D’Yves Montmayeur – France- Autriche –1 h 32 – Documentaire
Tous les journalistes qui ont interviewé Michael Haneke vous le confirmeront : impossible de lui faire expliquer le sens de ses films. Le documentariste Yves Montmayeur, qui a suivi la plupart des tournages du cinéaste autrichien depuis Code inconnu, essaie, lui, depuis quinze ans. Ses tentatives infructueuses auprès d’un Haneke de plus en plus fermé sur la question tournent même au running gag… Le réalisateur du Ruban blanc, qui se revendique volontiers « artisan », est en revanche plus prolixe sur la fabrication de ses films. Et c’est passionnant.
Yves Montmayeur a choisi de raconter Haneke à rebours, en partant de la consécration d’Amour pour remonter jusqu’à la trilogie de la « glaciation émotionnelle » des débuts — Le Septième Continent, Benny’s Video, 71 fragments d’une chronologie du hasard. Les extraits de films sont judicieusement choisis, les témoignages des proches (notamment ses actrices fétiches Susanne Lothar et Isabelle Huppert) précieux pour appréhender le perfectionnisme d’un cinéaste obsédé par le contrôle.
Mais ce sont les nombreuses séquences de making of qui révèlent le mieux la personnalité de Haneke. Si son cinéma a perdu une partie de sa rigidité théorique au fil des années, l’homme, lui, n’a pas changé : toujours ces habits noirs, toujours ce look de pasteur calviniste parfaitement raccord avec la radicalité (ses détracteurs diraient « la sinistrose ») de son oeuvre. Et pourtant… Haneke au travail, sur le tournage de ses films ou dans ses cours de théâtre à l’Académie des arts du spectacle de Vienne, c’est une pile électrique : il ne tient pas en place. C’est aussi, plus surprenant encore, un homme très drôle, au rire communicatif. Il le disait lui-même lors de la sortie du Temps du loup : « C’est souvent plus agréable de tourner un film avec moi que de le regarder.