Ciné Mont-Blanc
A ne pas rater !!
Le prochain Coup de Coeur Surprise aura lieu
le Lundi 8 Janvier 2024 à 19h 30.
Vous êtes conviés à partager vos impressions autour d’un verre après la projection.
A ne pas rater!
/!\ Le prochain coup de coeur surprise aura lieu le lundi 2 décembre 2024 à 19h 30.A l’issue de la projection, nous vous proposons de nous rejoindre afin d’échanger vos impressions.
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Le Genou d’Ahed
LE GENOU D’AHED
De Nadav Lapid – France/Allemagne/Israël – 2021 – 1h40 Avec : Avshalom Pollak, Nur Fibak Le réalisateur du brillant « Synonymes » n’a pas manqué ses débuts dans la compétition cannoise, d’où il est reparti auréolé d’un PRIX DU JURY. Du grand cinéma autobiographique et très politique où il règle allègrement ses comptes avec son pays. Jamais il n’avait paru aussi en colère et désespéré. Et jamais sa mise en scène n’avait semblé à ce point à la fois libre et maitrisée. Le héros de son nouveau film n’a pas de nom mais une initiale, Y. Cinéaste engagé, Nadav Lapid est en plein casting de son nouveau film intitulé Le Genou d’Ahed, centré sur cette jeune Palestinienne de 16 ans (Ahed Tamini) qui a défrayé la chronique en 2018 le jour où un groupe de soldats israéliens a tenté de rentrer chez elle, dans un petit village de Cisjordanie au cœur des territoires dits occupés. Sa réaction spontanée fut de gifler l’un d’eux, ce qui lui a valu une peine de prison de neuf mois et de devenir un symbole. Pour les Palestiniens elle est une héroïne. Pour le pouvoir israélien, elle est une terroriste. Le réalisateur a rebondi sur une déclaration d’un député israélien qui avait estimé qu’il aurait fallu lui tirer dessus, au moins dans le genou, pour qu’elle soit définitivement assignée à résidence. Mais, en parallèle, Y a accepté une invitation à venir présenter son long métrage précédent dans un petit village situé au sud d’Israël, dans le désert d’Areva où il est accueilli par l’organisatrice de l’évènement. Cette dernière est une fonctionnaire du ministère de la Culture tout acquise à sa cause et au charme de laquelle il ne semble pas insensible, jusqu’à ce qu’elle lui demande de remplir un questionnaire pour qu’il coche les sujets qu’il abordera. Elle lui fait bien comprendre qu’il faudra rester dans les clous : la goutte d’eau pour un homme au bord de la crise de nerfs, de surcroit en deuil de sa mère (et coscénariste) qui vient tout juste de mourir, et vent debout contre son pays qui, pour lui, piétine en permanence les règles les plus élémentaires de liberté. Dès lors, le film devient un cri de rage. Sur le fond comme sur la forme. Comme cette tirade hallucinante d’Y (interprété magistralement par le très impressionnant Avshalom Pollak, danseur, chorégraphe et metteur en scène, qui trouve ici son premier grand rôle sur grand écran) sur l’Etat Juif : « Nationaliste et raciste qui abrutit ses citoyens en les maintenant dans l’ignorance et où chaque génération engendre une génération pire encore ». Lapid traduit physiquement par sa mise en image le bouillonnement intérieur et l’explosivité soudain incontrôlable d’Y. Le geste de cinéma est fort car jamais contraint par tel ou tel producteur qui lui aurait suggéré de réduire ça et là la voilure de l’indignation. Un défi relevé par le réalisateur : traduire en image une haine, celle qui le bouffe face au recul de la démocratie en Israël. Du cinéma vécu comme un sport de combat, récompensé du Prix du Jury dans le palmarès cannois. – D’après les critiques de PREMIERE – par Thierry Cheze –
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Les amours d’Anais
Les Amours d’Anaïs
Film français de Charline Bourgeois-Taquet
