mage qui ne croit pas à la magie. Car il y a un truc, évidemment, une arnaque bien huilée que Goutte d’Or révèle habilement, sans hâte, sans rire mais qu’il n’a aucune envie de raconter aux gamins de Tanger qui font irruption dans sa vie. Moineaux livrés à la rue, à la drogue, à la violence, ils ont eu vent de ses talents et, au moins aussi effrayants que les Oiseaux de Hitchcock, exigent qu’ils retrouvent un copain envolé.
Clément Cogitore réalise une exploration fiévreuse, hallucinée presque, d’un arrondissement parisien en mutation, un coin du 18ème populaire allant de Barbès à la Porte de la Chapelle, entre trottoirs bondés et colossaux chantiers d’urbanisation, misère noire des mineurs exilés et inéluctables lendemains gentrifiés. (…) Le réalisateur nimbe la dureté de Goutte d’Or d’une beauté onirique, tandis que l’excellent Karim Leklou (Ramsès), tout en opacité, colère et cynisme rentrés, troque la tristesse mesquine de son personnage contre la possibilité d’un émerveillement. Un rai de lumière dans les ténèbres.
Extraits de la critique de Marie Sauvion, Télérama
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The Lost King
Un film de Stephen Frears
Angleterre. 1h49 – VOST
Avec Sally Hawkins, Steve Koogan…
C’est le genre d’histoire incroyable dont nos voisins d’outre-Manche semblent avoir le secret, bien gardé au fond d’un cul-de-basse-fosse de la Tour de Londres
Dans les années 2010, se crée à Édimbourg une société Richard III, immortalisé par Shakespeare dans sa pièce célèbre comme un roi bossu et cruel ayant fait assassiner ses jeunes neveux pour s’emparer du trône. Autant dire que le dernier souverain de la dynastie Plantagenêt, mort au combat à la fin du XVe siècle et dont le corps aurait été jeté dans la rivière traversant la ville de Leicester, a une réputation quelque peu entachée.
Suite à une représentation du Richard III, Philippa Langley, une modeste employée, se passionne pour l’histoire de ce roi décrié, bien décidée à prouver que le vrai Richard III n’était pas le sinistre sire qu’ont fixé pour la postérité ses successeurs les Tudors. Elle rejoint donc la société locale Richard III. Mais contrairement à ces collègues plus modestes et moins téméraires qui se contentent de quelques articles dans la publication mensuelle, elle plaque tout pour se donner une mission : trouver l’emplacement de la dépouille de Richard III dont elle est persuadée qu’il est enterré dans une église détruite depuis. Et on n’imagine pas ce qu’une simple passionnée d’Histoire anglaise est capable d’obtenir à force d’intelligence, de ténacité et de connaissances acquises sur le tas !
Cette histoire savoureuse (excellent scénario co-signé par Steve Coogan, qui joue le rôle de l’ex – mari et premier soutien de Philippa) est mise en scène par l’expérimenté et polyvalent Stephen Frears, qui a déjà tâté de la royauté avec les très plaisants The Queen (starring Helen Mirren dans le rôle d’Élisabeth II) et Confident royal (avec Judy Dench en Reine Victoria).
Et la reine de l’affaire est la pétulante Sally Hawkins, qui incarne formidablement l’obstination parfois drolatique de cette citoyenne ordinaire que personne ne voulait croire et qui mit un pied dans la grande Histoire, à la surprise de ses proches et au grand dam des institutions universitaires.
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Programmation Avril Mai 2023
Du 6 au 11 Avril
DE GRANDES ESPÉRANCES
De Sylvain Desclous – France – 2022 – 1h45
Avec Rebecca Marder, Benjamin Lavernhe, Emmanuelle Bercot…
En course pour l’ENA, Madeleine et Antoine, en couple, en ont l’envie chevillée au corps, avant qu’une altercation qui tourne au drame sur une route corse avec un habitant du cru vienne briser leur irrésistible ascension. Le réalisateur connaît la politique et ses coulisses. Il le confirme dans sa manière de camper les situations, de trouver des échos dans l’histoire récente de la gauche. Mais le film transcende le cadre de la politique. A travers le personnage de Madeleine qui rêve de mettre à mal le capitalisme, il raconte comment, passé un certain seuil, tous les coups sont permis pour faire passer ses idées.
