Corée du Sud
Réalisateur, scénariste
Turning Gate, In another country, Haewon et les hommes, Un jour avec un jour sans, Seule sur la plage la nuit, Le Jour d’après, Hôtel by the river
Entretien avec Hong Sang-Soo
FilmdeCulte: On dit souvent que vos personnages parlent beaucoup. Êtes vous d’accord si l’on dit que le plus intéressant n’est pas tant ce qu’ils disent que le décalage entre ce qu’ils disent, ce qu’ils pensent et ce qu’ils font ?
Hong SangSoo: En général, je ne commence jamais un film avec uniquement une seule intention. Certaines de mes intentions sont même inconscientes, et restent invisibles, même à moi, tout au long du tournage.
Une fois mon film terminé, vous formulez un commentaire dessus. J’écoute et j’essaie de comprendre comment et pourquoi vous l’avez ressenti de telle manière. Les gens essaient d’exprimer leur ressenti à l’aide de mots et de phrases, et ce à cause de choses très, très personnelles qui n’ont pas forcément de rapport avec la réalité. Ces mots-là ne peuvent avoir qu’un certain type de relation avec la réalité. Une relation, mais pas de ressemblance.
FdC: C’est d’ailleurs sans doute pour ça que les critiques français sont prompts à voir dans vos films un lien avec ceux d’Eric Rohmer. S’agit-il effectivement d’une de vos références ?
HSS: J’aime beaucoup ses films, depuis très longtemps. Bien sûr quand je réalise mes propres films, je ne pense pas à son travail, je pense à autre chose. Mais après tout, qui sait ce qui peut bien se passer dans ma tête ?
FdC: Il y a souvent beaucoup d’humour et d’ironie dans vos films. Avez-vous l’impression de réaliser des comédies ?
HSS: Ça dépend, c’est vous qui voyez! Mais je dois dire que de manière générale, je ne réalise jamais un film pour rentrer dans telle catégorie ou pour accomplir tels effets.
FdC Vous dites écrire chaque scène juste avant le tournage, et vous laissez les acteurs improviser. Pourtant dans chacun de vos scénario, tout parait logique et très réfléchi. Comment maintenez-vous un tel équilibre?
HSS: Merci beaucoup pour ce compliment, mais honnêtement je n’en ai pas la moindre idée!
FdC: Vos personnages voyagent beaucoup, que ce soit en France ou en Corée. Y a-t-il des lieux qui vous inspirent certaines histoires ? Quelle est l’influence du lieu sur l’histoire ?
HSS: Le plus important ce n’est pas tant le lieu que la curiosité que j’éprouve envers ce lieu, et sur la manière dont les gens peuvent y vivre. D’une certaine manière, changer de lieu de tournage à chaque film m’oblige à observer le monde différemment et à penser d’une nouvelle manière à chaque fois.
FdC: Dans beaucoup de vos longs métrages, il y a un film dans le film, or vous n’utilisez pas d’artifices particuliers pour différencier la fiction du réel. Pourquoi?
HSS: Je n’ai pas vraiment d’explication, à vrai dire. Je dirais que c’est tout simplement une question de goût, ça correspond à mon envie.
FdC: Il y a une grande unité de style entre tous vos films, même si vous semblez utiliser de plus en plus le zoom. Comment diriez-vous que votre style a évolué depuis votre premier film ?
HSS: Au tout début de ma carrière cinématographique, je ne savais pas du tout ce que j’allais bien pouvoir faire. Et aujourd’hui encore, je n’ai toujours aucune idée de ce que l’avenir me réserve et de ce qu’il me reste à accomplir. Je crois beaucoup au pouvoir de la curiosité. Soit je découvre quelque chose de neuf sur lequel me concentrer, soit je m’ennuie et dans ce cas là je passe à autre chose. Quelque chose de neuf, bien sûr.
FdC: Vous travaillez souvent avec des acteurs et des techniciens renommés, et pourtant vous dites travailler avec des petits budgets. Quelle est d’après vous votre position dans le cinéma coréen contemporain ?
HSS: Je ne pense pas être le mieux placé pour répondre à cette question. Il faudrait demander à d’autres observateurs.
FdC: Y a-t-il des choses qui vous ont particulièrement marqué dans le cinéma coréen récent?
HSS: Des bons films, quel que soit leur genre !
D’après une interview de G. Coutaut