Geronimo

Geronimo

GeronimoDe Tony GATLIF – France 2014 – 1H44
Avec Céline Salette, Nailia Harzoune…
Un travelling époustouflant pour commencer : deux jeunes gens roulent à fond de train sur une plage. Elle, sublime, hurle : « je t’aime », à son compagnon. Incroyable mélange de flamenco et de musique turques en bande son, immédiate sensation de liberté : pas de doute, Tony Gatlif est de retour. Qu’a bien pu encore inventer ce cinéaste, né il y a soixante-dix à Alger, d’un père kabyle et d’une mère gitane : rien moins que Roméo et Juliette, West Side Story ou Noces de sang, réunis dans un même film ou presque… A ceci près qu’un personnage ne va pas tarder à illuminer le film : il s’agit d’une éducatrice, elle s’appelle Geronimo, tout le film semble procéder de la force stupéfiante qui émane du regard de Céline Salette… Splendide, Geronimo, est un film violent sur la non-violence, manifeste moral et politique, salut, humain que nous adresse Tony Gatlif en ces temps de temps mauvais.

C’est vrai qu’elle a les yeux de Simone Signoret qu’elle se prépare à incarner dans Une vie de Montand, de Christophe Ruggia. Pas de quoi lui faire peur. « On n’avance pas avec la peur », dit Céline Sallette, 34 ans, alias Gemma dans Geronimo, ce « West Side Story » turco-gitan de Tony Gatlif qui sort aujourd’hui sur 120 écrans.
Elle y incarne une éducatrice dans un quartier difficile de Saint-Etienne. Sur l’affiche, elle court à perdre haleine. Dans la vie, le cinéma lui court après. Cette fille d’un papa cheminot et d’une maman « qui s’occupait de nous » croule sous les demandes.

César du meilleur espoir féminin pour son rôle dans L’Apollonide, de Bertrand Bonello, Prix Romy Schneider 2013, elle est la partenaire de Jean Dujardin dans La French. Mais aussi l’héroïne des Rois du monde, long-métrage de son chéri Laurent Laffargue, père de leur fille Alice, 5 ans. Elle a aussi tourné Je vous souhaite d’être follement aimée, d’Ounie Lecomte, joue dans Vie sauvage, de Cédric Kahn. Attaque la saison 2 de Les Revenants, sur Canal +. Et incarnera l’interprète de Casque d’or. On en perd en route.

Dans le ciel du cinéma français, Céline est plus qu’une étoile : une constellation. Elle passe la main dans ses cheveux, essuie un début de cerne. Un journaliste a écrit qu’elle avait « une beauté d’avant-guerre ». Elle surenchérit : « On m’a dit aussi que j’avais une tête de XVIIIe. De toute façon, je ne me ressemble jamais. Je me regarde dans un miroir et je me demande si je suis toujours la même ! J’ai l’impression de n’être pas tout à fait finie. »

Tourner pour Gatlif était un rêve, affirme-t-elle. On la croit. Sallette ne sait pas mentir. De cette aventure de cinéma, elle a tout gardé : les ados dont elle s’occupe dans le film sont restés ses enfants. Nailia Harzoune, la jeune mariée qui refuse ses noces forcées, a été la nounou de sa fille. Quant au « chaman » Gatlif, il est son alter ego. « Avec lui, on peut laisser entrer la vie. » La première fois qu’elle s’est donnée en spectacle, c’était en hippie, « avec des lunettes de soleil bleues ». Elle a senti que sa vie était là. Contre vents et galères. « Quand les jeunes me demandent ce qu’il faut faire pour devenir acteur, je leur réponds qu’il faut être prêt à traverser la misère. S’ils ont un plan B, même pas essayer. » C’est du feu, cette fille, admiratrice d’Emmanuel Carrère et grande lectrice de biographies. « La vie des autres m’intéresse plus que la mienne. » Elle dit que le cinéma l’aide à se tenir droite. Qu’il lui faut des rôles chargés : « J’adore sortir de moi. » Avec Alice, sa fille, elles sont allées voir l’expo Niki de Saint Phalle. De la vie en couleurs vives. Tout ce qu’aime Céline.

Pierre Vavasseur

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