Du 6 au 11 Avril
DALVA
De Emmanuelle Nicot – France/Belgique – 1h20
Un premier long sur le thème de l’inceste à travers une enfant de 12 ans, trop maquillée et court vêtue pour son âge, soudain retirée du domicile paternel… contre son gré et sans qu’elle en comprenne la raison. Un film raconté à la hauteur de sa jeune héroïne et qui va gratter là où ça fait mal, comme dans ces moments où la petite fille défend ce père qui l’a abusée et qu’elle continue à aimer inconditionnellement. C’est à travers son regard que l’on vit son long chemin vers une deuxième vie, celle d’une gamine de son âge, grâce à des éducateurs qui lui font découvrir ce monde de l’enfance qu’au fond elle ne connait pas. Le portrait d’une renaissance. Film récompensé à la Semaine de la Critique 2022.
Du 13 au 18 Avril
GOUTTE D’OR
De Clément COGITORE, France -1h38.
Avec Karim Leklou, Jawad Outouia, Elyes Dkhissi, Malik Zidi.
Le cinéaste nous emmène dans une exploration fiévreuse et onirique du célèbre quartier de la Goutte d’Or à Paris, avec le Médium Ramsès, qui reçoit, dans une pénombre travaillée à la bougie, des endeuillés prêts à payer en liquide pour des nouvelles de leurs chers disparus. Sa petite entreprise ne connaît pas la crise. Sa prospérité s’explique: on jurerait que les morts lui parlent pour de vrai, de souvenirs précieux, d’amour et de pardon. Il fait aussi des petits spectacles qui rendent les gens contents et reviennent. Mais un jour, des gamins de Tanger, moineaux livrés à la rue, à la drogue, à la violence, sont attirés par ses talents pour retrouver un copain envolé
https://cinecimes.fr/clement-cogitore-goutte-dor/
Du 13 au 18 Avril
THE LOST KING
De Stephen Frears – Angleterre – 1h49 – VOST
Avec Sally Hawkins, Steve Koogan…
Dans ce récit contemporain inspiré d’une histoire vraie, l’historienne amatrice Philippa Langley , longtemps regardée de haut parce que femme et non professionnelle, cherche à retrouver la dépouille perdue du roi mal-aimé Richard III et à réhabiliter ce monarque du XVe siècle face à l’image populaire, notamment transmise par la célèbre pièce de Shakespeare, qui le décrit comme un être malfaisant. Avec beaucoup d’humour, le film dresse le portrait d’une héroîne modeste, handicapée par un syndrome de fatigue chronique mais portée par une intuition étonnante.
https://cinecimes.fr/stephen-freears/
Du 20 au 25 Avril
SUR L’ADAMANT
De Nicolas Philibert/France/1H49/Documentaire.
L’Adamant est un Centre de Jour unique en son genre : c’est un bâtiment flottant. Édifié sur la Seine, en plein coeur de Paris, il accueille des adultes souffrant de troubles psychiques, leur offrant un cadre de soins qui les structure dans le temps et l’espace, les aide à renouer avec le monde, à retrouver un peu d’élan. L’équipe qui l’anime est de celles qui tentent de résister autant qu’elles peuvent au délabrement et à la déshumanisation de la psychiatrie. Ce film nous invite à monter à son bord pour aller à la rencontre des patients et soignants qui en inventent jour après jour le quotidien. Ours d’Or à Berlin en février 23 .
CHILI 1976
De Manuela Martelli – Chili – 1h35 – VOST
Pour son premier long, Manuela Martelli remonte le temps jusqu’en 1976, année considérée comme l’une des plus sombres du régime de Pinochet alors au pouvoir depuis trois ans. Et c’est ce pan douloureux de l’histoire de son pays qu’elle explore dans les pas d’une héroïne presque malgré elle, l’épouse d’un médecin qui, en acceptant d’aider en secret un jeune révolutionnaire, à la demande d’un prêtre, va se retrouver bien loin de sa vie bourgeoise, sous la menace permanente de voir son secret découvert. La cinéaste sait créer de la tension et la faire grandir sans jamais forcer le trait, avec une maîtrise jamais prise en défaut, jusqu’à l’ultime plan.