2021/ Durée 1H38
Avec Anais Demousitier, Valeria Bruni Tedeschi, Denis Podalydes
Telerama : Anaïs est un tourbillon. Malgré les épreuves, elle court après le bonheur, l’amour… et la femme de son amant. Le délicieux portrait d’un feu follet. « Vous êtes qui, Anaïs ? » : l’interrogation claque au milieu du film, posée fermement par Valeria Bruni Tedeschi à la jeune femme qui lui fait face. Simple comme bonjour, cette question. Mais d’une pertinence, d’une justesse imparables compte tenu de ce qu’on a vu, jusque-là, de ladite Anaïs (Demoustier, irrésistible) : une agitation permanente, un mouvement perpétuel, un tourbillon de paroles contradictoires et d’actes à l’avenant. Bien que pressée, elle arrive en retard à tous ses rendez-vous — avec la propriétaire de son appartement à qui elle doit des mois de loyer, ou avec son ex-amoureux, dont elle refusait de partager le sommeil et le quotidien. Et puis elle se sauve, court vers le moment suivant, le coup de cœur d’après… Portrait d’un feu follet, qui donne sa forme enlevée à ce premier long métrage de Charline Bourgeois-Tacquet, tout en élans et ellipses, salué à la Semaine de la critique du Festival de Cannes.
Le bleu du miroir : Le premier long-métrage de Charline Bourgeois-Tacquet possède des allures de comédie musicale. Et si Anaïs Demoustier, parfaite interprète du personnage, ne danse pas, c’est tout comme. Traversant Paris, à pied ou à vélo, sans paraître toucher le sol. Elle est l’héroïne d’un film auquel elle dicte son rythme, inspire sa musique. L’allegro, bientôt, passera en mode moderato. Par la grâce d’un emballement amoureux à l’issue duquel l’éternelle adolescente aura appris à grandir. Récit initiatique d’humeur joyeuse, Les Amours d’Anaïs mène sa course dans l’univers aisé et littéraire parisien de Saint-Germain-des-Prés, où la jeune fille, inscrite à la Sorbonne, prépare une thèse sur l’écriture de la passion au XVIIe siècle. La réalisatrice connaît bien ce milieu, pour y avoir évolué, en tant qu’étudiante d’abord puis employée dans une maison d’édition. Elle en restitue l’esprit hédoniste et mondain avec l’ironie qui sied aux beaux esprits dégagés de tout souci d’argent. Anaïs n’a pas le sou, mais elle fait partie du cercle et goûte à ses plaisirs….
Le monde : Le film, assez gai dans sa première partie, acquiert de la gravité dans la deuxième, se confrontant à un sujet fort sérieux, n’est-il pas ?, à savoir l’amour avec un A majuscule. L’actrice est parfaite dans un rôle qui lui sied et elle est encore meilleure quand elle a du répondant face à elle, soit une Valérie Bruni-Tedeschi sage et sobre (débarrassée d’une certaine tendance à l’hystérie, elle est excellente) et un Bruno Podalydès égal à lui-même mais un peu sacrifié au duo féminin. Dans ce portrait d’une jeune femme qui se cherche mais penche pour le plaisir et le désir, Les amours d’Anaïs s’éloigne vite du triangle amoureux sans perdre de son charme éthéré
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La nuit des Rois
LA NUIT DES ROIS
film de philippe Lacôte-1h33
France / Côte d’ivoire / Canada / Senegal – 2021
avec Bakary Koné, Steve Tientcheu, Digbeu jean cyrille…
C’est d’avantage à une version des Contes des 1001 nuits que fait penser cette chronique violente de la lutte pour le pouvoir au sein d’une sinistre maison d’arrêt et de correction d’Abidjan. Avec la Nuit des Rois, le cinéaste avait envie d’observer la société ivoirienne par le prisme de la plus grande prison du pays, la MACA (qu’a connu sa mère),le temps d’une nuit de fin de règne et de renversement des pouvoirs (la côte d’ivoire engluée par la question de la succession à la tête du pouvoir).
