Archives : Archives réalisateurs

Raymond Depardon 12 Jours

Né le 6 juillet 1942 à Villefranche sue Saône

France

Photographe, photojournaliste, réalisateur, documentariste

Reporters, Délits Flagrants, 10ème Chambre instants d’audiences, Profils Paysans, La Vie Moderne, Les Habitants, 12 Jours

NOTE D’INTENTION

« De l’homme à l’homme vrai le chemin passe par le fou »*

Michel Foucault.

Autrefois, la décision d’hospitaliser une personne contre son gré reposait sur le seul psychiatre et s’exerçait sans regard extérieur, depuis les aliénés et les fous sont devenus des patients. En 2013, pour donner un cadre légal à cet enfermement, la loi a obligé les psychiatres à soumettre, avant douze jours, au juge des libertés l’ensemble de leurs décisions concernant les hospitalisations sous contrainte. Nous sommes les premiers à filmer la mise en application de cette loi, (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs | Commentaires fermés sur Raymond Depardon 12 Jours

Kaouther Ben Hania

Née le 27 Août 1977 à Sidi Bouzid

Tunisie

Réalisatrice

Le Challat de Tunis, Zaineb n’aime pas la Neige, La Belle et la Meute

 

ENTRETIEN AVEC KAOUTHER BEN HANIA

Du documentaire à la fiction, votre cinéma conserve toujours un lien étroit avec la réalité sociale.

J’ai commencé avec le documentaire parce que je considérais la fiction comme quelque chose d’extrêmement difficile. En effet, la fiction est construite de plusieurs « éléments mensongers » et c’est pourtant à partir du mensonge que doit émerger une certaine authenticité. Filmer le réel à travers le documentaire m’a permis de reconsidérer cette idée et d’avoir des outils qui m’ont aidée pour aborder la fiction. (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs | Commentaires fermés sur Kaouther Ben Hania

Léonor Serraille

Née à Lyon

France

Scénariste, réalisatrice

Jeune femme (Caméra d’or au festival de Cannes 2017, sélection « Un Certain Regard »)

Entretien avec Léonor Serraille

« Jeune femme » aurait pu s’appeler « Jeunes femmes » : dans l’équipe, les femmes sont à tous les postes: directrice de la photographie, ingénieure du son, monteuse image, monteuse son, décoratrice, compositrice, productrice…

Pour tourner Body, mon moyen métrage, j’avais fait appel en grande partie à mes camarades de la Fémis, et comme j’avais apprécié leur travail et l’énergie qui nous réunissait, nous avons continué ensemble. Ce n’était pas un choix délibéré de faire un        « casting d’équipe » féminin, mais à l’arrivée, je ressens une grande fierté : il est important que des femmes arrivent massivement à des postes décisifs. (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs, Uncategorized | Commentaires fermés sur Léonor Serraille

Eric Caravaca

Né le 21 Novembre 1966 à Rennes

France

Acteur (théâtre, cinéma), scénariste, réalisateur

Le Passager, Carré 35

NOTE D’INTENTION

Tout commence sur le tournage d’un film. Le décor ce jour-là est un cimetière en Suisse. Marchant dans les allées, je me retrouve dans ce qu’on appelle le « carré enfant ». Devant ces petites tombes parsemées pour certaines de jouets noircis par le temps, émaillées de quelques mots gravés sur la pierre qui parfois ne comporte qu’une seule date, une tristesse profonde m’envahit. Je ne comprends pas : je n’ai aucune raison d’être dévasté par ces tombes d’enfants. (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs, Uncategorized | Commentaires fermés sur Eric Caravaca

Philippe Van Leeuw

Né en 1954 à Bruxelles

Belge

Réalisateur, scénariste, directeur de la photographie

Le Jour où Dieu Est Parti en Voyage, Une Famille Syrienne

ENTRETIEN AVEC PHILIPPE VAN LEEUW

Le film raconte la journée d’une famille syrienne vivant confinée dans son appartement. D’où est venu le désir de faire ce film ?

