Quentin Dupieux ( Mandibules )

Né le 14 avril 1974 à Paris

France

Compositeur, DJ, réalisateur, monteur, scénariste

Rubber, Au Poste, Le Daim, Mandibules

NOTE D’INTENTION

 « En terminant le montage de mon dernier long métrage Le Daim, j’ai réalisé que tous mes films étaient des comédies fortement tourmentées par la mort. Effectivement, dans chacun de mes films, un ou plusieurs personnages y trouvent systématiquement la mort, souvent brutalement, et la plupart du temps de façon inattendue et/ou choquante pour le spectateur. Mon cinéma sera toujours habité par les mêmes obsessions,

la même écriture et le même sens de l’humour. C’est une certitude, je ne sais pas faire autrement. Depuis mes débuts, j’ai le sentiment de creuser un sillon qui m’appartient totalement : réalités déformées, rapports humains tordus à l’infini, portraits surréalistes de notre société, délires enfantins et profonds…

Avec Mandibules, j’abandonne enfin la mort pour m’intéresser à la vie. Contrairement à mon premier long métrage Steak dans lequel je m’amusais à défaire le duo Eric & Ramzy pour en extraire un humour très noir, j’ai voulu pour Mandibules magnifier le tandem comique pour lequel j’ai écrit cette partition, Grégoire Ludig et David Marsais, en filmant leur complicité et leur légèreté avec beaucoup de bienveillance. Mandibules est avant tout une comédie sincère sur l’amitié, au premier degré et au présent, mais c’est aussi, grâce à la présence d’une mouche géante au cœur du récit, un film sensationnel, croisement improbable entre le fantastique de E.T. l’extra-terrestre et la crétinerie de Dumb and Dumber. C’est presque une très mauvaise accroche marketing mais je dois l’écrire : Mandibules est mon premier film sans décès à l’écran. Et si l’on voulait absolument théoriser, mais nous ne le voulons pas, on pourrait dire que cette grosse mouche, certainement née sur le tas de cadavres de tous mes films précédents, est le seul élément du film habité par le morbide qui vient peut-être de quitter définitivement mon cinéma. »

A PROPOS DE LA MOUCHE

« L’Atelier 69, avec lequel je collabore assez souvent, a mis au point le design de cet insecte. Il y a eu plusieurs moulages pour arriver à la version qu’on voit dans le film et un gros travail de sculpture pour fabriquer la mouche et réfléchir à ses proportions. Cette sculpture est devenue une marionnette avec un marionnettiste (David Chapman) qui la faisait bouger, les mains à l’intérieur. Ensuite, sur la plupart des plans du film, nous avons animé les pattes de la mouche en digital. C’est un mix de très vieilles méthodes, à la Dark Crystal, mélangés à la 3D la plus high tech d’aujourd’hui. Sans être contre la 3D, je trouve ce mélange bien plus intéressant…Je ne voulais pas qu’on parte pour le tout digital. Pour les comédiens, c’est très compliqué de jouer face à un coussin vert, et de se dire qu’on fera tout le boulot plus tard sur ordinateur… Je trouve ça très dangereux et, surtout, pas très intéressant. J’ai eu envie de proposer aux comédiens d’interagir avec une mouche qui était physiquement là, même si parfois elle n’avait pas de pattes… »

Quentin Dupieux

TROIS QUESTIONS à… DAVID MARSAIS et GRéGOIRE LUDIG

Comment s’est passé votre travail avec la mouche ?

David Marsais : Le marionnettiste qui animait la mouche, David Chapman, était excellent. Pour un acteur, ce n’est pas très flatteur de jouer sur un fond vert. C’était bien plus agréable de travailler avec un vrai marionnettiste et avec une mouche qui soit physiquement sur le plateau…Grégoire Ludig :Ce qui a été difficile, c’était de rester sérieux lors du tournage des scènes avec Adèle Exarchopoulos. Pour la scène où nous sommes tous à table, on s’est même fait engueuler par Quentin, et c’était rare… On n’arrivait pas à tenir la concentration et on foirait toutes les scènes d’Adèle. Ça ne se fait pas.. David Marsais : Nos personnages sont un peu comme nous. On se retrouve dans l’histoire d’amitié que le film raconte. Quand ils subissent un échec, ils se disent que ce n’est pas très grave et ils se relèvent. En ça, ils nous ressemblent beaucoup. On a subi des échecs dans notre carrière et on s’est toujours dit qu’il fallait savoir en rigoler.

Qui sont vos personnages, Jean-Gab et Manu ?

Grégoire Ludig : Nous jouons deux potes qui trouvent une mouche énorme dans le coffre d’une voiture. On ne sait pas grand-chose d’eux, sauf qu’ils sont un peu débiles. Quand quelqu’un confie une mission à l’un d’eux, il va tout de suite chercher son pote pour lui demander de l’aide. Et ensemble, ils décident de dresser cette mouche pour gagner de l’argent. C’est comme ça qu’ils s’embarquent dans une aventure. C’est un film très primaire, très premier degré…

David Marsais :Ils sont un peu comme Astérix et Obélix. En temps normal, en tant qu’ac-teur, on se pose beaucoup de questions sur le personnage qu’on va jouer. On se dit : pour-quoi il ferait ceci ou cela ? Ce qui est intéressant quand on tourne avec Quentin Dupieux, c’est qu’il a un univers si absurde qu’on est obligé de s’y abandonner complètement sans se poser trop de questions. Et ça, c’est étonnamment agréable…

Votre jeu a-t-il évolué depuis les débuts du Palmashow ?

Grégoire Ludig : En lisant le scénario, on ne savait pas à quel degré de bêtise on devait s’arrêter pour nos personnages. Tout d’abord on en a fait trop, il y a eu une phase pas très regardable… Puis on s’est ajusté, grâce à Quentin. On a trouvé un registre un peu simple et en même temps très cool. Ce sont deux types qui se disent : « Dans la vie, rien n’est vraiment très grave ». Quiconque découvre une mouche géante dans un coffre de voiture partirait en courant ou appellerait les secours… Pour nos personnages, c’est seulement une grosse mouche.

David Marsais : Quentin avait vu un sketch qu’on avait fait, dans lequel on interprétait des personnages qui se rapprochent beaucoup de Jean-Gab et Manu. Mais un sketch ça dure 3 minutes et on a une tendance un peu à sur-jouer un personnage et à grossir les traits, car ça se passe dans un temps réduit et il faut que le spectateur comprenne très vite toutes les nuances. En revanche, dans le film, il y a une forme de réalisme, donc Quentin nous a demandé de redescendre. Il fallait tenir un peu les personnages pour qu’ils ne soient pas trop agaçants. Le résultat est vraiment un croisement de Quentin Dupieux et du Palmashow.

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