Barbe-Noire, chef des détenus, pour instaurer son autorité vacillante, réactive une tradition ancestrale: à la prochaine lune rouge, un prisonnier devra raconter une histoire toute la nuit sous peine d’être massacré; le malheureux élu, rebaptisé Roman va relater ou inventer la splendeur et les misères de Zama king, chef d’un gang pendant la guerre civile. A la manière du récit qui part de faits documentés pour les transformer en légende, le film entremêle avec brio le réalisme, le mythe et la magie.La puissance des mots agit comme une libération pour ses codétenus qui prennent le relai de son récit dans des chants proches de la transe .Dans ce film il y a une expression du monde imaginaire africain qui implique des visions et hallucinations tout en oscillant librement entre le réalisme et le surnaturel.La théâtralité de certaines scènes est indissociable d’une puissante mise en scène de cinéma.Philippe Lacôte joue des contrastes entre le dedans (noirceur de la nuit carcérale)et le dehors(couleurs éclatantes à l’extérieur); entre le style quasiment documentaire des séquences de prison filmées caméra à l’épaule et la réalisation à la fois plus ample(large caméra en mouvement)et plus posée des flash-back sur Zama King: envoûtement garanti! Prix du rayonnement Cinemania (maîtrise de l’image et du son, performances d’acteurs, pouvoir des histoires qu’on se raconte).
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Danielle Arbid (Passion Simple)
Née le 26 avril 1970, Beyrouth
Liban
Réalisatrice, scénariste, actrice
Dans les Champs de Bataille, Un Homme Perdu, Beyrouth Hôtel, Peur de Rien, Passion Simple
ENTRETIEN AVEC DANIELLE ARBID
Vous souvenez-vous de la première fois que vous avez lu « Passion Simple » d’Annie Ernaux ?
Ce livre, je l’ai longtemps eu dans ma poche. J’avais la sensation qu’il m’appartenait et je l’offrais à tous les gens qui tombaient amoureux autour de moi. Il faisait un état des lieux parfait, précis et merveilleux de la passion amoureuse. Il en exposait les syndromes, un peu à la manière de George Perec… Même si je ne l’ai lu qu’en Folio des années après, je me souviens très bien d’avoir vu à sa sortie, en 1991, une affiche du beau visage d’Annie Ernaux avec une accroche du style « Une femme amoureuse d’un Russe ». Regarder ce visage amoureux, presque vulnérable, fragile, c’était une forme de communication indirecte entre nous deux au point de me demander à quoi pouvait bien ressembler le mien à ce moment-là… car j’avais lu Passion Simple parce que j’étais dans le même état qu’elle. (suite…)
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Naomi Kawase ( True Mothers )
Japon
Réalisatrice
Suzaku, Shara, La Forêt de Mogari, Les Délices de Tokyo, Still the Water, True Mothers
ENTRETIEN AVEC NAOMI KAWASE
True Mothers traite de la maternité, un thème que vous avez déjà abordé dans vos films précédents. Pour quelles raisons y revenir ?
True Mothers est l’adaptation d’un roman à succès au Japon, qui s’intitule Le Matin arrive de Mizuki Tsujimira. Ce roman traite de deux façons d’être mère : être une mère de sang, et être une mère adoptive. J’ai moi-même été élevée par des parents adoptifs, et découvrir cette œuvre était un signe du destin. (suite…)
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Passion simple
PASSION SIMPLE
De Danielle Arbid – Franco-Belge – 1H 39
Avec Laetitia Dosch, SergeÏ Polunin, Lou-Teymour Thion, Caroline Ducey
Malgré le titre, le scénario et le livre traitent plus d’une aliénation que d’une passion amoureuse. Mais toute passion ne comporte -t-elle pas une forme d’aliénation ? Hélène (Laetitia Dosch), enseignante à la faculté de lettres, divorcée, ne vit plus que dans l’attente des appels téléphoniques d’Alexandre (SergeÏ Polunin, danseur classique avant d’être acteur), marié, travaillant à l’ambassade de Russie. Leur brève rencontre se limite à des rapports sexuels.
