Les bêtises

Les betises2De Alice et Rose Philippon – France – 2015 – 1h19
Avec Jérémie Elkaim, Sara Giraudeau, Jonathan Lambert…
François, enfant adopté qui vient enfin de découvrir l’identité de sa mère biologique, se fait embaucher comme extra dans la soirée qu’elle donne. Mais ce distrait timide et maladroit a du mal à tenir le rôle, il enchaine les erreurs et les « bêtises » et sème la désolation et le désordre. Les réalisatrices s’inspirent de Tati et de Chaplin pour faire évoluer ce clown lunaire et attachant, si bien interprété par J. Elkaim
Premier film.


Sur Allociné : Les Bêtises

Critique

Parce qu’il vient de découvrir, enfin, l’identité de sa mère qui l’a abandonné bébé, il se fait engager comme extra pour la fête qu’elle donne dans sa somptueuse villa de province. Hélas, à 35 ans, François (Jérémie Elkaïm, parfait en grand dadais lunaire) est le genre de type dont les lacets se coincent toujours dans les Escalator, qui emporte chez lui les dossiers que son patron, furibard, lui réclame d’urgence et qui, pour garder l’équilibre dans un bus, se raccroche non à la barre, mais à la tringle à rideau d’une passagère… Un tel zozo ­lâché en liberté dans une « party » ­appelle forcément les catastrophes. Les deux réalisatrices semblent con­templer leur héros exactement comme les spectateurs : avec l’impassibilité de certains témoins devant les désastres à venir. Quand la fatalité est entre les mains d’un garçon pareil, semblent-elles nous dire, il n’y a plus rien à faire, sinon compter les secondes qui vous séparent du cataclysme. D’où ces gags qu’elles alignent avec une lenteur calculée, le temps de permettre à François de trouver un moyen de se surpasser encore dans son art de semer, autour de lui, le désordre et la désolation.

Par manque d’expérience, certains de leurs gags font pschitt. Alors, durant quelques instants qui semblent étrangement longs, le film fait du surplace. Mais les bonnes idées abondent : le fils alcoolique de la famille (Alexandre Steiger) qui trouve, paradoxalement, dans son ébriété permanente la lucidité qui manque à tous les sobres de son clan. La serveuse complice (Sara Giraudeau, délicieuse) dont le hoquet permanent cesse dès qu’apparaît le futur homme de sa vie. Sans oublier l’interprétation de la chanson qui donne son titre au film (« Je ne fais que des bêtises quand t’es pas là »), entonnée d’abord avec maladresse par François, mais qui, reprise en chœur par des convives en plein ­délire, devient un hymne à la gloire des timides et des maladroits, face à tous les fâcheux qui les cernent…

Ce qui séduit le plus dans ce film volatil, c’est l’originalité des deux sœurs débutantes. Loin de la facilité épaisse, de la vulgarité satisfaite de tant des comédies françaises actuelles, elles ont l’audace, elles, de miser sur Blake Edwards, pour le rythme, et Jacques Tati, pour le sens de l’espace. Elles sont loin de les égaler encore. Mais si la route est longue, le chemin est bon.

Pierre Murat – Télérama

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