Du 27 Avril au 2 mai
THE ETERNAL DAUGHTER
De Joanna Hogg, Royaume Uni/ Etats Unis, 1h36, VOST Avec Tilda Swinton, August Joshi, Carly-Sophia Davies
Julie, accompagnée de sa mère âgée, Rosalind, vient prendre quelques jours de repos dans un hôtel perdu dans la campagne anglaise, le manoir où Rosalind a vécu dans le passé. Les souvenirs vont bien évidemment ressurgir. La jeune femme, réalisatrice en plein doute, confie à sa mère vouloir en savoir plus sur elle en vue d’un film. Proches et lointaines, ces deux femmes ont parfois des allures de soeurs jumelles. Le jeu de Tilda Swinton, conjugué au montage, suggère d’autres espace-temps et laisse entrer des fantômes.
Du 27 Avril au 2 Mai
TOUTE LA BEAUTE ET LE SANG VERSE
De Laura Poitras
Documentaire-Etats Unis – 1h57-VOST
Photographe mythique de l’underground US, Nan Goldin se bat contre la famille Sackler, richissime famille américaine au coeur du scandale des opioïdes, au travers de la mise sur le marché de l’antidouleur OxyContin, responsable de centaines de milliers de morts aux Etats-Unis. L’évocation biographique classique de Nan Goldin se double donc de son action militante, mêlant les images de ce combat à celles du parcours esthétique et intime de la photographe. LION D’OR au festival de Venise 2022
Du 4 au 9 Mai
LE CAPITAINE VOLKONOGOV S’EST ECHAPPE
De Alexei Chupov et Natalya MerkulovaEstonie – France/Russie-2023-2h06-VOST
URSS, 1938. Au pic de la « Grande Terreur », Staline purge ses propres rangs. Les hommes du NKVD, police politique ancêtre du KGB puis de l’actuel FSB, qui mettent en oeuvre la répression sont eux-mêmes arrêtés et exécutés. Capitaine zélé du NKVD, Volkonogov se sait parmi les condamnés et s’échappe. Dans sa fuite, il est frappé d’une vision : pour sauver son âme, il va chercher à expier ses fautes en recueillant le pardon des familles de ses victimes…
Du 4 au 9 Mai
ALMA VIVA
De Christèle Alves Meira – France-Portugal 2022- 1H28
Elle se nomme Salomé et, comme chaque été, elle passe ses vacances dans la maison familiale de sa grand-mère, au milieu des montagnes portugaises ; ici la vie semble immuable, les querelles entre voisins se prolongent d’une année sur l’autre, les langues sont bien pendues. Silencieuse et sérieuse observatrice, la gamine circule au milieu de ce petit monde : il l’interroge et la tourmente un peu – surtout les croyances sur les morts et leurs esprits. Soudainement la grand-mère meurt, les adultes se déchirent autour des obsèques, Salomé, elle, est hantée par l’esprit de celle qui était considérée comme une sorcière…
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ETERNEL DAUGHTER
De Joanna Hogg, Royaume Uni/ Etats Unis, 1h36, VOST. Avec Tilda Swinton, August Joshi, Carly Sophia Davies
Joanna Hogg s’est fait connaître récemment avec The Souvenir, film en deux parties, retraçant la relation d’emprise qu’elle a vécue jeune femme et l’œuvre de fiction qu’elle aurait voulu en tirer. Cette révélation critique va permettre la sortie en France de ses trois films précédents, Unrelated, Archipelago et Exhibition, inédits jusqu’alors en France. Depuis The Souvenir, Joanna Hogg, citée comme référence par Kelly Reichardt et produite par un parrain prestigieux, Martin Scorsese, n’est pas restée inactive. Avec Eternal Daughter, elle propose sans doute son film le plus accessible, sorte de drame gothique inspiré des nouvelles de Henry James, où elle revient sur son obsession de la mémoire, du travail de deuil et de la mise en scène atmosphérique, proche de l’art contemporain.