D’un sentiment d’injustice. Quand la Communauté Internationale s’est engagée en Libye avec tous les moyens nécessaires, militaires et politiques, au même moment, en Syrie, les manifestations pacifiques étaient réprimées par la terreur, et là, personne n’a bougé. Comme pour mon premier film, « Le Jour où Dieu est parti en voyage« , (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs, Uncategorized | Commentaires fermés sur Philippe Van Leeuw

Raoul Peck

Né le 9 septembre 1953 à Port au Prince

Haîti

Réalisateur, Producteur, scénariste

Ministre de la Culture de la République d’Haîti de 1995 à 1997, Président de la Fémis depuis 2010.

Haîtian Corner, Lumumba, le Jeune Karl Marx, I Am Not Your Negro

 

La sortie sur les écrans du « Jeune Karl Marx » apporte une bouffée d’air contestataire bienvenue. Raoul Peck y retrace l’évolution du jeune intellectuel de Cologne à Bruxelles en passant par Paris, Londres et Manchester, entre 1843 et 1847, et la naissance tumultueuse d’une nouvelle conception révolutionnaire du monde. Le réalisateur a bien voulu répondre à nos questions. (suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs | Commentaires fermés sur Raoul Peck

Laurent Cantet

Né le 16 juin 1961 à Melle

France

Réalisateur, scénariste

Ressources Humaines, Emploi du temps, Entre les Murs, Retour à Ithaque, L’Atelier

Avec L’Atelier, présenté dans la section Un certain regard, Laurent Cantet est revenu au Festival de Cannes pour la première fois depuis la Palme d’or d’Entre les murs, en 2008. En apparence, les deux films se ressemblent mais, à 56 ans, Cantet sait comme personne percevoir et restituer les changements profonds d’une époque. Entre les jeunes de La Ciotat et l’intellectuelle descendue de Paris pour leur apporter les bienfaits de la culturelors d’un atelier d’écriture, ce n’est pas seulement un drame romanesque qui se noue, mais un débat essentiel pour notre temps.

(suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs | Commentaires fermés sur Laurent Cantet

Michael Haneke

Né le 23 Mars 1942 à Munich, Allemagne

Autrichien

Réalisateur, scénariste

Le Septième Continent, Benny’s Video, Funny Games, La Pianiste, Caché, Le Ruban Blanc, Amour, Happy End

 

 

Plus noir que jamais, Michael Haneke renoue avec ses thèmes fétiches dans « Happy end », le portrait glaçant d’une famille bourgeoise, aveugle et sourde à la souffrance autour d’elle, épinglant au passage notre « indifférence » et le « manque d’empathie » de nos sociétés.

« Happy end » se déroule à Calais et a d’abord été présenté comme un film sur les migrants. Qu’en est-t-il ?

(suite…)

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs, Uncategorized | Commentaires fermés sur Michael Haneke

Michael Haneke : Profession cinéaste

Michael HanekeD’Yves Montmayeur – France- Autriche –1 h 32 – Documentaire

Tous les journalistes qui ont interviewé Michael Haneke vous le confirmeront : impossible de lui faire expliquer le sens de ses films. Le documentariste Yves Montmayeur, qui a suivi la plupart des tournages du cinéaste autrichien depuis Code inconnu, essaie, lui, depuis quinze ans. Ses tentatives infructu­euses auprès d’un Haneke de plus en plus fermé sur la question tournent même au running gag… Le réalisateur du Ruban blanc, qui se revendique volontiers « artisan », est en revanche plus prolixe sur la fabrication de ses films. Et c’est passionnant.

Yves Montmayeur a choisi de raconter Haneke à rebours, en partant de la consécration d’Amour pour remonter jusqu’à la trilogie de la « glaciation émotionnelle » des débuts — Le Septième Continent, Benny’s Video, 71 fragments d’une chronologie du ­hasard. Les extraits de films sont judicieusement choisis, les témoignages des proches (notamment ses actrices fétiches ­Susanne Lothar et Isabelle Huppert) précieux pour appréhender le perfectionnisme d’un cinéaste obsédé par le contrôle.