Dans le livre autobiographique d’Annie Ernaux, il s’agissait surtout du constat clinique d’un état psychologique égocentré ; l’auteure faisait l’ellipse du récit des relations charnelles. Comment mettre en images les phrases sèches d’Annie Ernaux ? Pour leur donner chair, Danielle Arbid s’attarde sur les corps, surtout celui d’Hélène soumise à son désir. Mais plus que dans les scènes de sexe, c’est dans les moments de solitude que la passion irradie, transfigurant le visage de l’actrice. Au bout du compte, l’autopsie réussie d’un amour singulier – toxique ? – loin des vieilles lunes du romantisme mais sans être limitée à l’étude d’un cas clinique.
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Tony Gatlif
Né le 10 septembre 1948 à Alger
Nationalité : France
Réalisateur, scénariste, acteur, compositeur
Latcho Drom, Gadjo Dilo, Exils, Vengo, Swing, Transylvania, Liberté, Geronimo, Djam, Tom Medina
« TOM MEDINA » ENTRETIEN AVEC TONY GATLIF
◆ Tom Medina, c’est un film autobiographique ?
Tom Medina est le film le plus proche de mon histoire mais ce n’est pas un film autobiographique. Je ne raconte pas ma vie dans mes films, ça m’ennuie, je m’inspire de faits réels qui me sont arrivés. L’origine du film, c’est l’éducateur qui m’a aidé lorsque j’étais dans la rue à Paris, après avoir fui l’Algérie dans les années 60. J’ai été placé en foyer, puis en maison de correction, j’ai eu la chance de rencontrer Claude Orange, mon éducateur, qui est devenu mon maître, puis mon guide. (suite…)
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True Mothers
True Mothers
Film japonais de Naomi Kawase
2019/ Durée 2H19
Avec Hiromi Nagasaku, Arata Iura, Aju Makita
Satoko et son mari Kiyokasu, couple japonais aisé, ont fait la choix de l’adoption devant leurs échecs à concevoir. Ils ont adopté Asato. 6 ans plus tard , la mère biologique de Asato, Hikari qui était âgée de 14 ans au moment de la naissance , les contacte à nouveau…
Au delà de ces deux portraits de femmes, Naomi Kawase décrit un contexte autour de l’adoption au Japon qui est fascinant à plus d’un titre. Elle décrit une certaine opprobre autour de ce phénomène qui crée une forme d’exclusion voire de discrimination, et elle décrit très bien ces réseaux d’entraide qui permettent à des adolescentes tout juste pubères de surmonter l’épreuve d’une grossesse bien trop précoce. Toute la période où Hikari est dans cette association assurant la transition et la présentation avec les adoptants est magnifique. Elle constitue un pont entre les protagonistes, aplanissant les différences sociales si prégnantes au début du film. Les failles de chacun s’affichent au grand jour, la souffrance de ces familles qui ne peuvent avoir d’enfants biologiquement, et le drame de celles qui ne se retrouvent mères avant même d’avoir fini le lycée. Ce que cela dit de la famille au Japon, mais aussi dans toute la zone géographique tant on retrouve la même chose en Corée par exemple, prouve à quel point le sujet est toujours sensible et la place des jeunes filles si précaire.
Le grand sujet dans le film, ce sont les différentes façons d’être mère. Adoptive ou biologique, chacune des perspectives est longuement développée avec deux immenses flashbacks qui entourent le présent : la mère biologique se retrouvant exclue de l’équation familiale, voit se prolonger le déni qui a entouré sa grossesse, et la mère adoptive qui accède certes au bonheur, ressent aussi un sentiment d’imposture.
L’architecture du récit de True Mothers est habile et plaisante, suscitant une forme de suspense, même si le film n’est en rien un thriller. Plusieurs scènes flirtent avec le documentaire, en particulier celles se situant sur une île près d’Hiroshima où une agence d’adoption veille sur des jeunes filles avant leur accouchement. True Mothers est marqué par la plus grande bienveillance à l’encontre des deux mères, traitant les sujets de la grossesse des mineures d’une part, et l’infertilité, d’autre part, avec une belle pudeur et une certaine élégance.