Julie, accompagnée de sa mère âgée, vient prendre quelques jours de repos dans un hôtel perdu dans la campagne anglaise. La jeune femme, réalisatrice en plein doute, espère y retrouver l’inspiration ; sa mère y voit l’occasion de faire remonter de lointains souvenirs, entre les murs de cette bâtisse qu’elle a fréquentée dans sa jeunesse. Très vite, Julie est saisie par l’étrange atmosphère des lieux : les couloirs sont déserts, la standardiste a un comportement hostile, et son chien n’a de cesse de s’échapper. La nuit tombée, les circonstances poussent Julie à explorer le domaine. Elle est alors gagnée par l’impression tenace qu’un indicible secret hante ces murs.
Une des actrices les plus précieuses et exigeantes de notre époque, Tilda Swinton, plus David Bowie au féminin que jamais, tient un double rôle dans Eternal Daughter, celui de Julie et également celui de Rosalind, sa mère. Là aussi, Joanna Hogg innove en faisant exprès de ne jamais filmer avant la dernière demi-heure les deux personnages dans le même plan. Ce refus de jouer la convention du plan d’ensemble réunissant les deux personnages interprétés par la même actrice possède une réelle signification qui révèle sa potentialité à la fin du film
Publié dans 7ème film du programme, Archives films
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Léonore Seraille ( Un Petit Frère )
France
Réalisatrice, scénariste
Jeune Femme, Un Petit Frère
Dans un entretien pour Madmoizelle, Lénore Serraille nous a parlé de la façon dont le cinéma permet de mettre en lumière ce que l’on ne dit pas au sein de la famille, de l’importance de découvrir de nouveaux acteurs sur le grand écran, de mettre en valeur des modèles noirs et des personnages féminins forts.
Un petit frère, de quoi ça parle ?
Quand Rose arrive en France, elle emménage en banlieue parisienne avec ses deux fils, Jean et Ernest. Construction et déconstruction d’une famille, de la fin des années 80 jusqu’à nos jours.
Madmoizelle. Comment est née l’idée de faire ce film ?
Léonor Serraille. Je pense depuis longtemps à écrire un film sur cette histoire-là. C’est dans ma tête depuis que j’ai rencontré mon amoureux, il y a 20 ans. Il m’a raconté beaucoup de choses de son histoire et je lui ai demandé : est-ce que tu veux que j’en fasse un film ? J’avais très envie de le faire : comme spectatrice, j’avais besoin de voir ce film-là. Je sortais de Jeune femme et j’avais besoin d’écrire sur plein de thématiques comme la maternité, les relations frère sœur, la famille… J’ai eu deux enfants, donc en tant que maman, tous ces questionnements se sont imposés à moi.
J’avais aussi besoin de faire ce film pour mes enfants, pour qu’ils grandissent avec d’autres modèles que des histoires de blancs. En France, on a parfois l’impression de toujours voir les mêmes acteurs dans les films. Certaines actrices, qui sont par ailleurs super, jouent parfois dans 10 films par an ! J’ai besoin que ma fille grandisse avec d’autres modèles. J’ai ressenti une responsabilité à faire ce film. J’avais besoin de montrer la beauté de ces personnages. Je les ai cherchés, et j’ai voulu les révéler, les comprendre, les regarder à leur hauteur.
Avez-vous écrit ces personnages en partant de la fiction, comme on écrirait un roman ou plutôt d’éléments proches du réel, ancrés dans une réalité sociale ?