Mais ce sont les nombreuses séquences de making of qui révèlent le mieux la personnalité de Haneke. Si son cinéma a perdu une partie de sa rigi­dité théorique au fil des années, l’homme, lui, n’a pas changé : toujours ces habits noirs, toujours ce look de pasteur calviniste parfaitement raccord avec la radicalité (ses détracteurs diraient « la sinistrose ») de son oeuvre. Et pourtant… Haneke au travail, sur le tournage de ses films ou dans ses cours de théâtre à l’Académie des arts du spectacle de Vienne, c’est une pile électrique : il ne tient pas en place. C’est aussi, plus surprenant encore, un homme très drôle, au rire communi­catif. Il le disait lui-même lors de la sortie du Temps du loup : « C’est souvent plus agréable de tourner un film avec moi que de le regarder.

Publié dans A propos de..., Archives réalisateurs | Commentaires fermés sur Michael Haneke : Profession cinéaste

Andreï Petrovitch Zviaguintsev

Né le 6 février 1964 à Novossibirsk

Russie

Réalisateur

Le Retour, Le Bannissement, Elena, Léviathan, Faute d’Amour

Interview du réalisateur qui dépeint une société russe atomisée et incapable de compassion. 

Un jeune couple de Moscovites de la classe moyenne divorce. Chacun s’apprête à refaire sa vie avec un nouveau conjoint. Mais leur fils Aliocha, garçon sensible d’une douzaine d’années, est un obstacle à la réalisation de leur projet personnel.

COURRIER INTERNATIONAL Le très joli titre français, Faute d’amour, ne traduit pas exactement le sens de Nelioubov [Non-amour].

ANDREÏ ZVIAGUINTSEV Oui, c’est plus fort que l’absence d’amour, c’est un état d’extrême indifférence, presque de rejet, et un sentiment qui enferme l’individu. Un manque d’empathie, de compréhension de l’autre, un manque de confiance, qui vient du fait que les gens sont repliés sur eux-mêmes. Il empêche l’individu de se libérer, c’est un enfermement, une incapacité à élargir son horizon. On ne peut atteindre l’autre, comme si, se trouvant en dehors de soi, il était inaccessible.

Un film sur le manque d’amour, c’est un film sur l’amour ?

Il me semble que oui. L’amour sous toutes ses formes. En titrant sur l’absence d’amour, j’attire l’attention sur ce qui nous attend si nous vivons sans amour. Ce qui fait qu’en miroir, c’est un encouragement à faire attention, à faire quelque chose dans sa vie pour ne pas se retrouver dans cette situation. Beaucoup de spectateurs m’ont dit qu’ils n’avaient qu’une idée à la sortie de la projection – appeler à la maison, rentrer chez eux, embrasser leurs proches, leur enfant. Oui, bien sûr, c’est une exhortation à aimer.

La presse russe vous a reproché d’être très dur à l’égard de la société de votre pays.

Les critiques, ou les gens sur les réseaux sociaux, ne voient que le constat que je fais. Mais ils ne se demandent pas pourquoi, à quel fin je montre ça. En désignant les plaies, tu appelles à leur guérison. C’est évident. Le plus marquant, ici, c’est l’absence d’empathie. L’agression, le rejet, la distance, voire la militarisation des consciences dans la société d’aujourd’hui…

Seulement dans la société russe ?

Je pense que ça concerne tout le monde. C’est en tout cas le sentiment que m’ont donné les journalistes au dernier Festival de Cannes. Cent six ont voulu m’interviewer (heureusement j’ai pu faire des interviews groupées) ! Ils venaient du monde entier et aucune de leurs questions ne suggérait l’étonnement que puisse exister ce genre de choses en Russie. Cela témoigne bien du fait que cela concerne tout le monde – l’individualisme, l’égoïsme, l’atomisation et l’isolement sont partout.Ce n’est pas une approche documentaire sur l’état de la société russe, contrairement à ce que certains écrivent. Nous ne sommes pas en capacité de nous regarder dans le miroir. Il y a des gens qui disent que ce genre de personnes [les héros du film] n’existent pas, que ce sont des monstres, qu’il faut leur interdire d’avoir des enfants. Qu’est-ce, sinon de l’absence d’empathie ?

