CINÉCIMES Du 2 au 7 février
NERUDA
Pablo LARRAÍN – Chili/Argentine/France/Espagne – 2016-1h48-VOST
Avec Luis Gnecco, Gael Garcia Bernal, Mercedes Morán.
« Pablo Neruda est comme l’eau qui coule sur les doigts, on ne peut pas l’attraper, mais les mains restent mouillées. » Le plus fameux des poètes chiliens ne peut être figé dans une biographie classique : visionnaire, séducteur et facétieux, homme d’État, insoumis, opposant communiste. Pour le réalisateur, « le film n’est pas une histoire sur Neruda, c’est une histoire nérudienne. Un film sur la légende, sur la littérature, sur la manière dont on peut appréhender la société par le prisme de la poésie. Je viens d’un pays qui est défini par les poètes. Sans Pablo Neruda, mais aussi bien d’autres, Gabriela Mistral et Vicente Huidobro, Pablo de Rocka, Jorge Teillier ou Nicanor Parra, je ne sais plus qui nous sommes. »
C’est donc une rêverie lumineuse, libre et vibrante sur son illustre compatriote. Situé à la fin des années 1940, le film ne reconstitue pas la fuite du grand homme, pourchassé par les sbires du président d’alors, Gabriel González Videla : il la réinvente, en fait un inclassable jeu du chat et de la souris, à la fois épique, fantasque et ironique.
Dans ses films, il s’agit pour lui d’approcher « des gens victimes des circonstances historiques et forcés de se comporter d’une manière qu’ils ne comprennent pas pleinement ». En 1973, lorsque la démocratie chilienne de Salvador Allende s’écroule sous les roquettes des putschistes, lorsque meurt Pablo Neruda, Pablo Larraín, aujourd’hui âgé de 40 ans, n’était pas encore né. Délibérément, il prône un regard anachronique : « Quand je fais un film sur Neruda, je sais ce qui s’est passé depuis. (…) Quoi que je raconte, c’est toujours une fabrication à partir du présent. »
C’est donc avec la voix off de Gael Garcia Bernal que commence le film. Cet implacable policier est en fait un fantasme né de l’imagination de Neruda, qui ne déteste pas se voir en ennemi public dans le regard envieux de celui qui le traque.