Je suis partie de 4 ou 5 éléments concrets, comme l’arrivée de cette famille à la fin des années 1980 ou le fait que la mère est femme de ménage. Ensuite, j’ai inventé. J’avais en tête une espèce de valise remplie de souvenirs, de choses que mon compagnon a pu me raconter. J’avais aussi besoin d’écrire un personnage de maman assez moderne, insaisissable et mystérieuse, qui avait une sorte de panache, de fougue, d’élan et en même temps un peu de tragédie en elle. Mais je ne suis pas partie en enquête. Je ne suis pas allé interviewer cette famille, Au contraire, j’ai senti qu’il fallait que je prenne la distance et que j’invente. Par exemple, les hommes de la mère, Rose, sont tous des personnages de fiction. J’ai voulu raconter une éducation sentimentale de Rose. On la montre laver des baignoires, mais à d’autres moments, on révèle aussi un peu de son intimité, son besoin de vivre des choses intensément. C’est comme si elle était trop grande pour la petite vie qu’on lui donne. L’important était de ne jamais porter de jugement sur les personnages. Ce n’est pas un film à message, avec quelque chose à transmettre. C’est plutôt la mise en valeur de personnes qui nous donnent matière à cogiter, à nous émouvoir. De plus, je laisse une grande place à l’imagination, aux projections du spectateur parce que tout n’est pas dit. Le film se passe sur 25 ans, donc il y a parfois de grosses ellipses. On ne sait pas ce qui se passe sur trois mois, un an, dix ans… C’est au spectateur de remplir les trous, d’être actif et d’imaginer ce qui arrive à chacun. Comme dans Jeune femme, le personnage féminin est très intéressant, a beaucoup d’humour et de personnalité. Comment avez-vous écrit le personnage de Rose ? Il y a quelque chose de très féminin dans ma famille. Je viens d’une famille qui compte beaucoup de femmes au fort caractère. Les grands-mères, les mères, les six tantes sont des femmes qui aiment parler et qui ont beaucoup d’humour. Je pense que, même si c’est inconscient, ça influence mon cinéma. De plus, comme spectatrice, j’aime beaucoup les personnages pleins de nuances. Ils peuvent même être un peu désagréables ! Rose a quelque chose de très tragique, son histoire n’est pas facile mais je trouvais important de montrer que malgré les difficultés, elle résiste à tout, elle avance toujours avec son petit style, sa patte personnelle, sa façon de se décaler un peu des choses et d’injecter un peu de d’ironie. Elle ne verbalise pas tout, mais elle est vraiment dans le temps présent. Quand elle est là, elle parle, occupe l’espace et elle fait les choses à sa façon.
Vous mettez une scène un personnage principal féminin, noir, travailleuse précaire, ainsi que le point de vue de deux jeunes enfants, noirs. C’est très rare de voir ces personnages représentés au cinéma.
Oui, c’était très important. Le cinéma peut prendre en charge beaucoup de choses grâce à la fiction. Et surtout, ce qu’on disait avec l’actrice Annabelle Lengronne, c’est que cette histoire peut être racontée sous différents angles — celui des conditions de travail de chacun par exemple, ou celui de l’engagement, de la colère… Là, on a décidé d’aller dans l’intime, pour qu’on puisse se projeter dans les personnages. Récemment, j’ai entendu le discours d’Annie Ernaux pour son prix Nobel. Elle a dit : « Quand l’indicible vient au jour, c’est politique. » Cette phrase me parle. L’indicible, c’est tout ce qui relève de l’intime, qui nous rattache à la vie. Récemment, j’ai été interpellée par le fait qu’une spectatrice disait que ce film était l’histoire de son père et qu’il serait une porte d’entrée pour discuter avec lui car il ne parle pas beaucoup. Dans des familles comme celle-ci où il y a beaucoup de tabous, de silences, de choses intériorisées, on ne sait pas forcément comment aborder ces sujets : le cinéma le permet. En tant que spectatrice blanche, je peux me projeter dans cette famille, être émue par des choses présentes dans toutes les familles : les non-dits, la façon dont on communique, l’amour, la pression des parents, de l’aîné… C’est une famille qui vient d’Afrique subsaharienne, mais ce n’était pas le motif premier. C’est surtout une toile de fond à partir de laquelle on tisse des destins. D’ailleurs, il y a beaucoup de ma propre famille dans ce film. On y trouve beaucoup de questions que je me pose. Quelle est la place de chacun dans la fratrie ? Comment communique-t-on ? La maman est-elle écrasante pour les enfants ? Est-on poussé par la famille ou est ce que ça nous freine ?
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