Et pour ancrer davantage son propos dans le réel, la réalisatrice revient à la forme de ses débuts, comme dans son documentaire à la première personne Naissance et maternité sorti en 2006, en se plaçant régulièrement à la lisière entre la fiction et le reportage. Aussi s’immerge-t-elle notamment, sur l’île d’Hiroshima, dans un refuge pour « fille-mères » (qui sont en réalité parfois des prostituées) forcées de cacher leur grossesse et de destiner leur enfant à l’adoption : elle donne alors à voir des images prises sur le vif, dans lesquelles on l’entend s’entretenir directement avec ses personnages.Ce nouveau long-métrage de Naomi Kawase, elle-même abandonnée, puis adoptée par son grand-oncle et sa grand-tante, est, par instants, profondément émouvant.
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Arthur Harari ( Onoda )
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ONODA
ONODA, film français, japonais, allemand, belge, italien et cambodgien De Arthur Harari, 2H45
Semaine du 16 au 22 septembre 2021
Peut-être n’y a-t-il pas d’histoires plus belles que celles qui se penchent sur ces grands égarés qui, comme Don Quichotte ou Robinson Crusoé, décident de tourner le dos au monde et de lutter contre son cours implacable. C’est à une figure de cet ordre, à la fois superbe et pitoyable, que le jeune cinéaste français Arthur Harari, consacre un deuxième long-métrage magnifique et aventureux.
Le film se penche sur la guerre du Pacifique et ses suites à travers le cas bien réel du dernier soldat démobilisé, le sous-lieutenant Hiroo Onoda, retrouvé en 1974 sur l’île où il avait été envoyé en mission, celle de Lubang, dans l’archipel des Philippines, près de trente ans après la fin du conflit et la capitulation de son pays, le Japon. Cette expérience inouïe et vertigineuse est ici retracée comme une échappée hors de l’histoire telle qu’on la dit souvent écrite par les vainqueurs. Et donc comme la tentative d’un vaincu pour faire perdurer sa propre réalité, dût-elle se retrancher au sein d’une île.
Face à un tel sujet, Arthur Harari, épaulé par son frère et chef opérateur Tom Harari, aurait très bien pu s’engager sur la piste attendue de la folie et concevoir son film comme exploration des limites. Il recourt plutôt à une écriture classique, parti pris de ligne claire qui fait naître l’émotion tout autrement : en accompagnant son personnage et ses trois compagnons, au plus près, en cherchant à le comprendre, en le dessinant aux justes proportions.
Plutôt qu’un délire perceptif, le film investit l’isolement et le déni. Ce n’est le vertige de la situation qui intéresse Harari, mais plutôt ce qui naît entre les quatre soldats du film, malgré les frictions passagères : des soins, des gestes d’attention, un dévouement mutuel, une solidarité et même une forme d’amour sublimé, qui s’opposent à la peur qu’ils font régner sciemment parmi les habitants de l’île afin de maintenir à flot leur petite utopie.
Le vertige n’en ressurgit pas moins par la bande et par les années qui éloignent insensiblement Onoda de la réalité de la guerre, les ellipses qui engloutissent ses compagnons, puis accusent le vieillissement du personnage, interprété par deux acteurs différents. Peu à peu, c’est le syndrome du « bon fils » qui se manifeste sous les traits du héros : amoureux d’une obéissance sans objet, dépendant d’une croyance qui compense la crainte de l’abandon. Onoda peut alors être vu comme l’histoire d’un oubli, d’un contre-ordre qui arrive avec trente ans de retard, quand , même l’instructeur a oublié jusqu’à l’existence de son ancien élève.
La fiction d’une guerre sans fin, imaginée pendant trente ans par le soldat oublié, apparaît alors pour ce qu’elle est : le mirage qui permet à toute vie d’être vécue.
Critique inspirée de celle du Monde aout 2021
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