LOLA PATER

Zino, alors qu’il se recueille sur la tombe fraichement creusé de sa mère dans le carré musulman d’un cimetière parisien, est loin d’imaginer la vague déferlante qui va venir balayer le récit maternel. De son père absent, sa mère ne lui disait pas grand-chose. Elle en avait supprimé les traces, les photos. Il se serait volatilisé, aurait abandonné femme et enfant sans une explication. Sujet délicat, rarement abordé pour ne pas blesser l’épouse abandonné un quart de siècle plus tôt. Mais les histoires que gobe sans broncher un fiston aimant tiennent rarement le choc devant un notaire bien renseigné dès qu’il s’agit de droits de succession. C’est ainsi que l’homme de loi va retrouver sa trace et se faire un devoir de communiquer son adresse. Bien sûr Zino a tôt fait d’enfourcher sa moto et le voilà parti pour le midi, à la recherche de son père. Le nom, Farid Chekib, inscrit sur la boîte aux lettres d’un mas provençal lui confirme qu’il est arrivé à destination. La maison est pleine de vie, de femmes, de musique. Il faut dire que Lola, la belle et grande brune qui règne sur le lieu, y donne des cours de danse orientale. On prend d’abord le visiteur pour un danseur mais le visage de Lola, troublée, se décompose lorsque Zino demande à voir Farid. S’il la prend pour la nouvelle épouse de son père, nul n’est dupe très longtemps. Lola n’est autre que son géniteur, un bien étrange pater !  Cette réalité là, il faudra un bon moment à Zino pour se l’approprier ! Dans l’immédiat, il rebrousse chemin….Quand il revient au bercail, le retour est d’autant plus rude entouré par le vide, l’absence, dans l’immeuble de son enfance…. Jusqu’à ce que Lola, n’y tenant plus, fasse à son tour le voyage jusqu’à son fils. Une Lola gauche, fragilisée, assaillie par les doutes, les regrets…

Jamais Nadir Moknèche ne tombe dans les clichés sordides ou simplistes pour parler la réalité de ces hommes et femmes qui ont dû fuir leur pays, l’Algérie, pour ne pas terminer leur vie dans un asile psychiatrique…

Le réalisateur a eu la bonne idée de confier le rôle principal à Fanny Ardent, qui sert le personnage à merveille par la puissance de son regard, par son autorité naturelle. Sous ses extravagances volubiles, on comprend qu’il y a un être d’une énergie, d’une force rare, qui continue à se battre pied à pied pour s’assumer et garder la tête haute.

Critique UTOPIA

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