Il y a un sous-thème important dans Faute d’amour, celui des personnes disparues et de ces volontaires extraordinaires qui les recherchent.

Il y a énormément de disparitions en Russie. Selon les statistiques de LizaAlert, la brigade de volontaires dont il est question dans le film, il y a eu 6 150 avis de disparitions en 2016. Mais en extrapolant cela fait bien plus, car beaucoup de gens ne connaissent pas LizaAlert. Ils se contentent d’alerter la police, qui n’est pas efficace dans ce domaine. Chaque jour, en Russie, il disparaît autant de personnes que si un Boeing s’écrasait. C’est ce que dit Grigori Sergueev, le fondateur de LizaAlert. Mais ces volontaires retrouvent 89 % des personnes déclarées disparues ! La moitié des 11 % restants sont retrouvés morts, l’autre demeure introuvable. Une personne sur 5 est mineure. Les mineurs disparus sont appelés poteriachka [“qui s’est perdu”] quand ils ont de 0 à 12 ans, et begounok [“fugueur”], de 12 à 18 ans.

C’est le cas d’Aliocha, le jeune garçon de votre film ?

Oui, c’est la période de la puberté, de l’opposition aux parents, du désir d’indépendance, de l’affirmation de soi, de l’éveil des pulsions sexuelles, ces jeunes prennent leur décision de façon autonome, ils décident de s’enfuir de leur maison. Concernant les adultes, ce sont souvent des personnes âgées, qui ne savent plus où elles habitent, des ivrognes, des SDF, des gens enlevés, des gens qui plaquent tout.

Ces volontaires que nous voyons dans votre film sont, paradoxalement, très “professionnels”.

Oui. Mais ce sont pourtant des bénévoles. Les acteurs qui jouent le rôle des volontaires dans le film sont allés secrètement, incognito, s’enrôler dans les rangs de LizaAlert pour voir comment ils travaillent. Ce qui se passe, c’est qu’ils agissent en faisant abstraction des sentiments, des émotions, avec précision, s’en tenant à l’exigence d’efficacité. Mais surtout, ils ne sont pas indifférents. Pourquoi agissent-ils, si ce n’est par compassion ? Ils ne reçoivent aucun argent, ils ne sont pas une entreprise commerciale. Ils sont structurés, mais ne veulent pas du statut d’association. C’est une organisation spontanée, anarchique au sens littéral du terme, ils ne veulent avoir aucun lien avec la machine d’État car ils seraient sous contrôle. Les parents qui retrouvent leurs enfants sont prêts à leur donner n’importe quoi par gratitude. Mais ils refusent l’argent. Ils n’acceptent que les dons matériels.

Sorti en juin, comment votre film a-t-il été reçu en Russie ?

Très bien. Nous avons pratiquement atteint les 100 millions de roubles de recette [1,4 million d’euros], notre objectif, en trois mois d’exploitation.

Et concernant la censure des mots grossiers ?

C’est comme ça, c’est la loi. Ils sont remplacés par un instant de silence. Il n’y a pas d’alternative. Soit j’accepte que mon film soit ainsi diffusé, avec des coupures de son [et une interdiction aux moins de 18 ans], soit je refuse et les spectateurs ne peuvent pas le voir. En l’occurrence, Faute d’amour a pu être largement distribué. Dans toutes les grandes villes du pays. Ailleurs dans le pays… Un spectateur a écrit sur Internet qu’il avait spécialement réservé une chambre d’hôtel dans la ville la plus proche de chez lui qui projetait le film. Et le jour suivant la projection, il est reparti en car. Quel cauchemar !

C’est vrai, mais c’est formidable aussi.

Oui, c’est formidable, si on veut (rires) !

Propos recueillis par Laurence Habay

Publié dans Archives réalisateurs, Réalisateurs, Uncategorized | Commentaires fermés sur Andreï Petrovitch Zviaguintsev