De Kenneth Lonergan – Etats Unis – 2016 –2h 15–VOST
Avec Casey Affleck, Michelle Williams, Kyle Chandler…
Troisième long métrage de Lonergan, ce film magnifiquement réalisé, tout en subtilité et retenue, est tout simplement un chef-d’œuvre. Lonergan en grand raconteur (scénariste reconnu de Mafia blues et de gangs of New York) bâtit son film autour du portrait bouleversant de son héros, Lee Chandler, (Casey Affleck), homme à tout faire dans un immeuble de Boston, homme peu sociable, solitaire et irritable, coupé de sa famille et éloigné de sa ville natale Manchester. Suite au décès de son frère, Joe ( Kyle Chandler) Lee, désigné comme tuteur de son neveu Patrick ( Lucas Hedges), âgé de 16 ans, retourne à Manchester et se retrouve confronté à un passé tragique et à ses doutes de ne pouvoir faire face à la réalité.
Si la photographie y est parfaite, la lumière grandiose, c’est le scénario, la mise en scène et l’interprétation saisissante de l’ensemble du casting qui font de ce long-métrage un pur bijou. D’abord parce que les différentes parties du film ne sont pas présentées de façon chronologique, et que les flash-back successifs permettent de mieux comprendre l’imbrication des situations sans avoir dès le début toutes les clés de lecture. A travers différents thèmes comme le deuil, les liens familiaux et filiaux ou encore l’héritage, le personnage de Lee, interprété par un Casey Affleck littéralement habité, sublimé par son art, devient plus clair, tout comme son comportement.
Casey Affleck nous gratifie d’une performance incroyable, intense, toute en retenue. En face de lui, tour à tour, l’excellent Kyle Chandler, le solide C.J. Wilson (George) et le jeune surdoué Lucas Hedges, entretiennent une émotion et une rythmique qui font de ce film une partition complexe et évidente à la fois. Quant à Michelle Williams ( Randi, l’ex femme de Lee), dont les apparitions sont rares ici, elle nous offre une des scènes les plus poignantes du film lors de sa rencontre avec Lee (scène du landau).
Mais en dépit de son cadre hivernal et du drame qui s’y joue, Manchester by the Sea s’avère étonnamment drôle. On sourit souvent dans ce film car la finesse du regard de Lonergan embrasse l’absurdité de chaque situation, s’attardant sur des moments gênants, des instants d’embarras et le petit détail réaliste qui vient parasiter le mélo.
On retiendra aussi la manière intelligente avec laquelle ce film suggère sans montrer, évoque sans confronter et finalement dresse un portrait délicat et sans concession d’une petite ville, de ses habitants et d’une famille en particulier, sans oublier la mer qui est témoin de tout sans apaiser.
Que ce soit au niveau du fond ou de la forme, Manchester by the Sea est un film exceptionnel à