20 feet from stardom

Du 30 janvier au 4 février 2014

Documentaire réalisé en 2013 par Morgan Neville – USA – 1h29 – VOST

Morgan Neville, réalisateur de « Twenty feet from Stardom » : « Ce film a libéré la parole des choristes »


Elles s’appellent Merry Clayton, Darlene Love, Lisa Fisher, Judith Hill… Des noms qui ne vous disent peut-être rien, mais leurs voix sublimes vous ont forcément touchés. Vous les avez écoutées en boucle, de Sympathy for the devil à Proud Mary ou Thriller. Un jour ou l’autre, elles vous fait danser, tanguer, rêver. ­Twenty Feet from stardom (ou « à vingt pieds de la célébrité » en VF) est un hommage vibrant à toutes les divas de l’ombre, ces choristes sans lesquelles tant de chansons mythiques auraient aussi peu de relief qu’une vieille pochette de 33 tours. Des Rolling Stones à Joe Cocker, en passant par Stevie Wonder ou Michael Jackson, ces discrètes enchanteresses hantent toute l’histoire de la pop.

Le documentariste américain Morgan Neville les a retrouvées une à une, suivies dans leur travail et dans leur quotidien. Les souvenirs et les vocalises de plusieurs générations de femmes se fondent et se répondent, « choeur » inspiré, passionné, fervent, que rien ne peut étouffer : ni l’étrange et paradoxal statut qui les a presque toutes maintenues à l’orée de la gloire, ni les embûches multiples d’un show-biz souvent exploiteur, cruel et oublieux. Et pour une fois, dans ce film, ce sont les stars, de Sting à Stevie Wonder, Bruce Springsteen ou Mick Jagger, qui, par leurs réflexions et leur témoignage, jouent les « choristes ».

Comme dit Lou Reed dans Walk on the wild side, la chanson qui ouvre le film : « And the coloured girls go (et les filles de couleur font) : Doo, do-doo, do-doo… » Car cette tranche d’histoire de la musique raconte une révolution : l’irruption des chanteuses noires américaines, de leur son et de leurs sources d’inspiration (gospel, negro spiritual) dans les années 1960. Naissance de la soul, bouillonnement artistique des années 1960 et 1970, âge d’or du vinyle… En recueillant toutes ces paroles et toutes ces notes, en collectant de précieuses archives (Ike et Tina Turner accompagnés de leurs « Ikettes », Ray Charles interprétant What ‘d I say), le film devient une grande fresque qui dépasse le champ artistique, où l’on perçoit, en filigrane, les convulsions de l’Amérique de l’époque : la lutte pour les droits civiques, l’évolution de la condition féminine.

Devant la caméra et au micro se succèdent des femmes exceptionnelles, des tempéraments volcaniques ou malicieux, aussi fortes et fascinantes que leurs voix. On se régale, par exemple, des retrouvailles pétillantes d’une Darlene Love avec son groupe « de filles » des sixties, les Blossoms. Peu importent l’âge, les épreuves : elles brûlent toujours du même feu sacré, connaissent toujours cette alchimie merveilleuse qui permet au choeur d’être un peu plus que la somme de toutes les voix. Comme ce film qui, grâce à elles, est un peu plus qu’un simple documentaire musical. — Cécile Mury

Cécile Mury – Télérama

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